La réaction est exactement celle que je soupçonnais depuis l'instant où j'ai décidé de me la jouer taquin et cynique. La belle plante d'Alola réagit de plus belle, en se lamentant sur le fait qu'il n'y ait aucune couverture téléphonique dans les environs, la privant de passer quelques appels cruciaux pour alerter quelqu'un de confiance de sa condition précaire du moment. Si vous voulez mon avis, je pense qu'elle dramatise un poil trop, mais ça m'a tout l'air d'être dans sa nature. Elle doit l'un de ces archétypes féminins qui favorise l'apparence physique au détriment du personnage et du caractère qui s'y cache, faisant du superficiel et du paraitre des arguments de vente et d'influence. Non pas que je déplore ce type d'individu, au contraire, je suis partie prenant du fait qu'il faille de tout pour faire un monde, et que se ressembler c'est donner l'opportunité à l'ennui et à la mort rapide de s'installer dans nos vies quotidiennes. Mais je suis un fervent défenseur de l'idée qui veut qu'il faut un minimum d'humanité et d'humilité pour pouvoir percer aux yeux du monde comme étant une personne droite, de confiance, charismatique et vectrice d'une idéologie applicable au plus grand nombre.
Dans le cas de Poehere, tout se faisait via le concept de photographies, de vidéo réalisée sur le moment, dans une sorte de fausse spontanéité du moment, privilégiant l'instantanéité et le côté "durable" d'un cliché ou d'un fichier dématérialisé. Les vrais souvenirs et les plus belles images, si l'on omet l'importance de l'art de la peinture, de la sculpture et l'art cinématographique - dont je raffole moi-même à mes heures perdues - sont ceux que l'on se construit au fil du temps, en les vivant en direct, en les expérimentant dans la véritable fugacité du temps qui passe et qui nous échappe, et en les ressentant comme de vrais trésors de la mémoire pour un peu que nous nous arrêtions un tout petit instant pour s'abreuver de chaque détail de chaque scène ainsi vécue. Le téléphone, les caméras, les appareils photographiques, certes, sont de très beaux outils pour capturer la beauté d'un moment précis, mais malheureusement, ils en sortent eux-même de leur contexte une fois extirpé des appareils, ou diffusés au grand public.
Mais ceci sera probablement un objet de conversation future avec Poehere, qui doit maintenant accepter de faire un bout de chemin en ma compagnie. Elle tente de poser délicatement son pied soigneusement bandé sur le sol, et accepte de se servir de mes épaules et de mon corps comme d'un appui permanent pour se mouvoir à nouveau dans une normalité presque retrouvée. Certes, la cadence de marche et la physionomie de sa nouvelle démarche laissent à désirer, mais pour une fois, la demoiselle se résout à n'être qu'une simple touriste victime de ses propres erreurs de parcours. Peut-être même que pour une fois de sa courte existence, elle accepte l'aide d'un inconnu, dans le but de préserver le capital santé dont sa vie dépend. Peut-être même que pour une fois, elle n'est pas dans un schéma d'influence ou de recherche de l'audimat virtuel.
La marche est entamée depuis quelques minutes déjà, et je sens qu'il va falloir briser cet espèce de silence malaisant qui s'est installé depuis que Poehere a pris appui sur moi. Je ne sais pas réellement ce que vaudra cette future intervention de ma part, mais je suis extrêmement curieux de savoir quelle jeune femme elle est en réalité. Superficialité ou authenticité ? Soif de se prouver au monde ou recherche maladive de l'attention des autres ? A-t-elle réellement choisi la voie de l'émancipation en solitaire pour montrer toute sa jugeote et son talent de dresseuse, ou exploite-t-elle un filon sociétal qui lui permettrait de s'enrichir à moindre effort ? Il m'en faut le cœur net. Si une personne comme elle doit venir faire un tour à ma pension, il faut que je sois sûr de ma position quant à ses idéaux.
- Dites.introduis-je.Je me demandais. Votre notoriété sur les réseaux est-elle si importante au point de négliger votre sort en pleine nature ?osé-je questionner tel un journaliste engagé.Non pas que je trouve ça complètement dénué de sens, mais n'y a-t-il rien en ce monde qui vaut plus à vos yeux que le nombres de vues que vos photos ou vos vidéos, peut-être réalisées au péril de votre vie, que vous générez au jour le jour ?
793 mots
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Leonisvoudrait tenter uneRécolte !
Rôle + niveau :Mineur-Métallier-Gemmologue-Forgeron LV.3 Expérience :46/8 messages RP Action + coût :Récolte de métauxpour2 ressources Dé bonus :Oui (+1 dé "Nourriture")
Le visage déformé par une grimace, Poehere avançait tant bien que mal à travers la forêt, appuyée sur l'épaule de son sauveteur du jour. Dès les premiers pas, elle avait gémit bruyamment, râlait, serrait les dents et les poings. Puis elle se souvint du long trajet qu'elle avait fait pour arriver ici, de la petite randonnée dans les bois pour trouver un endroit parfait pour faire une photo. Elle n'avait pas de temps précis dans la tête, mais elle savait que le chemin était long. Alors, l'influenceuse se pinça les lèvres, et souffrit en silence. Après tout, elle était face à un mur: elle ne pouvait compter que sur l'aide de cet inconnu, ce qui, en soi, était déjà un grand coup de chance. Mais elle aurait préféré être héliportée vers l'hôpital le plus proche. Au moins, elle aurait fait une story qui déchire.
Et puis, être aussi proche d'un homme qu'elle venait à peine de rencontrer était un peu embarrassant. Après tout, Leonis aurait pu être n'importe qui: un psychopathe, un violeur, ou un tueur en série à qui la chance avait sourit... Là encore, le manque de réseau contraignait Poehere à faire confiance à un parfait inconnu, qui pourrait très bien lui faire du mal vu sa carrure. On l'aurait retrouvée enterrée au fond des bois après avoir fait des dizaines de battues, des marches blanches. Quelques années plus tard, un reportage sur sa lutte aurait vu le jour, et Poehere aurait été célèbre, quoi qu'il puisse lui arriver. Mais bon. Vraiment, elle aurait préféré l'hélicoptère.
- Votre notoriété sur les réseaux est-elle si importante au point de négliger votre sort en pleine nature ? Dit-il soudainement. - Pardon ? Répondit-elle en ouvrant grand les yeux.
Que voulait-il dire par là ? Que son sort était jeté ? Que son destin avait prit une tournure différente en croisant le chemin de Leonis le sauveur ? La jeune fille plissa les yeux. Etait-il en train de juger son mode de vie ? Il continua:
- ... N'y a-t-il rien en ce monde qui vaut plus à vos yeux que le nombres de vues que vos photos ou vos vidéos...
Poehere serra les dents. Elle prennait ses remarques comme de véritables attaques. Mais elle était prise au piège: elle était perdue au milieu des bois avec l'inconnu. Si elle se montrait trop piquante ou méprisante, il pourrait la laisser plantée là, avec son entorse et son téléphone hors service. Ou alors, il pouvait la rouer de coup sans que jamais personne n'entende ses appels à l'aide. Alors, elle allait devoir être plus maline.
- Généralement, prendre des photos de la plage c'est sans danger, siffla-t-elle. J'ai dû trébucher sur une racine tout à l'heure. Ça arrive même aux meilleurs.
Elle grimaça. La douleur vive de l'entorse la maintenait concentrée sur l'instant présent.
- Vous avez jamais fait une mauvaise chute vous ? Genre, dans votre élevage y'a pas des clôtures ou des bottes de pailles ou même des pokémons qui vous ont fait tomber ?
Poehere eut une vision très claire de sa tante Maria couchée par terre, riant aux éclats après avoir été chargée par un petit taurillon de Paldea qu'elle avait élevé à la main. Un souvenir très heureux. La jeune fille grimaça de nouveau. Elle sentit une perle de sueur couler le long de sa nuque.
- On... On peut faire une pause ? Demanda-t-elle à bout de souffle.
Elle avait l'impression de trainer un poids mort. Son propre corps.
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La fille des îles ne semblent pas comprendre le but, le sens ou même le motif de ma petite série de questions. Pourtant, je ne pense avoir été trop pompeux dans ma formulation, ni trop évasif dans le contenu de mes questions. Il se peut en revanche que mes intentions aient été mal interprétées, et cela lui impose de devoir réfléchir et rester dans un mutisme passager, le temps de parvenir à un semblant de réponse convenable et intelligible. De mon côté, je ne sais pas comment j'aurais pu paraitre odieux ni blessant, car je me pose véritablement toutes ces questions. Pourquoi certaines personnes dans ce monde, se sentent presque obligées à se mettre en danger, eux et leur vie, et tout ce qui peut en découler, pour des clichés toujours plus originaux, pour des bouts de courts métrages toujours plus atypiques, ou encore, pour vivre des aventures soit disant toujours plus exceptionnelles et source d'adrénaline ?
Pourquoi prendre autant de risques pour un passe-temps comme celui de prendre des photographies ? Pourquoi ce besoin de reconnaissance d'une communauté quasiment virtuelle, quitte à mettre sa vie en jeu ? Pourquoi cette envie presque maladive de devoir toujours plus se mettre en avant et prendre des décisions presque inconsidérées au regard de la santé, de l'impact social de la manœuvre, ainsi que du point de vue personnel ? Il doit y avoir tout un tas d'arguments sur lesquels je ne dois pas être au point. Il doit également y avoir tout un tas de raisons commerciales et professionnelles qui m'échappent pour un tel type de projet de carrière. Tout comme il doit y avoir un marché pour ce genre d'initiative, et ça serait à celui ou celle qui prendra le plus de risque pour percer, qui en obtiendra le plus de lauriers.
Miss Poehere me répond enfin. Tout d'abord, elle tente de noyer un peu le poisson, en mettant de côté le plus important de mes questions, et en rebondissant que sur le fait qu'une photographie de plage, prise à même le banc de sable du rivage, n'est pas une chose dangereuse en soi. Ce qui est vrai, paradoxalement parlant. Puis elle minimise une nouvelle fois l'ampleur de l'action qui l'a mise dans cet embarras : sa chute à travers la pente boisée. Elle met ça sur le compte de le faute à pas de chance, et que cela peut arriver même aux meilleurs. Aux meilleurs ? Les meilleurs photographes ? Les meilleurs peintres en paysages ? Tente-t-elle réellement de se couvrir derrière un tel argument, aussi fin et improbable que celui-ci ? Pire encore, elle me retourne la question en me sondant sur la possibilité ou non d'avoir déjà fait une mauvaise chute, dans ma vie quotidienne ou sur mon lieu de travail. Possiblement l'erreur de parcours qu'elle aura eu à faire dans sa vie à mon contact.
- Pardonnez-moi si je vous ai fait sentir un quelconque jugement dans mes questions, je ne pensais pas à mal.m'excusé-je au moment où la jeune femme demande de faire une pause, après avoir grimacé une ultime fois d'agacement vis-à-vis de sa cheville.En revanche, je peux vous assurer que cette chute n'était pas anodine. Vous auriez pu y laisser beaucoup plus de plumes que vous ne le pensez...l'avertis-je.
Je prends une pause dans mon discours, volontairement, pour lui laisser le temps d'assimiler que je suis on ne peut plus sérieux dans mon diagnostique. Tout en reprenant une partie de mes questions de tout à l'heure, je tourne sept fois ma langue dans ma bouche avant de reprendre le cours de mon oraison.
- ...pour vous dire la vérité, oui, j'ai déjà fait une mauvaise chute.confirmé-je.Moi aussi, je me sentais invincible dans mon art, le sport. J'étais comme vous, promis à une belle carrière, sous le feu des projecteurs du monde semi-professionnel. Moi aussi, je ne faisais pas forcément plus attention aux alentours ni même à ce qu'il pouvait bien m'arriver. Indestructible, insouciant, pfeuh... le pire crétin que j'ai pu être de ma vie.soupiré-je.Il aura suffit d'un saut en extension, et de la présence malencontreuse d'un proche de la famille, en pleine démonstration de mon talent, pour réduire à néant et mon genou, et ma carrière.grimacé-je subitement.Et je ne dis pas ça pour susciter votre pitié. Simplement que ce jour-là, comme là, c'était de la faute à pas de chance. Mais contrairement à vous, j'y ai perdu ma santé, ma carrière, et une bonne partie de cette vie intrépide que je pensais pouvoir mener sans avoir une seule fois froid aux yeux.conclus-je.
Encore une fois, je sens en moi la volonté d'être honnête avec cette jeune femme. Je sens que mon témoignage peut possiblement lui ouvrir les yeux sur ce qu'il faudrait réellement qu'elle fasse pour s'assurer une longévité professionnelle tout en mettant toutes les chances de son côté pour entretenir son intégrité physique et psychologique. Si elle comptait prendre en compte mon histoire ou non, il n'en dépend que d'elle et elle seule. Pour ma part, je suis même prêt à me confier sur les déboires et ma descente aux enfers des suites de ma blessure pour définitivement l'alerter sur les risques qu'elle encourt à vouloir ignorer son environnement premier au profit de son appareil photo, de son téléphone, ou de quelque outil numérique qui soit.
935 mots
Modération ― Évènement : Les Trois Dragons:
Leonisvoudrait tenter uneRécolte !
Rôle + niveau :Mineur-Métallier-Gemmologue-Forgeron LV.3 Expérience :49/8 messages RP Action + coût :Récolte de gemmespour2 ressources Dé bonus :Oui (+1 dé "Bois")
Ils s'étaient arrêtés, le temps de respirer un peu. La vache ! Pensait-elle. C'était presque stupide d'avoir mal à ce point, à cause d'une chute. Une chute quoi. La honte. Encore une fois, elle songea à son retour sur l'archipel, et à tout ce dont elle sera privée lorsqu'elle aura mit un pied sur Alola. Plus de surf, plus de plage, plus de bronzage, plus de photo. Plus rien. Des tutos maquillages, à la rigueur. Leonis s'excusa pour ses questions, visiblement, il ne pensait pas à mal. La jeune fille haussa les épaules, comme pour lui répondre silencieusement: "ça va, c'est pardonné".
- Vous auriez pu y laisser beaucoup plus de plumes que vous ne le pensez...
Soudainement, et sans que Poehere ne s'en rende vraiment compte, le regard qu'elle portait sur son sauveur avait changé, passant de potentiel psychopathe à papa poule trop protecteur.
Il y a peu de chose que la jeune fille aimait dans les contacts sociaux. En vérité, elle n'aimait presque rien: parler avec d'autres humains, constituait un effort pour elle. Aussi, lorsque Leonis lui raconta son histoire, Poehere dût faire un effort presque sur-humain pour l'écouter sans lui couper la parole, et sans montrer son profond ennui. Elle avait l'impression d'avoir dix ans devant son instituteur d'école primaire, qui lui expliquait à quel point la vie était courte et injuste, et qu'il fallait qu'elle fasse attention à elle. Elle détestait ça. Ce sentiment d'être infantilisée. Mais par dessus tout, elle se fichait éperdument de ce que lui racontait Leonis. C'était triste, certes. Mais Poehere était aussi connu pour son grand mépris envers les autres. Et ce, même si son sauveur se montrait sincèrement gentil avec elle.
- Je suis désolée pour vous, mentait-elle. Ça a dû être dur.
Hypocrite, pensait-elle pour elle même.
- Vous faisiez quoi comme sport ?
En même temps, la jeune fille posa son pied meurtri au sol. Ça lui faisait encore mal, mais un peu moins que tout à l'heure. Il était temps de reprendre la route. Poehere avait hâte de retourner à la civilisation, et de prévenir tous ses fans qu'une immense catastrophe lui était arrivé.
- On peut y aller, je vais tenir le coup, assura-t-elle.
Il le fallait. Le destin ne lui laissait pas vraiment le choix.
Quelque part, quelque chose me pousse à croire que cette Poehere n'est pas là par gaieté de cœur. Avait-elle été forcée de participer à cet évènement uniquement pour la couverture médiatique qu'elle pouvait en tirer ? N'avait-elle réellement que l'appât du gain de popularité, et éventuellement de l'argent, comme moteur de sa motivation à se retrouver ici, dans cette partie du monde, aux abords de cette ville, pour cet évènement ? Tout est vraiment très confus, tant dans ce qu'elle avance jusqu'à maintenant en termes de paroles, mais aussi dans tout le langage non-verbal qu'elle communique. On ne dirait pas comme ça, sous mes allures de grand nounours, un peu protecteur de trop, un peu trop moralisateur de temps à autres, se cache un observateur fin et un empathe plus ou moins confirmé et aguerri à ce genre d'observations et d'interprétations.
Il y a la façon dont elle réagit à mes prises de paroles. On n'est pas forcément dans de l'irrespect au sens propre du terme, mais on frôle drôlement la limite entre le je-m'en-foutisme et l'absence totale d'intérêt pour le partenaire de discussion, surtout quand celui est l'une des rares présences en action offrant son aide sans demander de reste ni de dû. On entendra de sa bouche un très maladroit gage de compassion par rapport à mon passé, mais cela parait plus forcé que sincère. On n'est pas non plus dans une forme de dégoût total des interactions entre adultes, mais on sent une très nette et très farouche envie de ne rien avoir à faire avec qui que ce soit, surtout si cela doit la faire diverger de son chemin vers la célébrité, la reconnaissance du plus grand public, et le sentiment d'appartenir à une caste sociale plus haute que celle de base. On n'est pas non plus dans l'indifférence notoire de ce que je peux lui raconter, la preuve en est qu'elle me questionne par rapport au sport que j'ai pu pratiqué étant plus jeune, mais il y a cette franche dissociation émotionnelle dans ses paroles, un certain flux dans l'articulation des mots, et une certaine intonation qui ne trompe pas : cette fille n'a pas envie plus que ça de restée coincée ici, et probablement pas envie de suivre ce festival jusqu'à son terme.
Dommage ? Probablement. Regrettable ? Seulement pour celui ou celle qui ne peut pas prendre en compte toute la symbolique de l'évènement et le caractère pédagogique du festival, véritable ouverture culturelle et idéologique sur le monde des Pokémons, un monde qui est encore bien loin d'être à notre portée, nous, pauvres humains mortels, à l'espérance de vie parfois plus courte que celle de nos comparses sur pattes. Remarquable ? Il faut bien avouer que le désintérêt total de cette jeune influenceuse à la chevelure marron pour l'évènement, au comparé de l'importance de son téléphone dernier cri, cassé et hors d'usage, est plutôt un tour de force en soi. Privilégier l'état matériel d'un outil remplaçable sur l'exaltation de l'apprentissage de l'instinct de survie en milieu naturel, certes proche d'une bourgade peuplée... cela relèverait presque de l'inconscient, ou du moins, à fortiori pour le cas de Poehere, à de l'ignorance pure.
— Je pratiquais le basketball. Je faisais partie de l'équipe des Ninj-
Je m'interromps lorsque cette dernière trahit son manque évident d'attention sur mon discours, se contentant alors de forcer son autonomie de marche. Elle veut absolument poser son pied au sol, et se débrouiller par elle-même. C'est tout à son honneur, mais il y a une limite à ne pas franchir entre la témérité et la stupidité. Soit elle n'a réellement aucune espèce de mentalisation de sa blessure et de la condition désastreuse de son articulation, soit son envie de briller sous le feu des projecteurs, des flashes d'appareils photographiques ou téléphoniques dernières générations l'emporte sur toute logique rationnelle et humaine en elle.
— Je vais être très franc avec vous.deviens-je plus sec.Soit vous vous entêtez à vouloir maintenir cette impression de femme forte, qui vit pour le respect et l'adoration de ses fans, avec une histoire à tirer des larmes du fin fond des chaumières, et je ne donne pas cher de votre cheville ; soit vous décidez enfin de vous comporter en femme mature, consciente de ses limites et de son inaptitude à pouvoir TOUT gérer TOUTE seule, et là, je peux vous garantir que vous serez remise sur pied en un rien de temps.
Elle compte jouer à qui serait le plus borné des deux ? Elle est très mal tombée. Certes, je suis un peu mélodramatique dans ma prise de parole, mais il y a un moment où il faut qu'elle se rencontre que tout ne se résume pas à un cliché somptueux. Tout n'est pas une question de surmédiatisation d'un selfie ou d'une photographie prise en pleine nature. La considération d'un fan, ça fluctue, ça s'embrase, ça se fane, mais ça ne dure jamais éternellement. Le corps humain non plus ne dure pas éternellement, alors pourquoi aller prendre des risques insensés pour plaire quelqu'un d'autre que soi-même.
Démasquée. Visiblement, Leonis était doué pour observer et analyser les autres.
Son sauveur s'apprêtait à lui raconter une autre partie de sa vie, sa carrière sportive certainement, suite à la question de Poehere. C'était d'ailleurs le but: le faire parler, avancer, arriver au bout du trajet, dire merci et ciao. Mais son entêtement pour repartir lui mît la puce à l'oreille. Leonis n'arriva même pas au bout de sa phrase, ce qui étonnement, surprit Poehere.
- Je vais être très franc avec vous, dit-il sèchement.
Etait-ce le moment où son sauveur devenait finalement un psychopathe tueur de joggeuse dans les bois ? Possible. Poehere avait parfois du mal à comprendre comment Leonis réagissait. Tantôt curieux, tantôt accusateur ou protecteur, l'homme qu'elle avait en face d'elle n'était pas facile à cerner. Et puis, de manière générale aussi, l'influenceuse n'avait pas vraiment de temps à consacrer avec l'analyse des personnalités des inconnus. Elle connaissait uniquement les réactions des stars de la télé-réalité, et cela lui suffisait amplement pour anticiper ses nouvelles rencontres. Mais avec Leonis, c'était différent.
Elle avait la sensation d'être littéralement incendiée de remontrance. Jamais, de sa vie entière, quelqu'un lui avait parlé de la sorte. Pas même ses propres parents. Certainement pas ses parents. Il employait des phrases et des mots qu'elle avait du mal à comprendre, comme "tirer des larmes du fond des chaumières" qu'elle pensait être une expression en voie de disparition tellement elle était vieille. Il ne voulait toujours pas l'assassiner, c'était un bon point. Mais il lui posa un ultimatum.
Soit être une gamine et souffrir, soit être adulte chiante et ne plus avoir mal. Enfin, quelque chose comme ça.
Poehere ouvrit des yeux ronds, et croisa les bras sur sa poitrine, prête à répondre à l'attaque. Car oui, se faire ainsi remonter les bretelles, l'influenceuse voyait ça comme une attaque, un défi. Son sauveur pensait lui faire un déclic en posant son ultimatum, mais il allait récolter une Poehere plus peste que jamais.
- Genre vous êtes en train de dire que je ne vis que pour mes fans ? Vous êtes sérieux ? C'est grâce à eux et à ma popularité si je peux me permettre de voyager jusqu'à Sinnoh pour tourner un vlog sur les légendes des dragons. J'aurais aussi bien pu aller me prélasser aux sources chaudes de Frimapic et prendre des photos de la neige, mais ça aurait eu aucun intérêt pour mes fans.
Avec du recul, c'était peut être bien ce qu'elle aurait du faire à la place du festival...
- Avec mon amie Olele, on loge au couvent et on vit avec les sœurs pour vivre cette expérience à fond. Elle est dans le groupe du dragon Diatila, enfin, le dragon bleu quoi, et moi, dans celui du rose, Padilka.
L'influenceuse ne mentait pas. Mais elle ne disait pas toute la vérité non plus... Dans cette situation, Leonis était-il obligé de savoir que ce logement avait été imposé par leurs parents respectifs, afin d'être rassurés ? Certainement pas.
- Alors, ouais, je fais des photos, et c'est bête, je suis tombée, OK. Mais je vois pas en quoi ça fait de moi quelqu'un d'immature en faite. Parce que j'ai vite envie de me faire soigner ? My god ! Vous auriez pas fait pareil à ma place ? Je suis pas chez moi ici, je sais même pas si mon assurance va prendre en charge les frais médicaux. Et j'ai même pas de réseau pour prévenir ma pote, mes parents.
Et mes fans.
- Et non, je peux pas gérer tout toute seule, et c'est bien pour ça qu'il faut que je sois le plus indépendante possible, pour réussir ma vie sans dépendre tout le temps de quelqu'un. C'est la base genre. Même si, aujourd'hui, je suis assez reconnaissante que vous soyez là pour m'aider.
Ca lui arrachait la bouche de dire ces derniers mots, mais il le fallait. Déjà, parce que c'était vrai, et puis surtout pour que Leonis ne la lâche pas avant la fin du trajet. Elle avait toujours besoin de lui et si elle se montrait trop ingrate, il risquait de partir et de la laisser en plan, là. Elle mettait de l'eau dans son vin, comme on dit.
- Et en plus, j'ai méga mal, souligna-t-elle parce que quand même, elle restait une princesse souffrante.