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Abigail Wickwood

Abigail Wickwood
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C-GEAR
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Mer 1 Nov 2023 - 21:42
Jour 1 : Cocooning

On dit souvent qu’en étant aux portes de la mort que le film du passé nous revient en mémoire. Alors pourquoi les mauvais souvenirs reviennent m’emmerder alors que je n’aspire qu’à la quiétude ? Que le monde meurt, laissez-moi flotter et errer dans mon monde intérieur… Laissez-moi donc une dernière fois converser avec mon enfant intérieur, dans mon refuge intérieur, sans amis ni famille. Seul avec moi-même,.

Que je le tue pour de bon. Et surtout qu’on me foute la paix.

Je le voyais, sans le voir. Une ombre informe qui semblait me fixer du regard alors que j’étais mis face à lui, sur le canapé d’en face. Nous nous regardions comme des chiens de faïence, sans avoir quoi que ce soit à se dire. Je n’avais rien à lui dire et sa présence dans cette zone fantasmagorique de mon esprit n’était uniquement dû qu’au fait qu’il était autant moi que moi j’étais lui. Comme les deux pièces d’une même face, nous n’étions que le reflet infâme de l’autre, sans aucune possibilité de se comprendre, de s’apprécier. Pourtant, nous partagions le thé, le même que faisait notre père quand nous étions malades. Une odeur d’agrumes et de verveine flottait dans l’atmosphère feutré de notre délire commun et, dans un parallélisme impeccable, il s’enfonça en même temps que moi dans les coussins moelleux, pensif.

J’ai décidé depuis longtemps de mettre fin à mes jours mais je n’en ai jamais eu le courage quand je me suis retrouvé face au mur. Il est ironique de constater que ses sœurs comme sa mère ne se sont pas rendu compte de grand chose, chacune accaparée par la vie et ce qu’elle a de plus médiocre à offrir : des possessions terrestres, sans émotions ni âmes. D’ailleurs, cette représentation simpliste de ce qu’est pour moi le cocooning n’avait pour autant rien de très élaboré, puisque je ne me basais que sur mes souvenirs. Des souvenirs heureux. Ma deuxième peau a beau être constituée de pathos (la faute à pas de chance), je ne voulais pas me définir comme une victime, les écrivains savent rendre la dépression profonde bien plus jolie que moi je ne pourrais le décrire. J’étais simplement malade, et il n’y avait là rien de dramatique, si ce n’est que j’avais l’impression de jouer avec ma vie tous les jours comme pour ne donner l’impression d’être vivant.

Une lumière tamisée chassa petit à petit la blancheur initiale du lieu et le face à face avait de moins en moins l’air de ressembler à un interrogatoire. Le fil de mes souvenirs m’amenait à repenser à d’anciennes scènes, que je croyais perdues dans les limbes de ma mémoire. On venait prendre une boisson chaude lors des soirées d’hiver dans cette pièce, avec chacun sa petite tasse de chocolat chaud et le plaid qui nous entortillait le corps. Je devenais un cocon de laine, et je me roulais dans ce canapé à lire des histoires merveilleuses et rocambolesques, habité par la brume entêtante des songes lunaires qui rendaient mon univers extraordinairement lumineux. Mon Papa, bien que très pris par son travail, avait toujours trouvé le temps pour moi pour me lire des histoires et, quand je devenais plus grand, j’aimais simplement être dans la même pièce que lui : il travaillait sur des comptes et moi je lisais des histoires de plus en plus complexes, les pieds contre mon corps dans une posture d’enfant prêt à naître. Je crois que, déjà, j’avais à cette époque une fragilité en moi et qu’elle n’a fait que s’agrandir avec le temps. Mais là, du plus loin que je me souvienne, toutes ces périodes étaient plutôt bénies, ces petits moments lectures comme suspendus dans le temps et dans l’espace. Il pouvait faire un temps exécrable à en faire pleurer le soleil que j’avais l’impression de rentrer dans un autre univers et que je pouvais être n’importe qui et capable de tout. Maintenant, je ne suis que l’ombre de moi même et j’ai beau lutter contre ces pensées tentatrices, mes chimères malveillantes ne m’apportent que l’écho d’un réconfort factice, sans âme.

Nous sommes face à face, notre tasse de thé à la main. Ce lieu était notre point de départ de toutes nos aventures, pour autant cet être indésirable qui siégeait en face de lui et qui buvait le même breuvage de mes souvenirs était un intrus, une sorte de monstre en lui à exterminer et qui permettait d’avoir un happy end. J’ai appris à le connaître. Pire, j’ai appris à vivre avec et maintenant, je ne sais plus comment m’en débarrasser. Il s’immisce même dans mes songes et il arrive à rendre ce canapé moelleux dur comme de la pierre, il arrive à transformer cet odeur bienheureuse en pestilence et le chocolat de mes souvenirs devenait cendre dans ma bouche.

C’est alors que je remarquais que ma vision devenait monochrome. Et l’intrus, bien installé devant moi, reposa sa tasse encore fumante et essaya de s’emparer de moi en fondant sur ma gorge.

(834 mots)



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Abigail Wickwood

Abigail Wickwood
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Jeu 2 Nov 2023 - 21:39
Jour 2 : De toutes les couleurs

Il était l’ogre de ma vitalité, le pourfendeur de ce qui aurait pu être une beauté colorée sans fard ni artifice, un beau sans forcément se prendre pour le Beau. La vérité était plus perverse. Il se délectait de la couleur d’un garçon qui n’aspirait qu’à vivre comme tous les autres, et cette chose affreuse n’existait que pour se nourrir de cette force vitale, dans une oeuvre vicieuse où sa seule teinte monochrome se confondait en un acide caustique puant et douloureux.

La couleur a toujours été présente dans ma vie, comme un leitmotiv, une lueur, un guide à suivre. Après tout la vie était aussi riche et complexe qu’un kaléidoscope qui diffracte la lumière en éclats tantôt turquoise, tantôt irisé, mais dont les nuances et les singularités s’apprécient. Moi je n’apprécie plus tout cela, je ne vois plus que la face sombre et grisée de ce qui était autrefois un univers mystérieux et aventurier. Mon cœur s’était marié sans mon consentement avec l’insolente assurance que représente mon courage et mon obstination écarlate. A quel moment ais-je considéré que le métal entourant mon organe de vie était plus rassurant que les teintes vermeilles des champs infinis de coquelicots ? A quel moment me suis-je dit que le noir et la solitude d’une cage à oiseaux était plus reposant que le spectacle ébouriffant du printemps ?

Mes défenses étaient ce qu’elles pouvaient et dans ma lutte sauvage, et puisque je ne pouvais pas en parler, j’ai trouvé une parade terrible : la dissociation. Pour survivre. Pour tenter de faire ce que ma famille savait faire le mieux : paraître.

Je n’étais pas sans défense non plus. J’avais un pinceau entre les mains. Le pinceau ne pouvait pas entrouvrir cette cage dans laquelle je me suis enfermé, et l’ouvrage n’était pas si efficace que parfois, quand la crise de la dépression était trop forte, l’ouvrage menaçait d’être englouti. Le pinceau n’avait que le pouvoir, simple mais sublime, de parer à cette noirceur rampante qui transformait la vie en cendres et de transformer l’immaculé en réceptacle de rêves. Il est ridicule de penser qu’un ustensile de dessin soit, dans mon esprit d’enfant, de la même fracture que la plus solide et magique des épées de chevalier. Pourtant, si quelqu’un avait eu à l’époque la curiosité de regarder mon carnet de dessins, il aurait vu dans l’intégralité de mes dessins des vagues de couleurs tenter d'engloutir ce monstre vorace qui adorait se délecter de ma naïveté, de la profondeur des nuances de la vie pour en laisser que des ersatz qui continuaient de me tirer vers l’avant, toujours plus abattu alors que j’étais épuisé. ll prenait plus de place dans cette feuille blanche et illustrait mon désespoir face à cet ennemi implacable et omnipotent.

Mon refuge intérieur aurait du être un ciel aux couleurs en constante évolution, dans une chaude soirée d’été éternelle, avec cet arbre grand et majestueux contre lequel j’aimais me poser pour m’échapper dans l’arc-en-ciel des histoires enchantées d’auteurs fantasques dans le jardin de mes parents, loin de toute cette lourdeur de la vie dans laquelle j’étais prédestiné à plonger. L’arbre me protégeait du monstre absorbeur de couleurs, mais ce barbare rognait petit à petit sur le reste de mon univers. Les étoiles ne chantaient plus leurs symphonies lumineuses, les fleurs sombraient dans une mélancolie grisonnante sans saveur, le ciel s’obscurcissait et mon jardin d’éden aux mille couleurs n’avait plus que l’aspect d’un champ de bataille où ne subsiste que la couleur cendre de la destruction qui avait eu lieu ici.

Ca aurait pu être déjà la fin, lors de cette première tentative d’attenter à ma vie. J’avais sept ans et je voulais déjà disparaître. Et dans le bourdonnement invasif qui me donnait l’impression de plonger en eaux troubles d’un noir total, c’est le bruit d’une horloge qui me tira des portes de la mort.

(650 mots)



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Abigail Wickwood

Abigail Wickwood
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Ven 3 Nov 2023 - 23:47
Jour 3 : Horloge

L’ombre malveillante s'évapore et l’image d’une grande horloge s’imposa devant moi. J’ai toujours été intimidé par sa grandeur quand j’étais petit et comme je ne savais pas comment cela fonctionnait, j’imaginais des petits pokémons en forme de rouage ou des lutins de mes contes fantastiques passer son temps à surveiller que la mécanique ne s'enraye pas. Je connaissais cette mélodie par coeur, tout comme le tic tac en rythme que ce colosse de bois faisait émaner de son ventripotent coffre où se cachait la pendule principale. C’était un ancien modèle qui, il me semble, était au moins aussi ancien que l’était la maison, datant de l’époque de son aïeul, Jean Wickwood. Fait du bois d’acajou, importé des arbres d’Ecorcia et parmi la meilleure qualité qui soit, elle était à quelque part ce qui a été la première acquisition de la dynastie Wickwood - un cadeau de mariage à sa femme et qui scella le destin tragique de toute notre lignée, y compris la mienne.

Je dois avouer qu’elle avait quelque chose de particulièrement réconfortant, un peu comme un phare dans une tempête. Les Wickwood n’avaient jamais le temps pour quoi que ce soit : ma maman était toujours partie par monts et par vaux à plusieurs sauteries et vernissages, tentant par là de devenir une artiste qu’elle n’a jamais été et mon père continuait de redresser les torts de la Wickwood compagnie causés par son ainé, Mike Van der Blook. Pour un enfant, tout ceci était assez compliqué à comprendre, et il n’était pas évident d’exprimer un manque d’attention quand, dans la frénésie de la vie de ses parents, il n’y avait guère de place pour seulement se sustenter et se reposer. L’horloge, elle au moins, je la voyais tous les jours et son tic tac réglé comme un métronome, arriva à me faire rappeler qu’elle au moins veillait sur moi et m’en indiquait le temps. Tonton Henri était certainement le seul qui venait passer du temps avec moi, et parfois Layna venait - mais elle m’a toujours pris pour un moins que rien et j’imagine qu’avec le temps, j’ai fini par croire que j’étais vraiment qu’une charge pour la famille, n’aimant pas les études sinon dessiner et rêver.

En vrai, je ne sais plus vraiment pour quelle raison, mais la fois où j’ai failli perdre la vie (ce n’étais pas une TS mais, à bien y repenser, c’était certainement le déclencheur de tout), je devais avoir cinq ans à tout casser. A cet âge, j’absorbais tout ce qui se passait autour de moi et… Oui... Je me rappelle de ce que j’avais vu dans cette chambre. Bien évidemment, je n’avais pas compris ce qui se passait. Mais c’était stupéfiant à la vitesse à laquelle je sentais qu’il y avait quelque chose de pas normal, alors que je ne savais pas détruire ce que j’avais vu et encore moins mettre des mots dessus. Lorsqu’il m’avait vu dans l’entrebaillement de la porte, je me rappelle que la peur avait supplanté tout le reste et que je m’étais mis à courir à toute jambes jusque dans le salon où je m’étais caché dans le coffre de l’horloge. Et il m’avait suivi. Seul dans le noir total, le coeur battant, je faisais en sorte de me faire le plus discret aussi. Il retournait les coussins du canapé (là où j’ai bu avec mon alter ego le thé de mon père), une nervosité anormale s’échappait de lui. J’étais paralysé, incapable de quoi que ce soit. Il inspectait les différents meubles, il cherchait à me trouver et à … Quoi ? Pourquoi n’aurais-je pas du voir ce que j’ai vu ? Qu’y avait-il de mal à voir un adulte tout nu en plein après-midi ? Il avait simplement oublié de mettre son pyjama non ?

Dans ma terreur, j’avais complètement oublié de respirer. Je ne faisais qu’un avec le silence de la pendule. Tout ce que je voulais c’était qu’il parte, mais il était encore là. J’en avais les larmes aux yeux et lorsque finalement il mit sa main sur la poignée de l’horloge, cette dernière sembla, dans un ultime élan protecteur, de vociférer les trois heures de l’après-midi qu’il était. J’eu beau essayer de crier, mais il s’était jeté sur moi, la main moite contre ma gorge.

Je suis incapable de vous raconter ce qui s’était passé ensuite. Mais c’est depuis ce moment que j’ai commencé à me sentir mal, à me battre contre quelque chose qui me ronge de l’intérieur. Et quand je me trouve dans un état proche d'une panique, je sens encore cette main brûlante et poisseuse qui se serre autour de mon cou et qui m'empêche de respirer normalement.

(779 mots)



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