Le comportement en constante recherche de validation de notre part d'Artie ne nous surprend guère, mais ne nous empêche pas de l'expliquer brièvement à la scientifique dans le cas où elle pourrait se poser des questions à ce sujet. Nous préférons être claire plutôt que de risquer de recevoir, plus tard, des questions qui risqueraient de placer Cannelle dans la position d'une mauvaise dresseuse.
Rapidement, la scientifique reprend la parole pour annoncer que nous allons passer à la deuxième partie de l'apprentissage de la communication. Ou plutôt la deuxième étape. Lors de nos échanges de mails, aucun processus n'avait été détaillé, alors Cannelle se contente de hocher la tête comme nous attendons la suite. Nous écoutons ce qu'elle nous dit, qui n'est pas dépourvus de pertinence, mais dans le même temps nous continuons de penser à ces histoires d'odeurs émises par les pokémons qui pourraient être reproductibles dans mes gâteaux. Ce faisant, une de mes réflexions propres passe mes lèvres, rapidement reprise par Cannelle qui lui donne le ton hésitant de ces personnes qui n'assument pas leurs propres pensées. C'est à dire la grande majorité de la population, celle à laquelle la mère de famille et bonne petite voisine doit sans nulle doute appartenir.
Nous nous attendions à ce que la scientifique perde un peu contenance, mais elle est capable de répondre à la question assez rapidement, ce qui nous plaît. Un léger sourire se dessine sur le visage de Cannelle. Sûrement est-ce la profession de Madame Kanazawa qui lui octroie cette capacité. Après tout, une personne de science comme elle n'est-elle pas sensée être curieuse de tout ? Même des idées les plus inhabituelles ?

- Je vois..., nous imaginons que c'est comme beaucoup d'autres choses : exploiter des pokémons tant que ça a l'air gentillet, oui, mais assumer jusqu'au bout toutes les horreurs que nous leur faisons subir pour notre plaisir personnel, il en est hors de question. Veuillez m'excuser, ma question sortait de nulle part alors que vous vous apprêtiez à poursuivre avec mon floramantis. J'espère que ce n'était pas trop dérangeant.

Nouveau sourire de la part de Cannelle.
Elle reporte son attention sur son floramantis qui se tient toujours debout entre les deux femmes et les autres pokémons. Il n'est plus aussi plein d'appréhension qu'avant, ayant sûrement été détendu par le fait que, pendant un instant alors qu'il attendait nos instructions, nous ne nous soyons pas intéressées à lui. Pendant que nous ne nous le regardions pas, il s'est approché de l'archéduc, mis en confiance par leur tentative de communication précédente. Les antennes vertes sur sa tête frétillent tandis qu'il tend une patte vers l'une des ailes de la créature volante. Le bout de la griffe à l'extrémité de sa patte touche ses plumes. Les excroissances ressemblant à des oreilles et moustaches du floramantis ont un petit mouvement, quelque part entre la surprise et l'appréciation. Mais que fait-il ?
Artie caresse doucement la plume qu'il a au bout de sa griffe, avant d'y aller aussi de son autre patte, et les passer toutes les deux dans les plumes de l'aile de l'archéduc. Des petits sons appréciatifs lui échappent, et c'est seulement à ce moment que nous comprenons ce qu'il est en train de faire, ou plutôt pourquoi il l'a fait et la conclusion qu'il en a tiré. Cannelle porte une main à son front en ayant un petit soupir amusé :

- Ohlala Artie... Je crois qu'il a pensé que les ailes de votre pokémons seraient douces et que tester l'a convaincu. Veuillez l'excuser pour sa non-attention à notre activité, il a tendance à être rapidement absorbé par les choses qu'il trouve belles... Et il semblerait que les ailes de votre archéduc en fassent partie, nous observons encore un peu le pokémon pour confirmer nos paroles, mais il ne nous semble pas déceler de signe nous donnant tort. Puis nos sourcils se froncent et nous relevons la tête vers la scientifique pour lui demander : ... Artie a-t-il demandé l'autorisation à votre archéduc avant de le toucher ?

Notre ton est très sérieux, ce qui pourra peut-être surprendre, mais la politesse est une valeur importante que nous nous efforçons d'inculquer également à nos pokémons. Bien qu'ils soient des créatures à l'origine sauvages et dont les codes diffèrent des notre, il ne me semble pas, à l'exception de rares espèces, que deux pokémons inconnus se touchent ainsi sans communiquer comme il le faut d'abord. A moins d'un combat, mais le contact qu'a établi Artie n'a rien d'un affrontement.
Une partie de nous est satisfaite de le voir surmonter sa peur de l'oiseau, tandis qu'une autre se dit qu'il ne faudrait pas qu'être sympathique avec n'importe qui devienne une habitude. Après tout, Artie étant mon pokémon, il devra me suivre dans le monde où je compte aller bientôt. Un monde fait de méfiance, de crime et de sang.