Recroquevillé sous mes pokémons, j’ai dégagé mon poignet pour m’accrocher au bracelet d’Aram. Comme si un bout de cuir gravé pouvait vraiment me protéger de quoi que ce soit. Mais à ce moment-là, j’ai eu si peur que je me suis mis à y croire.
La foudre a tonné pendant plusieurs minutes, accompagnée d’autres bruits sourds. J’ai fait au mieux pour ignorer le cri que j’ai entendu à un moment, rien ne devait me donner envie de quitter la protection offerte par mes pokémons. Puis tout s’est calmé, la grotte est redevenue silencieuse. Ca a duré quelques temps, jusqu’à ce que je sois apte à capter, à nouveau, ses bruits habituels. Le léger grésillement de la roche sous l’effet de l’activité électrique normale des lieux, l’écoulement de l’eau du ruisseau, la respiration de Rubis. Lentement, je me dégage de mes pokémons. Ils pèsent leurs poids, ne bougent plus, je n’y pense pas. J’ai mal partout, mais parviens quand même à m’extirper à la force de mes bras. Je n’ai pas d’autre choix que de me traîner contre la pierre pour passer sous la cloche bancale de Juliette.

Je tousse : la grotte est pleine de poussière. Au départ je n’en cherche pas la raison, concentré sur mes pokémons. Ma archéodong ne bouge plus, je sens que sa cloche est fissurée en passant les doigts dessus. Des gravats coincent une partie de son corps. Je crains le pire, mais ses yeux s’illuminent en rouge, captant ma présence. Ouf ! Mon reptin… Dracaufeu cependant a les yeux clos. Sa flamme est faible. J’ai du mal à bien voir dans l’obscurité de la grotte seulement éclairée par le feu au bout de sa queue. Je crois qu’il a des plaies un peu partout. Il y a du sang et ce n’est pas le mien.
Du coin de l’oeil je repère une de nos lampes torches tombée à terre dont je m’empare en titubant. Par chance, elle fonctionne encore, même si elle subit de nombreuses micro-coupures. C’est suffisant pour chercher mes pokéballs et y renvoyer mes compagnons. Je dois les emmener le plus vite possible dans un centre pokémon. Autour de moi, il y a des gravats, plus ou moins gros, comme si la grotte avait subit des éboulements. J’ai envie de balayer le plafond avec la torche, mais… Le prédateur. Peut-être qu’il est toujours là.
… … … Non, je ne sens plus rien de ce qui me terrifiait même quand je ne le regardais pas. Ca ne m’empêche pas de ne m’exprimer qu’avec un murmure, au cas où :

- Tarja ? Célestin ?

C’est comme si je prenais soudainement conscience qu’à eux aussi il a pu leur arriver quelque chose. Qu’ils ont peut-être morts. Et ça, ça a quelque chose de pire que tout le reste.

- Viens m’aider…

Un murmure de Tarja, tremblant,, je respire. Sa voix vient de derrière moi, un peu plus loin. Avec la lampe, j’éclaire sa silhouette frêle occupée à essayer de pousser une roche imposante. Le strassie de Célestin est au sol, à côté d’une forme que j’ai du mal à identifier. Ses antennes s’agitent, le pokémon va bien. Je m’approche en boitant. La première chose que je vois, c’est son sang.

Célestin git sur le sol de la grotte, les yeux clos. Sa jambe droite est écrasée sous la roche qu’essaye de pousser Tarja. Le bas de son corps est plein de sang qui a coulé jusqu’à former une flaque sombre, poisseuse et poussiéreuse sous lui. Mon bras qui tient la lampe se met à trembler. J’ai peur d’être en train de voir à nouveau un cadavre et que, contrairement à ce que je pouvais imaginer pour tenter de me rendre fort, les fois d’après ne sont pas moins pires que les premières.

- Il est vivant. Alors bouge-toi et aide-moi à le dégager !

Elle me pointe le haut de la cuisse de Célestin pour me prouver qu’il n’est pas mort. C’est un garrot, comme on en avait dans nos sacs, au cas où. J’ai jamais eu à en poser, mais je vois bien qu’il est fait grossièrement en comparaison à la manière dont nous avons appris à le faire. Si ça a réussi à arrêter l’écoulement du sang, j’imagine que c’est l’essentiel. Sa jambe a été écrasée, la chaire est déchirée, je… Je crois que ce que je vois là, c’est un bout de son os. Ou ce qu’il en reste.
Je serre les dents et plaque l’épaule contre la pierre pour la pousser, ignorant la douleur. Au prix de gros efforts, on parvient à la faire rouler sur le côté. La jambe de Célestin fait un bruit que je veux pas décrire quand elle est progressivement dégagée. Lui ne fait aucun bruit, j’imagine que la douleur l’a fait tomber dans les pommes. Par précaution, j’éclaire la jambe qu’on vient de dégager… Heureusement qu’il porte des vêtements. Je crois que c’est en milles morceaux. Voir pire. Je sais pas le décrire. Je veux pas le décrire.

- Tu peux le tirer jusqu’au tunnel vers la sortie ? Je m’y suis cachée pendant la foudre, la bestiole est pas repartie par là, bien que sa voix continue de trembler, Tarja essaye de se montrer assurée. Elle joue son rôle de cheffe d’équipe. Je m’occupe des sacs.
- On pourra pas ramener Célestin et trois gros sacs comme ça.
- On fera le tri quand on sera à l’abri. Des pierres continuent de tomber, c’est dangereux.

Comme pour illustrer ses propos, une roche imposante se détache du plafond, fragilisé, de l’autre côté de la cavité. C’est d’abord le bruit de sa chute que j’entends, avant d’y diriger ma lumière. Je me rends compte après coup que ça a réussi à me donner une sueur froide : j’ai imaginé que la créature était revenue. Que c’était à cause d’elle. Tarja dit qu’elle est partie, mais… Elle pourrait revenir. Il faut qu’on se dépêche.
Je passe une main sous chaque épaule de Célestin, évitant de me demander s’il va souffrir. Après tout, il est dans les vapes. Il ne sentira rien, pas vrai ? Mon dos me lance, mais je le tire. Il est plus lourd que je l’imaginais, ou c’est peut-être moi qui suis faible. Il ne fait aucun bruit. Tarja tient la lampe pour m’indiquer le tunnel. Ce qui est bien, c’est qu’elle n’éclaire par la jambe donc pour le moment je ne peux pas voir la forme qu’elle prend. C’est ouf mes différences de réaction entre les corps de pokémons sauvages et ça. Une différence que j’aurais préféré ne pas découvrir d’ailleurs.

Une fois que nous sommes dans le tunnel, Tarja nous force à nous enfoncer un peu plus loin pour être sûrs d’avoir le temps de voir venir si jamais la créature revient. Là, on cale Célestin contre un rocher en vérifiant que le garrot est toujours bien en place - ou du moins du mieux possible. Après avoir rentré sa strassie dans sa pokéball, on sort une autre lampe pour mieux s’éclairer pendant qu’on commence à répartir le contenu des sacs : Tarja ne peut en porter qu’un alors on va abandonner ce qui n’est pas essentiel. De mon côté, je ne peux pas m’empêcher de prendre quelques minutes pour examiner Célestin. Il a aussi une blessure au crâne qui n’a pas l’air bien méchante. A certains endroits, ses vêtements collent bizarrement à sa peau. Mon regard dévie sur sa jambe, je grimace.

- Comment je vais pouvoir le porter et grimper à l’échelle avec sa jambe comme… Ca ?
- T’as raison…, on réfléchit tout en triant jusqu’à ce que sa main tombe sur notre corde : On va te l’attacher dessus, comme ça tu pourras te servir de tes bras.

L’idée ne m’enchante pas car je sens que je vais douiller et que ce sera inconfortable, mais n’en ayant pas de meilleure j’accepte. Bien qu’on se soit posé quelques instants pour faire du rangement, la situation reste urgente, nous devons sortir d’ici le plus rapidement possible.

La corde est serrée pour que Célestin tienne sur mon dos. Ses bras aident, passés par-dessus mes épaules, mais avec sa jambe en miette… Bref. Je veux pas repenser au moment où Tarja l’a manipulée pour l’attacher. Elle m’a même demandé d’utiliser ma mentali pour lancer une attaque hypnose sur notre collègue, au cas où. Je comprends, il ne faudrait surtout pas qu’il se réveille maintenant. Un peu de sang s’est remis à couler lorsque je l’ai pris sur le dos, Tarja a resserré le garrot. Ni elle, ni moi ne sommes serein quant à cet outil, car on se souvient des risques si c’est mal fait, mais on a pas le choix que de faire au mieux. Et puis… C’est évident : sa jambe est déjà foutue.
On avance dans le tunnel à la lueur de nos lampes torches. Les nodulithes et géolithes que nous croisons sont recroquevillés sur eux-même. Aucun ne bouge. C’est la seule chose qui a changé depuis notre passage à l’aller. Si je me souviens bien, l’échelle pour remonter là où il y avait les grindurs ne sera plus très loin. Heureusement, car j’ai de plus en plus mal. Rien de cassé, je pense, sinon je serais pas capable de marcher en trimballant Célestin, mais je sens bien que je suis en train de pousser sur mon corps alors qu’il me crie d’arrêter.

- Et… Qu’est-ce qu’on fait pour la bestiole ?, Tarja baisse les yeux, signe qu’elle n’a pas de solution. J’ai peut-être une idée pour l’empêcher de sortir, Célestin avait raison, il faut absolument empêcher cette chose de quitter la grotte. Peut-être que les militaires pourraient s’en occuper, sûrement même, mais combiens de blessés, voire de morts avant ? On a été très chanceux là-dessous. Mon nucléos connaît l’attaque explosion. Il pourrait provoquer un éboulement dans le tunnel où y a l’échelle. Autant qu’on sache la bestiole passe pas à travers les murs…
- Mais… Et ton nucléos ?
- Il l’a déjà fait et ça s’est bien passé.

Je n’ai pas très envie de lui expliquer cette aventure au Mont Couronné où j’ai utilisé Malach’ pour faire exploser un bout de galerie déjà afin de sauver ce con de Giacomo. A ce moment là, j’y avais pas pensé, mais c’est vrai que mon nucléos ne s’était pas retrouvé au beau milieu de l’éboulement, mais devant. Il sera capable de le refaire… Pas vrai ? Au pire je demanderai l’aide de tous mes pokémons psys pour le sortir de là. La pensée prioritaire est d’empêcher ce monstre de sortir de la grotte électrolithe !

Monter à l’échelle est putain de dur avec Célestin dans le dos. J’essaye de faire attention à ce qu’il frotte pas contre les parois tout en devant tirer et pousser plus fort que jamais sur mes membres pour qu’ils arrivent à nous hisser. Arrivé au-dessus, je dois me mettre à quatre pattes par terre pour reprendre mon souffle. J’ai mal et les cordes serrées m’empêchent de prendre de grandes inspirations. Bientôt la sortie. Bientôt la sortie !
Tarja prend de l’avance avec le sac pour voir ce qu’il en est des grindurs, histoire d’éviter le comité de sortie pénible et dangereux. De mon côté, une fois que je suis remis, je laisse mon nucléos sortir de sa pokéball et lui explique ce qu’il va devoir faire. Il me regarde bêtement, avec son unique expression faciale, pendant longtemps. Je désespère :

- Putain pitié Malach’ pour une fois COMPREND bordel !, soudain une vive douleur au crâne qui me plie en deux. Elle dure à peine deux secondes. La membrane de mon nucléos s’est mise à vibrer. Ok. Il a lu dans ma tête. Et préviens avant de faire ça !, vite que ça se termine. C’est trop de choses d’un seul coup, trop de peur, trop d’appréhension, aucun soulagement, j’ai les nerfs qui craquent et Célestin va peut-être mourir. Dépêche-toi !

Malach’ s’enfonce dans le tunnel où se trouve l’échelle, je m’éloigne le plus vite possible pour ne pas prendre l’onde de choc de l’explosion. Elle résonne dans toute la grotte, soulève un nuage de poussière qui arrive jusqu’à moi et me fait à nouveau tousser. Le choc est accompagné de sons que j’associe à ceux d’un éboulement. Une fois que tout est calme, je retourne au tunnel. Le premier soulagement depuis que la bête est apparue survient : la galerie est complètement bouchée et Malach’ est là. Je le remercie rapidement et le renvoie dans sa pokéball avant de rejoindre Tarja.

- Les pokémons qui utilisent explosion sont généralement très lourds, peut-être que ton nucléos est soufflé par sa propre explosion ? Ou peut-être est-ce sa membrane, il paraît qu’ils peuvent survivre dans l’espace grâce à ça… Peut-être qu’il se téléporte, aussi, je la regarde de travers. Comme si c’était le moment de théoriser sur ça. Elle le remarque. Je… J’essayais de m’occuper l’esprit en t’attendant.

Elle me montre que les grindurs sont tous au sol, je ne m’attendais pas à en voir autant. Des tas de grindurs sont là, les uns sur les autres. S’ils avaient des articulations, on pourrait croire qu’ils sont recroquevillés tous ensemble. Je me demande si c’est à cause de l’explosion ou à cause de la présence du prédateur. Peut-être qu’il n’avait jamais été si proche de cette cavité que lorsqu’il a fait pleuvoir la foudre sur nous.
… … … Non, il ne peut plus nous rattraper.

Sabelette se prend pour un agriculteur et vous ramène une Baie Kika !

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Ponchien est pas très futé de casser des cailloux avec sa tête...par chance il trouve une Super-Potion !

Dès que le réseau est revenu, Tarja a appelé les secours. Moi, je me suis assis et ai détaché Célestin. Je l’ai installé d’une manière que j’imaginais confortable avant d’admirer le ciel orangé du soleil couchant. J’ai eu l’impression que ça faisait une éternité que je n’avais pas pris le temps de le regarder et qu’il était plus beau que jamais. Ce n’était que l’effet de la pression qui retombe, bien sûr, mais je crois que je me souviendrai pour toujours de ce dégradé de couleur. Je l’ai pris en photo avec mon téléphone afin de le conserver et pouvoir le montrer. J’ai bien fait, car celui par la fenêtre de l’hôpital aujourd’hui est beaucoup moins beau. Ce ne sont pas des monts et des arbres qui le cachent en partie, mais le béton gris des autres ailes du bâtiment.

Tarja et moi avons passé la nuit ici par précaution. Elle n’avait pas grand chose, malgré l’onde de choc qu’elle a subi. De mon côté, comme je le pensais je n’avais rien de cassé, mais maintenant qu’ils ont eu le temps de se former mon corps est couvert de bleus et bosses plus ou moins sévères. Quand j’ai raconté d’où venaient ces blessures aux médecins, ils m’ont dit que j’avais eu beaucoup de chance. Je suis d’accord avec eux, mais pas seulement en ce qui concerne les marques qu’en garde mon corps. J’ai passé une bonne partie de la journée à être silencieux et attendre dans les couloirs de l’hôpital. Mes seules paroles ont été consacrées à la description des faits, à notre patron et au personnel de l’hôpital. Le premier est catastrophé, les seconds s’activent au mieux pour limiter les dégâts chez Célestin.
En plus de ce qui est arrivé à sa jambe, il a été brûlé par l’électricité. C’est pour ça que ses fringues collaient à sa peau, ils avaient fusionné, un truc comme ça. J’avoue ne pas bien avoir compris le reste, c’était des termes techniques ou rapportés par ses parents qui n’y connaissent pas non plus grand chose. Comme quoi la foudre passe à travers le corps, qu’il y a sûrement des dégâts invisibles à l’oeil nu, qu’il faut faire toute une batterie d’examens pour vérifier, que pour le moment son corps tient le coup, que ça va coûter cher, mais lui et ses parents sont bien couverts donc ça ira. C’est ça que j’ai retenu de toute cette confusion : ça ira. J’espère. Parce qu’il y aura tout ce qui viendra après. Parce qu’ils le maintiennent endormi pour le moment. Parce qu’ils lui ont amputé la jambe aujourd’hui.
Je m’entends encore lui dire que lui, au moins, il est sur le terrain.

Il est tard, je suis très fatigué, on nous encourage à le faire alors je décide de quitter l’hôpital pour rentrer chez moi. Marcher me fait toujours mal, mais mon corps est plus léger depuis que nous sommes sortis de la grotte électrolithe. Je décide de faire un détour par un parc afin d’y laisser sortir de leurs pokéball Rubis et Juliette. Les deux sont encore en convalescence, ils ont été salement amochés, mais le centre pokémon de l’hôpital me les a rendus il y a quelques heures. Ils leur faut du temps et du repos, prendre l’air ne peut pas leur faire de mal.
L’archéodong flotte mollement, mais me fait comprendre qu’elle apprécie être à l’extérieur. Mon attention est, malgré moi, focalisée sur le dracaufeu. Je me suis beaucoup renseigné sur ce pokémon, tellement je voulais en avoir un, tellement je voulais que mon reptincel évolue. Rubis est plus petit que la moyenne de taille pour son espèce, je suis un peu plus grand que lui. Ses ailes ont été brûlées par les attaques électriques qu’il a subit, on m’a dit que ça se soignerait facilement comme il vient d’évoluer et est donc un jeune dracaufeu. La flamme au bout de sa queue n’a rien d’impressionnant. Son corps porte les marques de plusieurs blessures. Par rapport à l’image idéalisée que je me faisais d’un dracaufeu, il est objectivement minable, mais je le trouve merveilleux. Mieux que tous les autres, mieux que tout ce que j’avais pu imaginer. Je l’adore, car c’est Rubis, mais aussi car c’est déjà le meilleur de tous les dracaufeus pour moi.

- Rubis ! Regarde-toi !, je souris comme un enfant tandis que lui baisse la tête et les bras. Lui aussi admirait ceux de son espèce qui sont grands et majestueux. T’es trop bien !

Je l’examine sous toutes les coutures en tâchant de ne pas lui faire mal. Il s’étonne, est embarrassé, essaye de tourner sur lui-même pour m’en empêcher, mais s’empêtre dans la nouvelle longueur de sa queue et les nouveaux membres que sont ses ailes. Ca me fait rire aux éclats, lui grogne de voir sa fierté bafouée par mon comportement. Je sais qu’il n’est pas vraiment en colère cependant. Je finis par m’asseoir devant lui, prendre sa tête dans mes mains pour que son front se pose contre le mien.

- Merci.

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Je suis enfin rentré chez moi, ai mangé un morceau et suis allongé dans mon lit bien plus confortable que celui de l’hôpital. Être sur ce matelas me donne l’impression que tous mes muscles se détendent, je n’y ai jamais été aussi bien. Comme depuis la veille, je ressasse les événements. Cette fois, en fixant le bracelet qu’Aram m’a offert. Je laisse mon pouce passer délicatement sur le cuir gravé. J’ignore à quel point cet accessoire m’a protégé, ni s’il y est pour quoi que ce soit d’ailleurs, mais je me plais à le croire. Si beaucoup de choses sont encore confuses, frôler la mort dans cette grotte m’a permis d’y voir clair sur une autre : ce que sont mes sentiments pour Aram et ce que je dois en faire.
Je lâche le bracelet, prend mon portable et vais chercher son numéro dans la liste de mes contacts pour l’appeler. Bien que je ne veuille pas lui dire quoi que ce soit de grandiose pour le moment, mon coeur se met à battre plus vite. Répondeur.

Salut Limonde ! Je suis rentré de mon explo’... Je te raconterai, quand je t’aurai et pas ton répondeur. C’était… Mouvementé ? Enfin bref, je sais que ça fait pas longtemps depuis mon anniv’, mais je me demandais si tu serais dispo pour qu’on se voit bientôt. Voilà, c’est tout, à plus !, j’espère avoir réussi à être naturel.

Je laisse le téléphone retomber à côté de mon oreiller.
Là-bas, dans cette grotte, j’aurais pu mourir. Comme ça, d’un seul coup. Et plus rien. Qu’est-ce que Phil aurait pensé de moi si je l’avais retrouvé de l’autre côté et que je lui avais dit que j’avais réussi à aimer à nouveau quelqu’un sans accepter de l’admettre parce que je me sentais coupable vis-à-vis de lui ? Alors qu’il a décidé de mourir une seconde fois pour que je puisse vivre pleinement ? Je suis vraiment débile.

Sunshine saute sur le lit. Je le chope pour le prendre contre moi comme un doudou pendant que je me roule en boule pour essayer de dormir un peu. Il ne proteste pas, sentant que tout n’est pas ok depuis que je suis rentré. Ce qui est vrai, mais faux en même temps.
Car je suis bien vivant.