Jour 1

Premier jour de notre aventure, à Spyros et moi. Et je dois dire que je ne sais pas vraiment quoi en penser. Jusque-là, je n’avais qu’une hâte, partir de chez moi et vivre ma propre aventure. Et pourtant, une fois arrivé seul avec le Riolu à Féli-Cité, je me suis senti hyper intimidé, vraiment pas confiant. Moi qui comptais explorer, crapahuter, me balader, je me suis retrouvé hésitant à l’idée de sortir de la ville. Je n’aurais pas pensé être assaillis de doutes de la sorte, même si ça n’a pas duré si longtemps que ça. Alors oui, au début, j’ai clairement tergiversé, me promenant à gauche et à droite, errant un peu sans but, histoire de faire passer le temps. Une sorte de stratégie d’évitement à court terme, pour faire simple. J’ai fini par me rendre compte que Spyros n’était pas super à l’aise avec tout ce monde autour de nous en permanence. Déjà qu’il n’est pas forcément confortable avec la présence d’humains, je lui en ai sans doute demandé beaucoup d’entrée de jeu. C’est ce qui m’a fait me décider à bouger, à sortir de la ville. Il ne fallait pas que je m’éternise davantage.

Honnêtement, ça fait bizarre de devoir prendre en considération un autre être que soi. Il ne faut pas oublier que je ne suis plus tout seul. D’autant plus avec un Riolu qui ne reste pas vraiment dans sa pokéball. Je ne sais pas trop comment ça se passe, quand on est à l’intérieur d’une de ces sphères, ça doit être bizarre… Peut-être qu’il est claustrophobe. Je ne sais pas. Mais du coup, je ne dois pas zapper qu’il est là, et qu’on n’a pas du tout les mêmes caractères lui et moi. Enfin, en général, Spyros se rappelle à moi lorsque cela s’avère nécessaire, comme là à Féli-Cité, avec tous ces gens. C’est difficile à expliquer, mais le canidé me vient à l’esprit sitôt qu’il ressent une émotion désagréable, comme si je recevais un signal subliminal de sa part, m’indiquant que je dois faire attention à lui. Aurais-je d’ores et déjà développé un sixième sens de dresseur, si tant est qu’une telle chose existe ? A voir. Si c’est le cas, je devrais en avoir confirmation dans les jours à venir.

En attendant, aujourd’hui, j’ai installé notre campement juste à la sortie de Féli-Cité. Je ne m’éloigne pas trop, par précaution. Disons que je préfère décider tranquillement de là où je vais, au lieu de foncer tête baissée. Maintenant que je suis un adulte, c’est comme ça que je dois procéder, non ? Alors voilà, je prends mon temps. J’ai les deux mois des vacances d’été pour mes pérégrinations, je peux bien prendre un jour pour me décider ! Oui j’aurais pu y réfléchir avant, en effet. Mais ça gâche le sel du truc. Autant voir en temps réel, car c’est toujours quand on fait des plans qu’on ne peut pas les suivre. En n’ayant rien prévu, il n’y aura pas de déception, que de l’adaptation. Je pense commencer par descendre à Littorella, avant de poursuivre vers Bonaugure et chercher à me poser vers le lac Vérité. Ça me semble être un bon début de voyage. J’en ai bien évidemment parlé à Spyros, voir ce qu’il en pensait et… Soit il n’en pense pas grand-chose, soit il s’en fout. J’ai encore du mal à déterminer ce que son absence de réaction à mes propos signifie. Si ça se trouve, je le fais chier. J’espère pas, parce que ça craint un peu si, à peine partis, mon pokémon – le seul que j’ai en plus – me trouve super chiant. Quand même, les boules si ça colle pas entre nous, en fin de compte. Ce serait bien qu’on s’entende, sur le long terme. Mais on va commencer par le début, à savoir vraiment apprendre à connaître l’autre, et surtout notre dynamique en tant que duo.

---

---

Modération:

Jour 2

Première nuit à la belle étoile, sans dormir sur un matelas, sans dormir dans un lit. Enfin, j’ai déjà fait du camping, mais disons que là, c’est voué à être régulier. Première nuit d’une longue lignée, on va dire ça comme ça. Et du coup, je m’attendais à pire, à ne pas réussir à m’endormir, à me réveiller avec le dos cassé. En fait pas du tout, j’ai bien une petite raideur dans la nuque, mais avec quelques étirements, la sensation a presque disparue. Pif paf pouf. Je suppose que toutes ces nuits où j’ai traîné ma couverture pour dormir à même le sol dans la chambre d’un de mes frères m’ont préparé à ça ? Parce que ça arrivait quand même un peu souvent, quand j’étais gamin. Quand je faisais des mauvais rêves, je n’allais pas dans la chambre de mes parents, mais dans cette d’un de mes frères. Mince, ça m’arrivait aussi souvent que ça de faire des cauchemars ? Autant je me rappelle aller squatter au pied du lit de Seth un certain nombre de fois, autant j’ai pas vraiment de souvenir de ces cauchemars. Tant mieux ? Je crois que oui, on va éviter de se rajouter des traumatismes superflus, hein.

Bref, petit déjeuner. Là, c’est de suite moins la panacée pour moi, je dois dire ce qui est. Je suis de ceux qui se font un petit dej’ gargantuesque, qui se font péter le bide dès le matin. Bol de céréales, tasse de thé, verre de jus de fruit, une petite salade de fruits maison, un ou deux petits suisses, des tartines avec de la confiture, ou alors une viennoiserie, selon l’humeur et ce qu’il y a à disposition. Il est certain qu’il vaut mieux m’avoir en photo qu’en pension, et je vais pleurer le jour où je me prendrai en charge, quand je devrai payer ma propre bouffe. A moins que mon voyage m’apprenne la mesure, la sobriété, la restriction, des trucs comme ça. Mais là, j’avoue que les flocons d’avoine dans du lait chaud… Erh. C’est fade. J’ai l’impression de manger du fourrage comme un Ponyta. Du foin. Et puis la texture pâteuse là… Non vraiment, ça n’a rien de ragoutant. Mais bon, il faut ce qu’il faut, je n’ai pas de cuisine à disposition, rien de plus qu’une casserole et un réchaud. Et puis pas de frigo, surtout. Donc mon lait, bah, c’est parce que je l’avais d’hier. J’en aurais plus par la suite. Ce qui voudrait dire que… Non, ça c’est pas possible. Des flocons d’avoine à la flotte, plutôt crever. Ça doit juste être infect. Go manger les flocons d’avoir comme ça. Puis manger des fruits. C’est bien les fruits.

Peut-être que je devrais m’organiser et me rationner, pour ne pas me retrouver avec pas grand-chose d’un coup parce que j’aurais tout terminé sans m’en rendre compte. Mais… suis-je au moins capable de me réguler comme ça ? Je ne suis pas du genre à me laisser mourir de faim, c’est le moins qu’on puisse dire, et c’est déjà le cas lors de journées normales. Alors des journées où je ne fais que marcher, visiter, découvrir, possiblement me perdre… Forcément je vais avoir la pire dalle le soir venu, si j’ai pas déjà déglingué mon stock de bouffe à l’heure du goûter. Si je me rationne, je vais devoir faire preuve d’une volonté de folie, une volonté que je ne suis pas sûr d’avoir. Mais peut-être que le fait de ne pas être la seule bouche à nourrir devrait m’aider à maintenir le cap. Il n’y a pas que moi, je dois aussi conserver de la nourriture pour Spyros. Et là, c’est plus trop la même. Au pire, j’ai faim, tant pis pour moi. Mais faire subir ça à mon pokémon : no way.

---

---

Fuite:

Jour 2

Bon, cette première journée complètement sur la route, j’en pense quoi ? Bah, je sais pas trop. Je me rends compte que sur le papier, oui, c’est super cool d’être libre, c’est vraiment génial de ne pas sentir de contrainte relative aux autres, de n’avoir personne qui décide pour soi. Le truc, c’est que ça veut aussi dire que c’est à moi de décider pour tout, absolument tout, et que si je ne fais pas quelque chose, bah personne n’ira le faire pour moi. Et c’est chaud ! On ne nous prépare jamais vraiment à ça, en tant qu’enfant ou adolescent. On nous parle de nous donner accès à l’autonomie, mais j’ai l’impression que les parents parlent davantage de l’autonomie qui les arrange plus que celle qui nous servira dans notre vie d’adulte. Et encore, moi je m’en rends compte parce que je fais ce voyage initiatique en solitaire ! Du coup, c’est le genre de truc dont je me rends immédiatement compte. Sinon, je pense qu’il m’aurait fallu encore quelques années pour le réaliser. Et pourtant je suis du genre indépendant. Pas que j’aime travailler seul, je suis totalement un gars fait pour bosser en équipe, mais j’aime pouvoir fonctionner par moi-même, ne pas risquer d’être retenu par les autres, ou penser que c’est moi qui retiens les autres. Je n’arrive même pas à savoir ce que je trouverais le pire, des deux situations. Frustration ou culpabilité. Peste et choléra. Bref, c’est à moi de choisir pour tout, de penser à tout. Et c’est chaud.

En dehors de ça – même si ce n’est clairement pas rien – je vis presque ma meilleure vie. Je pense que j’apprécierais davantage si j’étais avec d’autres gens. Alors oui, j’ai Spyros, et je suis ravi de l’avoir avec moi, aucun doute là-dessus. C’est juste que le Riolu n’est pas vraiment le pokémon le plus jovial ou tout simplement expressif qui soit. Des fois, j’ai vraiment la sensation que je le fais chier à force de parler. J’aurais quelqu’un avec qui faire la conversation, forcément que je parlerais moins. Mais, entre mon expressivité naturelle et le plaisir que je retire de l’expérience que je vis, ça ne m’aide pas à la boucler… Parce que, oui, c’est juste génial de vivre ça. Je sais que pour l’instant, j’ai passé plus de temps à expliquer pourquoi je m’en plaignais qu’à vraiment m’en réjouir. Je ne suis tout simplement pas encore arrivé à la partie intéressante.

Il n’y a pas besoin de me connaître depuis longtemps pour savoir que j’ai besoin de dépenser la quantité démesurée d’énergie que je possède dans mon corps, que ça m’est impossible de rester à rien faire, immobile. Bah, là, à vadrouiller toute la journée, je finis rincé. D’habitude, même après le dîner, les batteries ne sont pas à plat. Là, on se pose le soir, j’ai juste envie de m’enrouler dans mon sac de couchage et dormir direct jusqu’au lendemain. Tout du moins, c’est ce qui m’arrive ce soir. Ça fait du bien, d’avoir la sensation de vraiment s’arrêter, faire une pause, dormir. C’est pas le genre de truc dans mes habitudes ; en temps normal, je me couche, j’ai cent mille milliards de pensées qui tournent dans ma tête à tout berzingue, jusqu’à ce que je tombe d’épuisement, et je repars au quart de tour au petit matin. Mais pas là, clairement pas. Y’a plus assez de jus dans mon corps pour irriguer le cerveau. Je ne suis pas totalement rincé, et heureusement ! Ce serait clairement craignos, pour un deuxième jour d’être déjà épuisé physiquement. Oui, y’a de la fatigue, ça demande de gambader toute la journée, chercher un spot pour de l’eau claire, éventuellement trouver des baies sauvages à grignoter – sans s’intoxiquer, il parait que c’est mieux – même si c’est ponctué de tout un tas d’arrêts. Genre à chaque fois que je capte un pokémon sauvage que j’avais jamais eu l’occasion de voir dans la nature. Le climat et, par conséquent, le biotope sont différents à Rivamar. Certes, on se dirige vers Littorella, un autre bord de mer, mais ça reste pas le même délire, point de vue écosystème. Enfin, je ne suis pas environnemento… environnementologue ? environnementaliste ? Un biologiste. Ouaaaais, ça ! Un biologiste. Bah c’est pas moi. Mais c’est pas pareil.

---

---

Modération:

Jour 4

Depuis hier, je commence à douter du choix que j’ai fait, de partir à l’aventure avec Spyros. Nous savions depuis le début que nos tempéraments étaient à des années-lumière l’un de l’autre. Je suis hyperactif, toujours avec le besoin de bouger, de parler, d’exister et de rappeler aux autres que j’existe, au monde que j’existe. J’ai conscience que ça puisse être chiant, parce qu’il faut me suivre, et il faut parvenir à me supporter, à supporter cette intensité que j’inflige à mon entourage. Et c’est là que ça se complique, parce que mon seul entourage ces derniers jours, c’est Spyros. Il est à l’exact opposé de moi : il est impassible, en permanence. J’irai même jusqu’à dire insondable. C’est là toute la difficulté pour moi, parce que j’ai besoin de feed-back que le Riolu ne me renvoie pas. Je ne sais pas si c’est la réalité, mais j’ai l’impression qu’il se fiche plus qu’autre chose de ma simple présence à ses côtés. Il est mon seul auditoire, alors que j’ai toujours eu toute ma famille autour de moi jusque-là. Même si les réactions n’étaient pas toujours positives, il y avait des réactions. Pas avec Spyros. C’est aussi déstabilisant que frustrant.

Ce qui est le plus étrange, dans toute cette histoire, c’est qu’à certains moments, j’ai l’impression que nous communiquons sans même communiquer. Ça semble dingue dit comme ça, et ça n’est pas arrivé très souvent, mais je suis certain à cent mille milliards de pourcents que je savais ce que ressentait Spyros. C’est arrivé surtout quand nous nous sommes rencontrés, c’est là où c’était le plus fort. Mais ça nous est arrivé une ou deux autres fois, au refuge. Je ne sais pas trop si ça marche dans les deux sens, ce truc-là, si – lui aussi – a perçu mes émotions. Juste que là, c’est un silence radio total, et c’est quelque chose que je vis très mal. Et c’est plus fort que moi… J’aimerais pouvoir être de ceux qui sont confortables dans le silence, sauf que pas du tout. J’ai besoin de bruit ; et j’ai surtout besoin de réponses.

---

---

Fuite:

Jour 4

Un coup dans la cuisse me tire de mes pensées. Je baisse alors les yeux, ce qui me permet de voir Spyros, qui me fixe. Je m’interroge sur la raison de ce coup, étant donné qu’il ne me prévient de rien, ni ne cherche à me faire mal – encore heureux. Il semble attendre quelque chose, mais je ne sais pas quoi. C’est un peu comme si j’étais censé comprendre le message, sauf que non, clairement je ne pige pas le délire. A part m’interrompre, je ne vois pas trop ce que… Oh. Ce serait possible que ? Je sais pas trop, je n’en sais pas assez pour déterminer quoi que ce soit avec certitude. Mais quand même, le timing et l’attitude de Spyros pointent dans cette direction. Puis on dit que les Riolus ont le pouvoir de l’Aura, même si je n’ai pas assez lu sur le sujet pour comprendre le phénomène. C’est chelou, genre il ressent des trucs chez les autres, les émotions. Bon, ça, ok, c’est pas trop choquant, y’a d’autres pokémons qui savent le faire. Là où je m’interroge, c’est avec quelle précision Spyros a accès à mes pensées, et s’il y a accès en permanence, quand il le souhaite, ou quand moi je peux le souhaiter. Et moi, clairement c’est quelque chose que je ne peux pas savoir. Et comme le type combat n’est pas trop du genre à répondre à mes questions. Peut-être qu’un véto pourrait m’aider à mieux cerner tout ça, ou un spécialiste de l’espèce, même si je n’en connais pas, comme ça. Peut-être Mélina. A voir. Je me doute bien que ce n’est pas aujourd’hui que je vais répondre à cette question, même si j’aimerais bien, parce que ça va me tourner dans la tête.

Et, en même temps, je risque quoi à poser la question directement à Spyros ? Après tout, ce voyage initiatique, il a aussi pour but de nous découvrir l’un et l’autre. Alors autant jouer le jeu à fond, non ? Au pire quoi ? J’essaie de m’adresser tout seul dans ma tête à mon pokémon, personne ne s’en rendra compte si ça ne marche pas. Je ne vais même pas me taper la honte ou quoi, rien. Donc autant s’y essayer. Je ne sais pas trop comment on fait ça, mais autant tenter le coup. Déjà quand il y a des risques, j’ai des tendances kamikazes, alors c’est pas devant un truc totalement safe que je vais reculer !

---

---

Modération:

Jour 4

Comment on pense très fort ? Genre je crie dans ma tête ? Chelou. En plus j’ai l’impression que je peux mettre de l’intonation dans ce que je pense, accélérer le rythme, ou même faire un accent à la con, mais je ne vois pas comment je peux augmenter le volume. Non, clairement, je ne vois pas le bouton volume sur mon cerveau sans utiliser ma voix. Genre même si je m’imagine parler plus fort intérieurement, bah j’ai pas la sensation que mon discours interne se dit plus fort, genre que je l’entends plus. D’ailleurs, j’essaie de faire l’inverse et ça ne marche pas non plus. Genre chuchoter. C’est toujours au même niveau. Je me demande si c’est pour tout le monde pareil ou s’il existe des gens qui arrivent à se parler plus fort ou plus doucement à eux-mêmes. En tout cas, je ne vois pas la différence de mon côté, donc je suppose que je ne peux pas compter là-dessus. Alors comment je fais ? Erh. J'en sais rien, et ça fait depuis je sais pas combien de temps que ça me tourne dans la tête, que je ne tiens pas à faire part de cette réflexion à Spyros – bien qu’il puisse sans doute le capter, du coup – pour éviter de passer pour un débile. Ou alors je lui en parle directement, je lui pose la question et voit ce qu’il peut m’en dire. Enfin, ça risque d’être un peu plus compliqué que ça. Ok j’ai déjà eu l’impression de ressentir ce que lui pouvait ressentir, mais ça s’arrête là. Déjà, c’était quelque chose de très ponctuel et, surtout, c’était face à des émotions très fortes. Ce n'est pas comme s’il pouvait parler dans ma tête, on n’est pas dans un film de science-fiction non plus ! Donc est-ce que ça vaut vraiment le coup de lui demander s’il ne peut pas vraiment me répondre ? Je ne pourrai que lui poser des questions fermées, qui se répondent par oui ou non. Erh. Vraiment pas simple cette histoire.

Oh et puis merde ! Depuis quand je suis du genre à me prendre la tête, sérieusement ? J’ai un truc qui me chiffonne, bah j’y vais et je vois bien. Puis si je trouve pas la réponse, bah tant pis, je passe à autre chose. J’y reviendrai à un moment ou à un autre. Je ne sais pas pourquoi, d’un coup, comme ça, je m’entortille les neurones. C’est tellement pas mon délire ! Moi je fonce, quitte à enfoncer des portes ouvertes ou à me manger des murs. C’est même ma stratégie numéro un. Berk. C’est à ça que ça ressemble dans la tête de Todd ? J’espère pas pour lui, parce que quel enfer ! No way je fais pareil. Et c’est pour ça que je me lance. Enfin, que je vais me lancer. D’abord, je dis qu’on fait une petite pause, parce que bon, ça fait quand même un petit bout de temps qu’on marche, donc s’arrêter pour manger un petit bout, reposer mes petits pieds et tout, c’est pas plus mal. C’est l’occasion de tailler le bout de gras, en fait.

Du coup c’est parti, je fouille dans mon sac pour prendre une barre de céréales et file une baie à Spyros. J’en profite pour lancer le sujet et lui demande s’il entend tout ce que je pense. Je vois à sa tronche qu’il est… surpris ? Alors oui, mais pas vraiment non plus. Genre c’est pas la surprise genre choqué, mais plutôt qui suscite des interrogations, que c’est pas très clair, qu’on se demande d’où ça sort, si ça fait longtemps que ça doit sortir, qu’on a du mal à voir comment répondre aussi. Interloqué ? déconcerté ? Je trouve pas le mot, mais bref, j’ai expliqué. Spyros finit par secouer la tête à la négative. Enfin, c’est pas tout à fait à la négative. C’est un non, mais pas un non qui pose un non ferme. Plûtot un « non, maiiiiiis… ». Il y a autre chose, genre c’est pas tout à fait ça. Il pose alors sa patte sur son œil. What ? Je sais pas si c’est moi qui suis teubé, mais je suis vraiment pas sûr de comprendre, là.

---

---

Capture:

Jour 4

Il va falloir que je comprenne, et je sens que c’est pas gagné d’avance. Spyros m’a montré ses yeux, du coup, ça voudrait dire qu’il voit comment je me sens ? Chelou un peu, même si je suppose que ça fait un peu sens avec ce truc d’aura… Je lui demande si c’est bien qu’il voit ce que je pense. Et ça semble toujours pas être ça, enfin, pas trop. C’est frustrant de constater à quel point tout est flou, et je me dis que ce serait vachement plus simple si le Riolu était capable de transmettre ses pensées, aussi. Ou alors que je sois capable de lire les siennes. Dans un sens ou dans l’autre, je m’en fiche un peu, mais simplement que la communication ne soit pas unilatérale. Spyros me comprend, mais moi, pour le comprendre, c’est la croix et la bannière… Je suppose qu’il doit percevoir ma frustration, du coup, et ça me semble important de lui expliquer que ce n’est pas tourné vers lui, que c’est simplement la situation. Puis ce n’est pas en m’agaçant parce que c’est compliqué que ça va rendre les choses plus simples, au contraire. Alors focus.

Spyros voit quelque chose, mais ce ne sont pas mes pensées. Est-ce qu’il verrait mon aura, carrément ? Autant lui demander, et je vois qu’il secoue immédiatement la tête à l’affirmative. Waw. Ça doit être bizarre de voir une sorte d’énergie autour des gens, et puis même des pokémons aussi, je suppose. Et ça doit faire beaucoup d’informations visuelles, en plus de ça. Quoi que… s’il a toujours vu comme ça, c’est normal en fait. Enfin, il doit y être habitué, puis je me dis qu’il doit aussi y avoir une sélection dans le traitement des informations, exactement comme nous.

Je continue avec les questions, pour voir les réponses que Spyros peut m’apporter. S’il voit mon aura, qu’est-ce que mon aura lui indique ? La première chose que je me dis, c’est que ça doit montrer comment je me sens, genre mon état émotionnel ; ce qui est confirmé par le Riolu. Ok, je pense être de base un livre ouvert, genre c’est écrit sur ma tronche comment je me sens. Je suis nul pour cacher tout ça, et même je vais ouvrir ma gamelle pour exprimer ce que je pense de tel ou tel truc, de ce que ça provoque en moi. Donc clairement, l’aura, c’est que du bonus. Il va vraiment falloir que je fasse des recherches là-dessus, parce que même si j’ai l’impression de saisir la globalité, je risque d’avoir besoin d’une connaissance bien plus fine de ce mécanisme pour véritablement l’appréhender. Mais du coup, je trouve ça quand même vachement cool que Spyros puisse capter comment je me sens, par contre je suis aussi capable de ressentir les émotions du Riolu, quand elles sont vraiment très fortes. Et ça, je n’ai aucune idée de si c’est normal ou pas. Là aussi, tant mieux, parce que je pense que ça peut s’avérer pratique, tout en conservant une certaine intimité, dans le sens où l’autre n’a pas accès à toutes nos pensées. J’avoue que ça, ça me mettrait de suite moins à l’aise…

---

---

Evolution de Loupio S en Lanturn S au niveau 28.

---

---

Modération:

Jour 4

Depuis qu’on a parlé – enfin que j’ai parlé à Spyros – j’ai l’impression que ça va mieux, genre que l’atmosphère est plus légère. J’essaie de ne plus trop y penser pendant qu’on continue notre bout de chemin en direction de Littorella, mais c’est pas vraiment ça. En fait, je me demande si ce qui me perturbait, c’était de sentir ce truc sans avoir aucune idée de ce que c’est, hormis que c’est lié au Riolu. Ça va pas tant chercher plus loin, en fait. Du coup j’ai pas grand-chose à réfléchir ; et tant mieux parce que je ne sais pas réfléchir grand-chose, de toute façon. Alors on marche, on s’arrête boire un coup, ça m’arrive d’aller un peu taper la jactance aux deux ou trois personnes qu’on rencontre sur le trajet, même si j’insiste pas trop, parce qu’on va souvent en sens inverse. J’ai pas spécialement envie de perdre la cadence : on dirait pas comme ça mais deux mois, ça va vite passer. J’en suis déjà à quatre jours et je suis même pas arrivé au village le plus proche de ma ville de départ. Donc si je veux voir pas mal d’horizons, il va falloir carburer ! Rien que d’y penser, ça me rebooste et j’accélère le pas. Je vois bien que la journée commence à être longue pour Spyros : si on fait un ratio par rapport à sa taille, il a parcouru une distance vachement plus grande que moi, sur ses petites gambettes. Je veux pas non plus l’épuiser direct, même si on aura forcément du repos en arrivant à Littorella. Je lui propose de le porter un peu, vu que je suis bourré d’entrain. Il refuse. Je constate que monsieur s’autorise de plus en plus à montrer sa petite fierté ; ça me plait bien.

C’est après une bonne demi-heure de marche à travers la campagne du sud-ouest de Sinnoh qu’on finit par établir notre bivouac. Normalement, demain, ou au pire après-demain, on arrive à destination. J’avoue que j’ai un peu hâte. J’ai jamais trop été là-bas, en vrai, d’ailleurs il n’y a pas l’air d’y avoir grand-chose, en dehors du laboratoire du professeur Sorbier. C’est le professeur pokémon le plus connu de la région, voire du monde, donc même si c’est « que ça », bah c’est pas rien ! Je sais pas encore si on va essayer d’y faire un tour, dans ce labo. Il parait que le professeur Sorbier donne pas mal de conseils aux dresseurs débutants, alors même si je débarque pas vraiment dans le monde du dressage de pokémons, bah Spyros reste le premier vraiment à moi, donc ça me fera pas de mal. Et en même temps, j’ai pas trop envie de me faire farcir la tête par un scientifique pendant des heures, parce que bon, je sais quand même un petit peu ce que je fais. Pas la foi de me taper le laïus sur comment s’occuper d’un pokémon, sauf que ça pourrait s’avérer être plus que ça. Bref, je suis indécis sur le sujet, mais ça tombe bien, on n’y est pas encore. On va voir si la nuit porte vraiment conseil !

---

---

Fuite: