Cette mission se révèle bien plus coriace que prévu. À la base, il ne devait s’agir que d’aller récupérer des Pokémon d’élevage qui s’étaient égarés dans la forêt, en dehors de la zone délimitée par la pension de l’éleveuse en question. Évidemment, en arrivant sur place, Seoyong et moi nous apercevons que l’éleveuse est complètement paniquée et n’est même pas capable de nous dire exactement quels Pokémon nous devrions rechercher, donc ça complique les choses. « Je ne comprends pas, la barrière a été entièrement réparée là où il y avait des faiblesses. » Et elle se remet à pleurer, inconsolable. Dans le lot des Pokémon échappés, si nous comprenons bien, il y a des pensionnaires, ce qui la met dans tous ses états en imaginant avoir perdu — voire pire — des Pokémon appartenant à ses clients. Autant dire qu’après un tel événement, elle n’aurait sans doute plus beaucoup de clientèle qui lui ferait confiance, c’est sûr. Mais il y aurait également certains de ses propres Pokémon. « Oh, mon pauvre Polarhume, il doit être terrifié ! » J’acquiesce, mais uniquement intérieurement, d’autant que ce n’est pas vraiment le climat idéal pour un Pokémon de type glace s’étant perdu et n’ayant jamais vraiment vécu dans la nature puisqu’il est apparemment né à la pension. « Vous pouvez nous conduire à l’endroit de la brèche dans la barrière ? » Elle met un temps à sécher ses larmes et à se lever, mais ensuite, elle nous y conduit. « Il y a un autre trou un peu plus loin. » Elle désigne une autre partie de la barrière du doigt, à quelques mètres. C’est un grillage tout à fait normal, mais fait pour empêcher les Pokémon — les petits évidemment, pas les grosse brutes, ou ceux qui creusent ou ceux qui volent, cela va de soi — mais elle aurait dû faire le job, donc c’est étrange que les pensionnaires aient pu s’échapper. D’autant qu’elle nous a assuré plusieurs fois qu’elle ne gère que des petits Pokémon qui ne sont pas susceptibles de causer autant de dégâts. « Vous êtes sûre qu’il n’y avait pas un Pokémon de type acier ou roche peut-être qui soit capable de manger une partie du grillage par exemple ? » Je vois les larmes qui commencent à remonter et me prépare, mais elle garde sa contenance tout en se creusant la tête et finit par la secouer. « Non, vraiment, rien de tout cela. » Et elle retrouve assez de calme pour commencer à dresser une liste plus exhaustive des disparus. (425 mots)

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L’éleveuse étant repartie dans son habitation qui lui sert aussi de lieu de travail pour vérifier ses registres, l’état des autres pensionnaires qu’elle a dû faire rentrer en catastrophe pour éviter qu’ils s’enfuient elle aussi, et sans doute pour pleurer encore un peu et peut-être trouver du réconfort auprès de ses proches, nous pouvons discuter plus librement avec Seoyong. « Regarde ça. » Ma collègue tient une partie du grillage qui a été ouvert et par où les Pokémon sont sans doute passés. Elle désigne une partie spécifique du doigt. Je crois voir où elle veut en venir. « C’est coupé net. » Seoyong acquiesce d’un signe de tête et continue à inspecter le grillage. « Vu la liste qu’elle nous a donnée pour l’instant, je doute que ce soit l’œuvre d’un des Pokémon en question. Sauf si elle a oublié un Scalpion ou un autre Pokémon avec une partie du corps super aiguisée et capable de trancher nettement le grillage sur une telle longueur qui plus est. » Il est vrai que l’endroit où nous sommes est une vraie bouche béante dans le grillage. Même un Scalpion aurait bien du mal à faire un tel arc de cercle avec ses petits membres, en vérité. « Tu penses que quelqu’un d’extérieur a fait ça ? » Après en avoir discuté un peu plus, nous décidons d’informer le commissariat du coin de ce que nous pensons, afin qu’ils dépêchent au moins un agent de police sur place pour nous aider. De cette façon, nous nous concentrerons sur le sauvetage des Pokémon s’ils sont effectivement perdus dans la nature, et l’agent ou les agents pourront s’occuper des criminels si nous avons raison et qu’il y a eu intervention extérieure. En soi, nous pourrions nous en charger aussi, car nous faisons parfois face à des braconniers. Néanmoins, c’est toujours mieux de laisser les autorités compétentes s’occuper de ce genre de choses, a fortiori parce qu’ils peuvent directement les arrêter et les appréhender pour les ramener au poste de police, ce qui n’est pas notre cas puisque même si nous arrêtions quelqu’un, nous devrions attendre les agents pour qu’ils s’occupent de la suite. « On y va du coup ? » Seoyong commence déjà à passer par l’ouverture dans le grillage. « C’est parti. » Je me contorsionne également pour pouvoir passer, et nous voilà de l’autre côté de la grille. Etant donné qu’il fait quasiment nuit, mon amie sort des lampes torche et m’en tend une et, à peine allumées, elles nous permettent de balayer les alentours et de découvrir quelques traces de pas ici et là. Plus qu’à les suivre. (437 mots)

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Nous ne suivons pas les traces très longtemps avant que quelque chose ne cloche. C’est simplement une sensation au départ. Celle d’être observés. « J’ai la nuque qui picote. » C’est toujours comme ça que Seoyong nous dit qu’elle se sent observée. Et effectivement, ma nuque picote aussi. On se retourne, plusieurs fois, balayant nos faisceaux lumineux autour de nous, mais rien. Juste des ombres et des ombres et encore des ombres qui nous font parfois croire qu’il y a quelque chose, mais non. « Peut-être un spectre invisible ? » Seoyong hausse les épaules. C’est une possibilité. Nous avançons encore un peu à tel point que le grillage n’est plus visible derrière nous car la forêt se densifie, et nous perdons un peu la trace des pattes ici et là à cause du sol recouvert de feuilles et de mousse et de tout un tas de choses. On n’entend plus les agents de police non plus qui discutaient avec l’éleveuse il n’y a pas si longtemps. Et en avançant encore un peu plus, nous nous rendons compte qu’il n’y a juste pas de bruit aux alentours. « C’est super bizarre. C’est ce qui arrive avant des grosses catastrophes type séisme ou tsunami. Mais naturels. Et à ma connaissance, on est dans aucun de ces deux cas de figure. » Effectivement, ce n’est pas une zone sismique naturelle, et nous sommes bien loin des côtes. Une tornade, peut-être, je sais qu’elles arrivent parfois dans cette région du Pokémon, mais il n’y a eu aucune alerte et en plus, aucune petite brise. « Un prédateur ? » Nos regards se croisent et c’est ce qui nous semble le plus plausible sur le moment. Qui dit prédateur intimidant la faune alentours et la réduisant au silence dit grand prédateur très dangereux. Je décide donc de faire sortir Duras de sa pokéball. Clio aurait pu se joindre à nous, habile dans les arbres, mais sa présence est moins intimidante que celle de la Démolosse. Quant à Waneta, elle s’est beaucoup entraînée avec Sigrid ce matin, donc elle a besoin d’un peu de repos. Et pour les autres, une forêt dense n’est pas le bon environnement pour se déplacer aisément. De son côté, Seoyong fait appel à son fidèle Zéblitz, et c’est ainsi que nous continuons à avancer dans cette forêt sombre, alors que je crois voir un flash rose passer entre les arbres à ma gauche. Je me retourne rapidement, mais rien. Duras aussi. Elle grogne, observe, mais retourne finalement son attention droit devant. (421 mots)

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Le flair de la Démolosse nous permet de continuer en direction des Pokémon disparus car elle trouve la trace d’au moins l’un d’eux à un moment donné. « C’est bien ma belle, on compte sur toi. » Toujours aucun bruit, toujours à progresser à l’aide de nos lampes torches. La forêt est si dense que cela fait bien longtemps que les derniers rayons du soleil ne sont plus visibles. Quant à ceux de la lune, ils filtrent très légèrement à certains endroits, mais globalement nous sommes dans le noir complet. « J’aime vraiment pas ça. Pour un petit sauvetage lambda, je m’attendais pas à me retrouver en pleine forêt la nuit avec un super prédateur qui rôde mais qui ne s’est toujours pas fait connaître. » Je ne peux qu’être d’accord avec ma collègue et j’appréhende de découvrir le dit prédateur. Honnêtement, vu la situation, ça ne peut qu’être ça. Mais quel serait le lien avec le grillage ouvert de force ? À moins que le prédateur en question appartienne à un dresseur slash voleur qui a ouvert le grillage ? Mais à ce compte là, pourquoi laisser les Pokémon qui s’échappent déambuler sans les capturer ? « Tu penses que ça pourrait être une espèce d’activiste qui proteste contre l’élevage ? » Du genre, les Pokémon devraient être libres, et donc il les aurait laissés partir, ou quelque chose dans ce goût-là. Franchement, les pistes que nous avons… Aucune n’est la plus plausible du lot. Autant dire qu’on navigue à l’aveugle. « J’imagine que c’est possible oui. Est-ce que ça pourrait être une coïncidence ? Quelqu’un qui fait s’échapper les Pokémon, mais sans rapport avec le prédateur qui intimide tout le monde ? » Plus nous avançons, plus je doute du côté prédateur parce que si tel était le cas, nous serions des proies faciles et un Pokémon si menaçant qu’il réduirait une forêt entière au silence serait sans doute également plutôt territorial.

« Oh ! Là, devant ! » Duras grogne en même temps que le Zéblitz émet un bruit et qu’une clairière se dessine, nos faisceaux n’éclairant pas assez pour vraiment distinguer quelque chose. Mais en nous approchant, nous découvrons les petits corps des Pokémon disparus et sur l’instant, je redoute le pire, car ils sont tous allongés au sol au même endroit quasiment, presque à la manière d’un rituel. Un frisson me parcourt et Seoyong et moi avons un moment de recul. Cependant, pas le temps de tergiverser davantage, car de la brume s’approche de nous, tout autour, nous encerclant. « De la brume… rose ? » (424 mots)

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Je remarque cette brume rose qui voyage lentement vers nous alors même que je suis encore un peu sous le choc de la découverte des Pokémon disparus. La bonne nouvelle tout de même, c’est qu’ils sont sains et saufs, Seoyong et moi nous étant baissés pour vérifier, quand bien même nous n’avions pas vu de signe de traumatisme ou pire, du sang. Ils semblent simplement dans le coma, ou du moins endormis, dans un lieu pour le moins étrange. Ont-ils été amadoués pour venir ici pour un rituel justement ? « Mais d’où ça vient ? » Les volutes brumeuses viennent d’un peu partout en réalité, et c’est ça qui prend le pas sur nos réflexions sur la santé des Pokémon disparus. Car cette brume n’a rien de naturel, ça c’est certain, et qui sait quel danger elle pourrait représenter pour les Pokémon sans défense. Immédiatement, Duras scrute les arbres à la frontière de la clairière, et continue de grogner. Le Zéblitz, lui, s’agite sur ses sabots, prêt à foncer s’il le faut. Nous pourrons sans doute compter sur sa vitesse pour intercepter un adversaire s’il venait à s’en présenter un. « Comment tu veux qu’on les rapatrie ? Il faut qu’on les protège de cette brume au cas où en tout cas. » Puisque nous sommes dans une clairière, il n’y a plus les mêmes contraintes pour les déplacements de nos Pokémon et Seoyong et moi semblons avoir le déclic au même moment car elle se tourne vers moi et claque des doigts en désignant les pokéballs à ma ceinture, au moment où je pose la main dessus. « Dezba, Jaïa, dispersez cette brume. » À elles deux, je n’ai pas de toute qu’elles parviendront à écarter ce potentiel danger. Je me demande bien de quoi il pourrait s’agir. Une attaque brume capiteuse, ou quelque chose du genre ? J’ai beau connaître certaines choses sur les Pokémon et le Pokémonde en général par la force des choses étant ranger, je suis loin d’être un scientifique, donc beaucoup de choses m’échappent et je suis bien incapable d’identifier la brume en question.

Les puissants battements d’ailes de la dragonne et de l’oiselle parviennent à repousser la brume, mais pas vraiment à la dissiper, c’est un phénomène très étrange. Celle-ci se rétracte et s’érige un peu comme un mur, avant de retomber et de revenir de plus belle, comme s’il s’agissait d’une sorte de substance compacte qu’il était bien impossible de complètement éliminer. (409 mots)

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« Mais qu’est-ce que c’est que ce truc ? » La brume nous encercle presque. Nous avons une ouverture derrière nous, de là où nous venons, donc la priorité, c’est de rapatrier les Pokémon disparus et de garder cette brume loin de nous. « Je sais pas, mais j’ai pas très envie de m’éterniser et de finir comme dans The Mist. » Je tourne un regard interrogateur, les sourcils froncés, vers Seoyong. Il s’agit visiblement d’une référence que je n’ai pas. Elle secoue la tête devant mon air confus et me fait un signe de la main. « Un film. On regardera ça plus tard, quand on sera pas potentiellement sur le point d’être engloutis par cette brume. » Rapidement, nous mettons les petits Pokémon sur le dos du Zéblitz de Seoyong et sur Duras. Et les deux Pokémon commencent à faire marche arrière pour retourner à l’élevage. Pour s’éclairer, le Zéblitz produit des étincelles à intervalles réguliers avec un incroyable contrôle, tandis que Duras conjurent des feux follets qui éclairent le chemin. Quant à Dezba et Jaïa, elles continuent sans relâche, mais vainement, à tenter de dissiper la brume. Pourtant, il s’agit même là d’une capacité spécifique qu’elles deux connaissent, capables de momentanément dissiper même les plus épais brouillards pour nous permettre d’avancer, notamment en altitude. Mais là, rien n’y fait, cette brume revient sans arrêt, et semble de plus en plus étendue. « Il y a quelque chose qui continue à en produire, c’est pas possible autrement. » Je cherche et je cherche encore dans mon cerveau, le moindre petit bout d’information qui pourrait nous donner une piste sur quoi nous avons à faire. « Des Pokémon ? Le prédateur ? » En même temps que je le dis, je reste dubitatif, et ma collègue secoue la tête. « Ce serait bizarre comme façon de faire. Si c’est le cas, il ne nous attaque pas du tout. » Mais une idée me vient. « Ou alors, ce n’est pas un prédateur comme on l’entend. Pas un Tyranocif ou autre. Un prédateur qui n’est pas dans l’intimidation, mais qui travaille dans l’ombre. »

Et c’est là que le déclic vient. Je revois ce flash de couleur rose dans ma vision périphérique de tout à l’heure, je le connecte à cette brume rose elle aussi, et je réalise que nous avons été suivis tout ce temps par le ou les coupables, responsables du coma dans lequel les petits Pokémon de l’éleveuse ont été plongés. « Mushana. » Seoyong tourne vivement la tête vers moi, les yeux écarquillés, et nous réalisons à ce moment-là que c’est effectivement le cas quand non pas un, mais quatre individus sortent du couvert des arbres. (449 mots)

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Ce n’est absolument pas une bonne nouvelle. Ces Pokémon ne sont pas des prédateurs à proprement parler, et ils ne sont pas non plus agressifs, du moins pas que je sache, mais ils restent extrêmement dangereux et surtout très puissants. La fameuse brume rose qu’ils produisent, est appelée la brume des rêves par de nombreux scientifiques, et je crois bien qu’elle est même utilisée comme une sorte d’anesthésiant. Sans oublier que certains sont littéralement addicts à cette drogue qui leur permet de s’échapper vers un autre monde, j’imagine. « Tu penses qu’ils sont contrôlés par un dresseur ? » Alors là, c’est la question à cent mille pokédollars. Je ne comprends pas l’utilité de tout ce cirque. Les Mushana n’ont pas pu couper le grillage, ça, c’est à peu près sûr. Mais pourquoi font-ils ça, c’est inconcevable. Quelque chose doit forcément les y pousser. « Aucune idée, mais il ne faut pas qu’on traîne. » Le problème, c’est que je ne peux pas laisser Dezba et Jaïa ici pour nous gagner du temps, car elles pourraient être hypnotisées à tout moment, ou bien respirer la brume des rêves et tomber dans le coma elles aussi, même si j’imagine qu’elles seraient plus résistantes que les petits Pokémon que nous avons sauvés. Pas de question à se poser, j’imagine. Nous allons devoir déguerpir en prenant nos jambes à notre cou. « Pas le choix, on va devoir courir jusqu’à la pension. Ils sont plutôt lents normalement, ça devrait le faire. » Seoyong et moi nous regardons résolument, mais nous sommes tout de même un peu inquiets par cette situation totalement imprévue. Je demande à mes deux Pokémon de battre une dernière fois des ailes pour repousser la brume un maximum, puis je les rappelle dans leurs pokéballs et ma collègue et moi faisons volte face pour nous échapper de là.

« Ah, bouche-toi le nez ! » Nous n’avons pas le temps de faire trois pas que nous nous arrêtons net car un cinquième Mushana nous barre la route, étant parvenu à faire le tour à un moment ou un autre pour se retrouver derrière nous et nous menacer de sa brume qui l’entoure et qui progresse vers nous. Et le problème, c’est que je n’ai pas le temps de prendre une profonde inspiration avant qu’un peu de brume s’immisce dans mes narines, et dès les premières volutes respirées, je me sens déjà partir, mon corps devenant tout raplapla. Je me sens expirer lentement puis reprendre une bouffée de brume alors que je tombe à genoux, et avant que ma vision se trouble, je vois Seoyong tomber à mes côtés. Puis le noir complet. (442 mots)

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C’est drôle, d’habitude, lorsque je m’endors puis me réveille, c’est comme si quelques secondes seulement s’étaient écoulées. Un sommeil en un clin d’œil, pour ainsi dire. Cette fois-ci, après avoir inhalé la brume des Mushana qui nous ont encerclés, je me retrouve comme suspendu dans le vide, en apesanteur, sans aucune sensation, ni aucun sens, pour tout dire, pendant une infinité de secondes, minutes, heures, peut-être. Je n’entends rien, je ne vois rien, je ne sens rien… Je ne suis même pas conscient de mon corps, simplement de moi-même. Une âme qui flotte, quelque part, sans savoir où elle est, ni ce qui l’entoure. Sans rien savoir, si ce n’est sa propre existence.

Lorsque mes sens reviennent, c’est le goût de fer dans ma bouche en premier lieu, signe d’un saignement quelconque. Peut-être me suis-je mordu la langue en tombant après avoir succombé au terrible pouvoir de la brume. Puis vient le toucher. Quelque chose de plutôt doux sous ma main gauche, je crois. Lisse sous mon visage, il me semble, mais sous ma main droite que j’essaie de bouger péniblement, une surface irrégulière, tantôt douce, tantôt rugueuse. Désagréable, ça c’est sûr. Bientôt, l’ouïe me revient et j’entends un roulement régulier qui me semble familier mais que je n’arrive pas à replacer, ainsi que le bruit du vent que je sens en même temps sur mon visage et dans mes cheveux. Quelques secondes plus tard, à mesure que mon oreille s’affine, je crois percevoir des bruits de Pokémon, lointains. L’odorat met plus de temps à bien se reconnecter, trop influencé par le goût métallique dans ma bouche. Cependant, une fois que j’arrive à déglutir avec peine, le goût prononcé du fer s’estompe légèrement, et mon nez semble fonctionner à nouveau, captant les premières odeurs qui m’entourent, et m’indiquant ce que mon cerveau n’avait pas réussi à identifier avec mes autres sens jusque là. Du sel. Les embruns de l’océan. Ce que j’entendais, ce roulement régulier, c’est celui des vagues que j’imagine dorénavant se fracasser sur des rochers quelque part sur ma droite, beaucoup plus loin, mais bruyamment. Et le flux et reflux sur le sable. Sable qui se trouve donc sous ma joue et sous ma main droite. Mais sous ma gauche, il me semble qu’il s’agit d’autre chose, de l’herbe ? Il faudrait que je puisse bouger davantage mais mon corps a du mal à répondre. Un dernier effort, et j’ouvre enfin les yeux. (409 mots)

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