Faute d'avoir mieux à faire au boulot, tu décides de rentrer avec Inzia. Un choix paradoxal au vu de votre silence tout du long du chemin et de la mauvaise humeur qu'elle parait exsuder. Tu as pris sa présence comme excuse pour plier bagage, l'envie d'être en sa compagnie étant peu existante. Un état d'esprit partagé même si l'adolescente te fait au moins l'aumône de t'attendre pendant que tu rassembles tes affaires. Malgré ses grognements, elle reste une brave gosse. Cela ne l'empêche pas de t'abandonner sans un mot dès que vous êtes dans l'entrée de l'immeuble.

« Bonne soirée à toi aussi. »

Tu grommelles pour le principe à son dos qui s'éloigne. Etonnement, cela ne t'attire pas le doigt d'honneur auquel tu t'attends. La maturité voudrait sans doute que tu cesses de provoquer une ado, mais tu ne te targues pas d'être particulièrement mature.

Tu passes par toutes les étapes de ta routine - récupérer le courrier, prendre les escaliers jusqu'au cinquième pour vérifier que Six va bien, redescendre au quatrième - avant d'arriver sur le pas de ta porte. Tu approches ta clé de la serrure quand Shamir jaillit de sa ball pour t'interrompre. Tu recules immédiatement d'un pas, sur le qui-vive. Quelque chose cloche. Tes poils se dressent sur tes bras en réponse à ce bref contact que tu sens au bord de ta conscience. Ta Lucario ne manque pas de te faire comprendre par tous les moyens possibles qu'elle a repéré un problème dans l'appartement. En tendant l'oreille, tu n'entends pourtant rien. Pas même le bruit des griffes de Sherlock sur le plancher ce qui n'annonce décidément rien de bon. Tu récupères la matraque télescopique dans ton sac pour la déployer silencieusement. Shamir se tient tout contre la porte et elle t'adresse un hochement de tête avant d'appuyer sur la poignée. La serrure est déverrouillée. Tu ne comprends pas comment c'est possible. Rien n'indique qu'elle ait été forcée ou même crochetée. Tu t'élances dans l'appartement à la suite de la louve. Ses griffes luisent déjà, prête à trancher tout intru. Elle s'arrête néanmoins net en constatant ton Fulgudog tranquillement endormi sur le lit. Il est accompagné d'une autre silhouette que tu devines à peine sous les couvertures. Quelques mèches blondes débordent sur ton oreiller.

« C'est quoi ce bordel ?! »

Cela gigote sur le matelas. D'abord Sherlock qui se met à battre paresseusement de la queue en bâillant, peu dérangé d'avoir été pris en flagrant délit de fraternisation avec l'ennemi. L'ennemi en question se redresse avec aussi peu d'empressement en se frottant les yeux.

« Pas besoin de faire autant de bruit. »

A la question qu'est-ce que Erika Cromwell fait chez toi, tu n'as aucune réponse. Ton bras se relâche contre ton corps. Malgré cette apparition des plus étranges, ce petit bout de femme t'inquiète peu et Shamir reste de toute façon entre vous, toute prête à réagir.

« Genre j'vais être silencieuse en trouvant quelqu'un dans mon appart. Qu'est-ce que tu fous là ?
Je t'ai dit que je savais où t'habitais.
Personne ne l'aurait pris aussi littéralement.
Détail.
Détail ? Prévenir était un détail aussi ? Pas que tu sois la bienvenue. Et puis, comment t'as fait ?
Comme si j'allais te révéler mes petits secrets. »

La tentation de te taper la tête contre les murs trop fins du loft est difficile à ignorer. Qu'est-ce que c'est encore que cette énergumène sur laquelle tu es tombée ? Tu es bien consciente d'avoir l'habitude de tenir une conversation de la même façon, mais ça ne veut pas dire que tu apprécies d'en être la victime. Elle parait parfaitement à l'aise entre tes draps, une moue ennuyée sur le visage. Elle te fait même l'insulte de caresser ton chien.

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apparition d'un Pokémon, s'il vous plaît :3

Il faut que tu reprennes le contrôle de la situation. Tu as eu une brève occasion de le remarquer : cette femme est dangereuse. Derrière cet innocent minois se cache une vive intelligence et tu ne comptes pas en faire les frais. Pour autant, tu veux comprendre. Tu ne la connais pas assez pour donner beaucoup de sens à ses actions. Tu ne doutes pas qu'il y en ait bien un. Il ne fait aucun doute qu'Erika est culottée, mais elle paraît garder la tête sur les épaules. Aussi fou que cela soit, tu ne l'imagines donc pas être ici à cause d'une lubie. Si elle a fait ce choix, c'est qu'elle a quelque chose à gagner à se cacher dans ton loft pourri. Cela a probablement un lien avec son époux et sa révélation lors de votre rencontre quelques jours plus tôt.

« Donne-moi une bonne raison de pas te balancer aux flics. »

Elle rit sans s'en cacher et le son te crispe un peu.

« Vraiment ? Je ne suis pas idiote, tu sais. Cet immeuble n'aime pas trop que l'on attire le regard de la police. Toi non plus je présume. »

Effectivement, c'est toi l'idiote dans l'histoire avec ta manœuvre bancale pour faire de l'intimidation. Tu te relâches avec un soupir frustré. Ta tentative pour retrouver tes moyens n'est pas très efficace.

« T'en fais pas, je suis pas là pour te créer des ennuis. Il me fallait juste un endroit où me poser.
T'as jamais entendu parler d'un hôtel ? »

Tu mords par réflexe. Elle ne cesse pas de sourire en réponse, mais tu la trouves un peu plate maintenant qu'elle ne s'amuse plus. Tu n'es pas sûre que ce soit vraiment le cas. Peut-être t'imagine-tu des choses. Après tout, tu ne la connais pas. Qu'importe que tu sois sur son cas depuis des semaines, tu dois te rappeler qu'elle n'est qu'une étrangère. Tu ne la vues qu'une fois, brièvement. C'est sans doute ce qui te perturbe. Au-delà de son attitude générale, il n'est pas si naturel pour toi d'entrer en contact avec tes cibles et d'apprendre des choses d'eux qu'ils t'auraient livré de leur plein gré. Erika s'est confié sur quelque chose d'intime et cela fait d'elle un cas à part.

« Pff, fais comme tu veux. »

C'est dangereux ce que tu dis là, mais tu ne connais personne souhaitant rester ici si il n'y est pas forcé. Et à part si elle veut te voler ton linge sale ou une de tes chaises branlantes, il n'y a pas grand chose qu'elle pourrait te chaparder. Tu ne la vois vraiment pas s'éterniser non plus à cause de ta charmante compagnie. Si elle s'étonne de ta réaction, elle n'en montre rien. Un détail qui t'ennuie, on ne va pas se le cacher. Tu claques de la langue.

« Lock, on sort. »

Sentant ta mauvaise humeur, le Fulgudog ne fait pas le difficile. Il se détache de sa nouvelle amie et te suit de son pas trottinant hors de l'appartement. Malgré tout, il garde ses habitudes. La nouvelle venue ne change de toute façon rien au fait qu'il doit probablement avoir la vessie pleine. Cela n'empêche que cette sortie n'a rien d'un hasard. C'est une occasion pour toi de faire le point sur la situation sans avoir Erika dans les pattes.

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tentative de fuite:

Sherlock retrouve de son fringuant avec chaque pas qui vous rapproche de l'extérieur. Il n'est pas très malin dès que l'on sort de son expérience en tant que pisteur. Son esprit saute trop vite d'un détail à l'autre. En plus, tu n'es pas vraiment fâchée contre lui. Simplement un peu déçue. Tu pensais pouvoir lui faire confiance pour garder l'appartement. Il t'a prouvé qu'il n'était pas si fiable. Tu ne doutes pas que l'intruse ait dû utiliser un stratagème, mais cela n'excuse par le moment de faiblesse de ton chien de garde. Shamir ne se serait pas laissée avoir de la sorte. Raison pour laquelle elle attends ton retour dans l'appartement. Tu n'as même pas eu besoin de lui demander de garder un œil sur la situation.

Tu émerges dans l'air froid de l'après-midi sans trop avoir avancé dans ta réflexion. Ton Fulgudog bondit en avant dès la porte ouverte pour aller galoper sur les quelques carrés de pelouse blanchies par le gel qui longent les immeubles. Tu le laisses faire à sa guise, préférant aller t'adosser à la façade comme tu en as l'habitude. Cela fait, tu trouves ton téléphone pour composer l'un des rares numéros enregistrés dans tes raccourcis. Il ne faut que deux sonneries pour que ton interlocuteur décroche.

« Sam ?
Y a une squatteuse chez moi. »

Tu grognes avec mauvaise humeur. Il faut un instant à Six pour trouver sa voix après une telle déclaration. Cela ne change pas grand chose au vu de ce qu'il baragouine.

« Une... Quoi ?
La même personne qui doit s'être glissée au travers de tes si précieuses défenses. J'suppose que c'est son truc, l'infiltration.
Attends... Quoi ? Qu'est-ce que tu racontes ? T'es chez toi là ? J'ai un taser au besoin. Je peux descendre t'aider. »

Tu imagines la scène d'un Six terrorisé débarquant depuis l'étage du dessus avec son arme qui avait plus de chance de se retourner contre lui. Cela t'arrache un sourire sans doute malvenu quand ton voisin paraît prêt à faire beaucoup d'efforts pour ton bien. Il lui faut souvent beaucoup pour sortir de sa zone de confort.

« T'inquiète pas, je suis pas en danger. Shamir y veille.
Mais ton histoire, c'est un délire, j'ai besoin de plus de détails.
C'est lié à une affaire sur laquelle je bosse depuis un moment.
Uh ?
Je finirais bien par retomber sur mes pattes.
Si tu m'as appelé, c'est que tu pensais que je pourrais t'aider pour un truc, non ? »

Pourquoi l'as-tu appelé ? Tu n'en es pas si sûre. Sur le moment, tu avais ressenti le besoin de partager cette expérience bizarre avec quelqu'un. Tu t'étais dit que peut-être qu'en en parlant, toute cette histoire finirait pas trouver un sens. Que cela lui donnerait aussi quelque chose de réel.

« Pas vraiment. Je peux gérer.
Okay. »

Il le glisse avec un peu d'incertitude. Sans doute car tu te comportes étrangement, un fait auquel il n'est pas habitué. Six préfère la régularité et tu l'es en temps normal.

« Je peux passer plus tard ? Si cette personne a réussi à déjouer mon système de défense, faut que je la rencontre.
Bye, Six. »

Tu raccroches avant qu'il n'ait l'occasion de protester. Tu n'es vraiment pas d'humeur à supporter ça. Tu ne veux pas l'écouter parler tech pour toute la soirée, son pauvre ego de geek malmené par une meuf trop sûre d'elle. Tu siffles ton chien, prête à rentrer. Hors de question de donner à cette pimbêche l'impression que tu fuis.

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tentative de fuite:

L'évènement n'est pas une hallucination résultant d'un cerveau à qui tu ne donnes sans doute pas assez d'heures de sommeil. Tu es forcée de l'accepter lorsque, en entrant chez toi, tu retrouves Erika Cromwell toujours aussi confortablement installée dans ton lit. Elle a changé de position, le dos désormais appuyé au mur et la couette couvrant ses jambes. Au moins, elle ne pousse pas le vice jusqu'à dormir comme si de rien était maintenant que tu es là. Le culot de cette peste doit donc connaitre une certaine forme de limite. Shamir est assisse à proximité de la fenêtre, son regard ne quittant pas l'intruse. Une telle attitude ne t'étonne pas. Tu ne devrais pas non plus être surprise de voir Sherlock quitter ton côté pour aller reprendre place sur le matelas, sa tête allant se poser sur les cuisses de la blonde. Malgré tout, tu ne peux t'empêcher de te questionner sur les raisons derrière une relation si vite créée. Tu exhales un lourd soupir avant d'ôter ta veste et ton écharpe que tu abandonnes sur la table avant de prendre place sur l'une des chaises de ton pauvre duo.

« Vu qu'apparemment je te laisse squatter, tu me dois au moins de satisfaire ma curiosité. »

Cela ne paraît pas cher demandé et tu éviteras ainsi la tentation de t'arracher les cheveux.

« Techniquement, je ne te dois rien. »

Elle déclare avec un sourire satisfait. L'envie de lui lancer au visage la première chose te passant sous la main est tentante, mais il n'y a rien d'assez lourd à proximité. Ton agacement apparent lui plaît, de toute évidence. Cela ne dure pas. Elle observe ses mains un instant, la façon dont elles se tordent dans la fourrure de ton Fulgudog - la sensation n'est pas si agréable, tu le sais, il relâche toujours une faible quantité d'électricité lorsqu'on active trop ses poils -, avant de soupirer à son tour. De lassitude pour sa part.

« Ton Fulgudog est très sensible à la nourriture premium. »

Bien sûr qu'elle s'est débarrassé de sa méfiance en passant par son ventre. Vraiment, il faut que tu trouves un autre garde moins corruptible pour le seconder. Erika continue d'énoncer des informations en les comptant sur ses doigts.

« Ta serrure, elle, n'est pas insensible aux pouvoirs d'un Trousselin. »

L'immeuble est pourri, cela n'a rien d'étonnant. Il est assez facile de pénétrer dans tous les appartements et c'est pour cette raison que tes affaires de valeur sont bien cachées ou, plus souvent, toujours avec toi. La meilleure façon de ne pas se faire voler ici est d'avoir de bonnes relations avec les bonnes personnes. C'est ton cas et, après tout, tu as Sherlock - en théorie -, tu n'as donc pas eu de problèmes depuis longtemps. Mais cela explique que son intrusion n'ait laissé aucune trace derrière elle.

« Et je prévois juste de rester cette nuit. Voilà, je dois avoir répondu aux questions les plus pressantes que tu te poses. »

Absolument pas, mais c'est déjà un bout début.

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apparition d'un Pokémon, s'il vous plaît :3

« Ca ne me dit pas pourquoi tu es là.
Je crois que je vais avoir besoin d'alcool pour répondre et, manque de bol pour toi, je peux pas en boire. »

Juste, le bébé. Tu soupires. Ce n'est pas tant qu'elle parait prête à camper sur ses positions, mais bien qu'elle abandonne la discussion. D'un geste désinvolte, elle tire sur la couette pour l'entrainer avec elle en se laissant tomber sur le matelas. Elle s'entortille dedans jusqu'à ce que, comme tout à l'heure, ne dépasse que quelques touffes de cheveux blonds. Ses mouvements dérangent un peu Sherlock, mais il s'adapte vite et va se lover contre ce que tu supposes être son dos.

« Quel dindon de la farce je fais... »

Tu marmonnes entre tes dents. Dans ces conditions, tu supposes que tu n'as rien de mieux à faire que de retrouver la routine que tu peux après cette journée décidément bien ennuyeuse. Ce serait juste plus chiant de la virer, tu te rassures vis à vis de ton acceptation trop facile de la situation. Si tu demandais l'aide de Shamir, l'intruse serait vite mise dehors, mais tu la devines trop manipulatrice pour s'arrêter là. Il vaut donc mieux la laisser faire son caprice avant de lui souhaiter bon vent quand elle en aura enfin assez et décidera de s'en aller. Quand tu croises le regard de ta Lucario, tu n'y lis aucun jugement. Elle reste méfiante, mais, au moins, elle ne trouve rien d'étrange à ton attitude. Au bord de ta conscience, tu perçois même le fantôme d'une sensation qui te donne l'impression d'approuver ta décision.

« Tu as faim ? »

Tu la questionnes. Tu ne penses pas qu'elle bougera seule ce soir pour préparer sa gamelle. Pas avec cette incertitude dans ton lit qui a l'audace de se sentir concernée par la conversation.

« Y a rien dans ton frigo. J'ai déjà regardé. »

Ca marmonne de sous la couette.

« Je te parlais pas à toi. »

Shamir hoche la tête. Tu as ta première tâche. Son bol en main, tu vas t'agenouiller devant l'évier pour récupérer la boîte hermétique dans l'armoire du dessous où sont stockées les croquettes de ta Lucario. Une variété spéciale riche en minéraux dont les types Acier raffolent. Contrairement à tes autres Pokémon, elle a droit à un régime moins générique. Après tout, elle met du cœur à l'ouvrage dans son travail à l'agence et tu ne peux de toute façon pas nier ton favoritisme. Il est difficile de ne pas donner une place spéciale à un Pokémon que tu as vu naître quand tu n'étais encore qu'une enfant. De plus, votre lien te rend naturellement plus sensible à sa condition physique. Tu veux le meilleur pour elle. Tu lui en met une bonne dose avant de piocher quelques morceaux de pomme dans le surgélateur que tu ajoutes sur le côté. Elle raffole de ce genre de petits snacks. Toute cette préparation ne manque pas d'attirer un Fulgudog à la langue pendante dans ton espace vital, mais tu le chasses en bougonnant. Le traître s'est déjà régalé. Piteux comme les canidés ont l'art de l'être, il retourne se coucher avec un couinement qui aurait pu faire fondre le cœur d'une autre. Tu te contentes de lever les yeux au ciel sur ton chemin pour aller servir son repas à Shamir.

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tentative de fuite:

Avoir quelqu'un dans ton espace ne te réussit pas. Plus encore quand cette personne n'a pas été invitée et n'est absolument pas voulue. Tu te sens un peu contrainte dans tes mouvements, soudainement sensibles aux moindres de tes faits gestes et aux bruits que tu peux produire. Le plancher te parait craquer trop fort sous tes pas, le petit grincement de la chaise en devient gênant, et ne parlons pas du crissement du vieux cuir du canapé défoncé que tu avais récupéré dans un vide-grenier du coin. Faute de trouver tes marques et peu désireuse de l'avouer, tu finis par te caler dans le sofa avec ton ordinateur portable sur les genoux et tes écouteurs sur les oreilles. Avec les murs en papier, ce n'est pas inhabituel pour toi. Généralement, tu ne te met néanmoins pas à regarder une série si tôt et tu préfères de loin le confort de ton lit. Deux épisodes d'une sitcom débile juste là pour te fournir une distraction plus tard, tu ne peux plus nier le regard posé sur toi. Il te brûle l'arrière du crâne depuis vingt minutes. Tu le sais parce que l'impression a commencé juste après la fin d'un générique qui promet déjà de venir te nuire au pire moment parce qu'il va te rester en tête. Agacée, tu bascules le casque en arrière pour le faire reposer sur ta nuque.

« Quoi ?!
Tu ne vas vraiment pas manger ? »

Tu jettes un œil au coin de ton écran. Dix-huit heures douze. Elle exagère.

« Je me couche pas avec les Poussifeu. »

Dehors, il fait déjà nuit noire, ce fait est donc évident. Tu te rends soudain compte de l'obscurité qui est tombée dans le loft. Tu comprends la légère gêne au niveau de tes yeux. Tu t'es trop reposée sur la luminosité de ton ordinateur.

« Et plus tard ?
Il doit me rester une cup noodle dans un coin.
Tu comptes atteindre la retraite ?
Dixit la meuf qui se fait entretenir.
Je comprends que tu sois tout le temps de mauvaise humeur si tu ne te nourris pas correctement. »

Tu te forces à compter jusqu'à trois, puis jusqu'à cinq pour être sûre, avant de prendre une longue inspiration. Tu vas la foutre dehors. Tant pis pour les conséquences, elle a trop tenté sa chance. Elle reprends avant que tu n'ais l'occasion de fermer le couvercle de ton pc et de le poser à tes côtés sur le canapé pour pouvoir te lever.

« Si je paye, tu nous commandes à manger ? »

Ca te pousse à réfléchir. Tu peux faire des efforts supplémentaires si tu y gagnes quelque chose. Au vu de ton régime du jour, tu ne dirais pas non à un vrai repas. D'autant plus si tu n'as ni à le préparer, ni à le financer. Tu fais mine d'y réfléchir.

« T'as pas peur que ton cher mari vérifie tes dépenses ?
J'ai gardé un compte perso. »

Elle le dit comme si tu l'avais profondément offensée en ne l'imaginant pas avoir sa propre carte. D'ailleurs, elle la produit tu ne sais trop d'où - son sac, en toute logique, qui doit squatter ton lit lui aussi - et l'agite dans ta direction. Bon, tu vas faire une concession, mais c'est seulement parce que c'est ta chance de tester le nouveau restaurant paldeanais qui a ouvert dans la city sans frais. Tu te sens presque coupable de faire ça sans Six. Le sentiment passe vite. Tu préfères penser à la tête que va faire le livreur en passant d'un monde à l'autre.

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apparition d'un Pokémon, s'il vous plaît :3

Il y a une forme d'indécence à consommer une nourriture si chère dans un tel décor. Madame refusant de bouger son postérieur de ton lit, tu as fini par t'y installer avec ton butin du jour. Tu te détestes déjà - et elle plus encore - pour les miettes qui vont encore hanter tes nuits pour un bout de temps, mais, lorsqu'un morceau de viande te fond presque sur la langue, ta mauvaise humeur est presque oubliée. Le bouche à oreille n'a pas menti, ce restaurant est excellent. Face à cette débauche, tu es forcée de reconnaitre ta faim et le fait que la fameuse cup noodle du fond de ton placard n'aurait pas été suffisante. Des années d'habitude t'ont rendues sans doute trop tolérante aux appels de ton corps. Tu as beau le savoir, tu n'es pas prête de changer ça. La flemme est souvent trop forte et te tient loin des fourneaux et la limite de ce que tu acceptes de dépenser pour la bouffe est trop facilement atteinte. Toute bouleversée par l'explosion des saveurs, tu songes que tes vrais repas sont toujours pris au côté de quelqu'un. L'idée ne poursuit pas sa route comme tant d'autres.

« D'un coup, t'as l'air plus détendu. Je le savais que manger te rendrait moins grognon. »

Hors de question que tu acceptes cette déclaration. Tu fais mine de n'avoir rien entendu avant de glisser ta fourchette sous la sienne pour lui dérober le morceau qu'elle s'apprêtait à poinçonner. Tu le manges avec d'autant plus de satisfaction qu'elle soupire à tes côtés.

« Une vraie gamine. »

Etrange comme, même sans la connaitre réellement, tu l'imagines sans mal lever les yeux au ciel dans son agacement.

« Je comprends pas... »

Elle pose sa fourchette, sans doute car elle a fini. C'est rapide. Tu as la sensation qu'elle n'a avalé que quelques bouchées. Tu ne vas pas t'en plaindre, cela en fera plus pour toi. Peut-être auras-tu même des restes pour demain.

« Tu as des clients qui ont des moyens. Ils doivent te payer cher. Je suis sûre que mon père ne lésine pas sur les fonds.
Il s'est ruiné. »

Tu interviens sans une once de pitié.

« C'est pas le sujet. Ma question c'est : pourquoi tu vis dans ce trou à Rattata ? Pour ça, je peux encore comprendre vu le prix de l'immobilier de la capitale, mais j'ai du mal à imaginer que tu n'ais pas assez pour manger correctement. »

Tu soupires. Elle y tient vraiment à cette histoire.

« Les clients qui payent vraiment bien sont pas si nombreux dans une année. Le plus souvent je bosse pour des gens qui n'ont pas de quoi investir dans mes services et se mettent dans la merde pour le faire. Je suis en bas de l'échelle dans mon domaine, ça aide juste de ne pas avoir de scrupules.
Comme avec cet homme que tu as prévenu pour l'enquête de sa femme ?
C'était pragmatique. »

Tu hausses les épaules. Tu n'en as pas honte. Tu es sûre que la fausse vérité que tu as servie à la femme Winsdrop l'arrange bien au fond. Tu ne vas pas prétendre que tu as fait au mieux, tu t'en fiches bien, mais il y avait une forme d'hypocrisie dans sa démarche. Si tu lui avais parlé de toutes les maîtresses, sa fierté en aurait bavée et elle aurait fini par accepter pour garder son train de vie.

« T'as pas vraiment répondu à ma question.
Tu sais ce que ça fait maintenant. »

Tu lui sers un sourire faux avant de recommencer à manger. Elle ne manque vraiment pas de culot à réclamer que tu lui en dises plus sur toi quand elle filtre toutes les informations qu'elle révèle avec autant d'attention qu'un agent du MI6.

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tentative de fuite: