Avec nervosité, tu sors une lettre de la poche intérieure de ta veste. Ce n'est pas la première fois que tu la vérifies. Elle a fait une partie du voyage, bien coincée dans un carnet, mais tu avais eu besoin de l'avoir contre toi durant ta randonnée. A chaque pause que vous faisiez pour boire un peu, le même rituel se produisait. Tu vérifiais que l'enveloppe était toujours bien là et que l'encre qui en noircissait l'envers ne s'était pas effacé ou n'avait pas dégorgé à cause d'une goutte d'eau miraculeusement arrivée sous la matière waterproof du vêtement. Même si cela s'était produit, ce n'est pas comme si tout aurait été perdu non plus. A force, tu connais par cœur chaque mot qui y est inscris. Il y a aussi une photo de l'enveloppe dans la galerie d'images de ton téléphone et tout est gribouillé sur une page du même carnet qui l'a abrité.

Cette fois, c'est différent. Tu y es. Roche-sur-Gliffe. La ville est comme sur cette carte postale que Gia t'a envoyé un jour. Des bâtiments nichés dans les falaises, tous avec une vue directe sur la mer. Tu es encore en contre-bas, en bordure d'une plage qui reste presque accueillante malgré le froid. Les spots de l'aquarium brillent dans le jour qui tombe, dominant les habitations.

A l'arrière de l'enveloppe, tu vérifies une ultime fois l'adresse. Elle n'est pas différente de celle qui est gravée depuis des semaines dans ta mémoire. Tu observes quelques instants l'écriture arrondie de ton amie, relis le récit de ses aventures lors de ses premiers mois dans la région, avant de ranger la lettre dans sa nouvelle place désignée. Tu t'efforces d'avoir des gestes précis pour ne pas laisser trembler tes mains et à te concentrer sur tout ce qui t'entoure pour ne pas céder à l'angoisse. Le doux roulis des vagues qui lèchent la plage et le bruit plus violent et lointain lorsqu'elles se fracassent contre les falaises. L'iode si présent dans l'air que tu respires le plus lentement possible. Les lumières chaleureuses qui s'allument un peu partout dans la ville, chaque fenêtre illuminée comme un phare pour guider ton chemin.

Après une dernière inspiration, tu entames l'ascension des longs escaliers qui mènent au cœur de la ville.

Avec toi, il n'y a plus que Allen, posé comme à son habitude sur ton épaule, son corps chaud peut-être un peu plus proche de ta tête qu'à l'accoutumé. Il ne t'a pas lâché depuis ce matin. Tu puises un peu de courage dans son soutien silencieux pour terminer le chemin.

La bonne rue n'est pas difficile à trouver. Parmi toutes les informations données dans la lettre, il y avait le fait que la maison n'était pas loin du Centre Pokémon et qu'elle donnait sur la plage. Tu reconnais même la bâtisse pour l'avoir vue en arrière-plan de photos. Une maison typique du style costal, des nombreuses fenêtres laissant entrer la lumière et permettant de profiter de la vue. La façade claire et des touches de bleu un peu partout. Tu te détends assez pour sourire lorsqu'une boîte aux lettres en forme de Wailord t'accueille. Sur une petite plaque au sommet de sa tête, le nom Abbott est indiqué comme une preuve de plus. Le nom de jeune fille de la mère de Gia, celui qu'elle a repris après le divorce.

Tu restes là un moment, la peur t'empêchant de bouger mais un fond de culpabilité te nouant le ventre de te comporter de la sorte. Tu dois sembler bizarre, debout, à quelques pas de la maison. Les lampes sont allumées dans deux pièces. Un peu de fumée s'échappe même de la cheminée. Tu ne peux pas non plus avoir de doute sur le fait qu'il y a bien quelqu'un.

Tu as l'impression que des heures se sont écoulées lorsque tu parviens enfin à faire un pas, puis un autre, jusqu'à atterrir à proximité du pas de la porte. Tu toques trois coups forts avant d'avoir l'occasion de te débiner avant de reculer en vitesse.

L'attente semble tout aussi longue et trop courte à la fois. Tu te tords les mains devant toi, ignorant la voix de ta mère dans le fond de ta tête qui te dit d'arrêter ça. Allen se redresse sur ton épaule en entendant les bruits à l'intérieur, guettant l'approche évidente, avant de sauter sur la boîte aux lettres.

Et puis, la porte s'ouvre et tu es projetée des années en arrière.

Eliza n'a vraiment pas changée depuis votre dernière rencontre. Ses cheveux châtains sont peut-être un peu plus courts et quelques rides doivent s'être glissées autour de ses yeux, mais elle reste cette femme que tu as connue pour la majeure partie de ta vie. Elle occupe tellement de bons souvenirs. Tu as existé à ses côtés durant de nombreuses journées. Tu as ris avec elle, tu t'es confié, vous avez partager un nombre incalculable de repas. Elle reste et restera toujours un pilier dans ta vie.

Ce qu'elle s'apprêtait à dire en ouvrant la porte meurt sur ses lèvres lorsque la surprise la frappe et vous êtes silencieuses durant quelques secondes, à vous observer. Il faudrait sans doute que tu parles, que tu lui expliques ta présence, mais rien ne sort.

« Seiloh ? Mon dieu, ma chérie, que tu as grandi. »

Une fois le choc passé, elle n'hésite plus. Tu te retrouves coincée dans un câlin qui te pousse à te tendre avant que l'habitude ne te fasse fondre dans l'étreinte chaleureuse. Tu la retournes même au bout de quelques instants d'adaptation, la tête allant se poser contre son épaule. Elle t'a manqué. Il n'y avait pas que la présence de Gia que tu avais perdue lorsqu'elle avait déménagé. Au passage, tu avais aussi été privée de sa famille et d'un point de chute où tu pouvais toujours te rendre. Eliza t'a sans l'ombre d'un doute témoigné plus d'amour maternel que ta propre mère. Elle est comme sa fille : solaire et passionnée. Rien d'étonnant donc à ce qu'elle ait si vite réussi à t'apprivoiser lorsque tu étais enfant.

Dans ses bras, tu sens comme une cavité à l'intérieur de toi qui se rebouche un peu. Durant tout ce temps, il y avait eu un manque dévorant que tu t'étais appliquée à ne pas écouter. Un geste tendre est tout ce qu'il te faut pour que tu lui donnes de l'attention et tu te serres un peu plus fort contre elle sans t'en rendre compte. Ce n'est sans doute pas adapté vu que tu ne fais plus réellement partie de sa vie depuis un moment mais elle ne te rejette pas. Au contraire, elle te donne cette proximité dont tu as besoin et tu la sens plus que tu ne l'entends te murmurer des choses, la main glissant doucement dans tes cheveux.

Et, pendant ce temps, ton traître de cœur a l'audace de battre plus doucement, comme si il était enfin satisfait d'être de retour à la maison.

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Apparition d'un Pokémon, s'il vous plaît :3

Un long moment passe. Il te laisse avec l'impression d'avoir ouvert une vanne qui t'a vidée d'une partie de ton énergie mais a aussi emporté beaucoup de résidus émotionnels. Tout ce que tu as vécu depuis ton arrivée à Kalos et bien avant même. La peur, les doutes,... Tu es un peu plus légère lorsque les bras d'Eliza se desserrent finalement et qu'elle t'éloigne doucement d'elle, ses paumes un peu froides venant cueillir tes joues pendant qu'elle efface tes larmes de ses pouces.

« J'ai l'impression que tu as beaucoup de choses à me raconter. »

Tu n'as qu'un hochement de tête timide en guise de réponse. Elle n'a pas tort. Il y a tellement de choses que tu voudrais lui dire mais tu es soudain gênée d'avoir craquée de la sorte. Tu te sens un peu ridicule, sur ce porche, trop de signes pointant l'évidence d'une crise de larmes sur ton visage. Tu recules un peu et passes ta manche sur tes joues et tes yeux avec un peu trop de vigueur pour la tendresse de ta peau mais le léger tiraillement est un bon rappel à l'ordre.

« Entrons. »

La porte est resté béante derrière elle. Elle entre et tu lui emboîtes le pas, surprise lorsque le poids plume d'Allen s'ajoute sur ton épaule. Avec tout ça, tu en avais presque oublié sa présence. Pendant une fraction de seconde, il s'appuie à ton visage dans un signe que tu prends pour du réconfort avant de reprendre sa position habituelle.

« Vas donc t'installer près du poêle pendant que je te fais un thé. Tu as l'air gelé. »

Tu refermes doucement la porte derrière toi et, lorsque tu te retournes, elle a disparu. S'orienter dans la maison n'est néanmoins pas difficile. Le couloir ne desserre que deux pièces avant qu'un escalier ne prenne le relais. Tu vois d'ici le salon, séparé seulement par une arche, mais tu prends ton temps. Aux murs sont accrochés des photographies et tu te laisses tenter par la curiosité de les observer. La famille y est au grand complet sur quelques une avant qu'on ne passe à la période d'après le divorce. Eliza et Gia ne sont plus qu'à deux, parfois rejointes par des figures inconnues. Tu vois ton amie qui grandit d'un cliché à un autre. Son sourire lors de sa première victoire à un concours de coordination. Son père est revenu pour une remise de diplôme au vu du fond. Ils sont bras dessus, bras dessous, l'air heureux, la fosse creusée par la séparation visiblement disparue. Parmi les photos, tu es aussi surprise de te découvrir. Il y a ces vacances que tu as passé l'été avec eux à Alola, une permission exceptionnelle parce que ta mère s'était absentée pour un congrès. Un anniversaire, tu ne sais même plus si c'était le tien ou celui de Gia tellement vous êtes serrées, si petites, en train d'essayer de souffler les bougies. C'est touchant à voir. Encore plus touchant de savoir que tu es restée quelqu'un pour eux malgré la distance. Tu es presque honteuse d'en avoir douté. Sa famille avait toujours été là pour toi, leur absence dans ton quotidien avait simplement effacé leur proximité directe. Même Lionel avait répondu à l'appel lorsque tu avais eu besoin d'un stage pour l'école deux ans plus tôt. Il avait pris de tes nouvelles, avait pris de son temps pour discuter, alors qu'à l'époque les contacts avec sa fille étaient loin d'être aisés.

Tu continues d'avancer et il est surprenant de constater à quel point rien n'a changé. La structure n'est pas la même et beaucoup d'objets et de meubles sont nouveaux, mais cela reste leur maison. Il s'en dégage cette impression si personnelle qui te met à l'aise. Tout est chaleureux, familier. Comme un cocon dans lequel Eliza avait mis tout son cœur et que Gia avait habité avec sa passion.

« Salut Salto. »

Le grand Couafarel est installé sur le canapé et lève paresseusement la tête en te voyant approcher.

« Tu te souviens de moi ? »

Tu tentes, approchant doucement une main paume vers le haut pour le laisser te renifler à sa guise. Le lévrier était déjà dans la famille avant leur arrivée à Kalos, une acquisition faite par Eliza lors d'un voyage. Il prends son temps, te scrute, observe Allen, prends une nouvelle inspiration à proximité de tes doigts, avant d'approcher la truffe pour la frotter à ta peau. Tu te permet de glisser les doigts dans son pelage, heureuse d'avoir été acceptée. Tu finis par t'installer à ses côtés sur le fauteuil après avoir retiré ton sac et ta veste. La position est idéale à proximité de la source de chaleur, le chien connaissant clairement les meilleurs spots dans la maison.

Eliza revient quelques instants plus tard, deux mugs fumant à la main et tu es satisfaite de pouvoir te réchauffer les mains avec celui qu'elle te tend.

« C'est une sacrée surprise que tu m'as fait là.
Désolée, je sais que j'aurais dû pré-
Non, non. Inutile de t'excuser, ma chérie. C'est une bonne surprise. Je suis vraiment heureuse de te revoir, je ne m'y attendais simplement pas. C'est soudain venant de toi. »

Tu comprends le sous-entendu. La soudaineté ne te ressemble vraiment pas.

« Je suis dans le coin avec l'école, alors je me suis dis... »

Qu'une excuse bidon soit la première chose qui te vienne n'est vraiment pas agréable. Tu n'as jamais ressenti le besoin de lui mentir. Ce n'était pas nécessaire, elle avait toujours accepté la vérité comme elle était, au lieu d'en faire un problème personnel comme cela se passait chez toi.

« C'est pas vrai. J'ai quitté l'académie il y a quelques jours. Mes parents ne sont même pas au courant pour... Tout, je suppose ? »

Elle hoche la tête, te pousse à continuer gentiment, alors tu commences à remonter le temps pour elle.

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tentative de capture:

Tu lui racontes presque tout. Les moments de doutes. Ton existence morne et répétitive à l'académie, cette impression de n'aller nulle part, de faire des efforts pour les mauvaises raisons. Ce poids sur tes épaules, renforcé par les années. Les relations tendues avec tes parents et cette impression qu'ils ne seraient jamais capables de te voir toi et non l'image qu'ils s'étaient faite. Ce rôle qu'ils voulaient que tu remplisses, au fond. Tu lui parles de la préparation d'un plan auquel tu ne croyais pas vraiment. Les jours qui s'étaient écoulés et avaient rendu le moment du départ trop réel. Tu avais sauté le pas parce que faire demi-tour n'était pas une option, tu t'en étais assurée. Bien sûr, tu évoques les premiers moments à Kalos et les personnes rencontrées. La gentillesse du vieux couples de l'auberge et les apprentissages de Nick. Le combat contre Violette et ta victoire. Tu lui montres le badge et elle presse une main contre la tienne, quelque chose de fier dans le regard et un sourire radieux aux lèvres. Cela ne rend ce bout de métal que plus important. Naturellement, tu ne dis pas grand chose sur Gia. Juste le minimum et tu ne révèles pas le réel but de ta présence ici. C'est déjà assez gênant, tu ne vas pas avouer ton crush à sa mère.

Eliza prends tout ce qui vient, sans jamais pousser pour plus. Si elle sent que tu laisses des détails sur le côté, elle n'en montre rien. Lorsque tu t'interromps, un peu perdue dans tes histoires, elle repose calmement sa tasse de thé sur la table basse. Dehors, il fait nuit désormais, preuve que tu as parlé plus longtemps que tu ne l'as prévu.

« Même si tout cela a dû être difficile, je te trouve épanouie. La vie a parfois des moyens détournés de nous montrer une voie que l'on envisage pas. »

C'est vrai que tu n'aurais pas pu l'imaginer. Toi, jouant les dresseuses et courant les arènes. La vie de débrouille ne t'emballe pas forcément mais il y a quelque chose de plaisant à te reposer sur toi-même, à faire tes propres choix. Tu es soulagée sans toutes les attentes que l'ont t'a accroché au dos depuis que tu n'es qu'une enfant.

« Quand Gia va apprendre tout ça...
Où est-elle, d'ailleurs ?
Elle participait à un concours à Batisques. Tu la connais, elle en a profité pour prendre quelques jours de vacances là-bas. »

Le nom de cette ville ne t'évoque rien, elle ne doit donc pas être toute proche. Tu as suffisamment étudié les environs pour connaître les plus grosses cités du coin.

Ta déception doit se voir sur ton visage car Eliza rit doucement.

« Ne t'inquiète pas, mon petit doigt me dit qu'apprendre ta présence lui donnera une bonne raison de plier bagages plus rapidement.
Je préférerais qu'elle ne change pas ses plans pour moi. Ce n'est peut-être pas nécessaire de lui dire. Je peux tuer le temps dans le coin jusqu'à son retour.
Ne compte pas sur moi pour lui cacher ça. J'en entendrais parler pendant des jours. »

Elle en rigole mais tu connais assez sa fille pour savoir qu'elle n'a pas tort.

« Tu devrais la contacter toi-même. La surprise lui fera plaisir.
C'est que-
Tu peux utiliser le téléphone de la cuisine. »

Elle n'acceptera donc pas un refus. L'attitude est toute maternelle mais peu déroutante. Eliza est une femme ferme lorsque cela lui prends. Elle a tout de la main de fer dans un gant de velours.

C'est idiot d'être stressée par un simple appel téléphonique alors que tu pensais trouver Gia chez elle lorsque tu es venue frapper à la porte. C'est la même étape, sauf que tu as déjà sauté le cap. Cela ne t'empêche pas de frotter tes mains moites contre tes cuisses, tentant de ravaler la boule qu'on t'a logé dans la gorge. Tu dois juste lui dire que tu es là, rien de plus. Ce n'est vraiment pas grand chose. La grande déclaration attendra qu'elle soit là. Si tu avais su qu'un délai supplémentaire serait pire qu'avoir à te jeter à l'eau...

Tu récupères le combiné, compose un numéro que tu connais par cœur. Ca sonne. Une fois, deux fois, trois fois. A la quatrième tonalité, elle décroche.

« M'man, on s'est déjà parlé ce matin, t'exagère. Je vais bien. »

Silence. Tu es soudain pétrifiée, le discours que tu avais rapidement préparé dans ta tête s'est envolé.

« M'man ?
C'est pas elle. »

Il y a un blanc à l'autre bout du fil avant que la voix excitée de Gia ne vienne à nouveau éclater le silence.

« Seiloh ? Ben merde, qu'est-ce que tu fous là ? Attends, t'appelle bien de chez moi ? T'es à Kalos ?
Longue histoire.
J'veux bien croire. Mais t'es là pour rester ? Tu fais pas que passer juste quand je suis pas là ? Je te ferais la gueule si c'est le cas, tu peux pas me faire un coup pareil.
Non, je peux attendre que tu reviennes. Ca pose pas de problème. Je suis à Kalos pour un moment.
C'est mystérieux ton truc. Pas ton genre. Tu vas tout me raconter.
Quand tu seras là. »

Tu tentes d'être ferme à ton tour, parce qu'il est important que les choses soient dites selon tes termes. Tu as peur qu'en en révélant trop au téléphone, tu finisses par balancer un truc trop suspicieux ou par faire une erreur.

Gia grommelle quelque chose à l'autre bout du fil avant de soupirer. Elle paraît plus résolue qu'agacée.

« Je prends le prochain train. »

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tentative de capture:

Vous parlez pour quelques minutes encore. Malgré sa défaite durant le concours, Gia est enthousiaste. Elle reste satisfaite de sa performance et sait comment s'améliorer. Elle est particulièrement contente que l'un de ses Pokémon participant pour la première fois s'en soit si bien sorti et n'ait pas cédé au stress. Elle parle aussi de Batisques, des endroits qu'elle a visité et de ce petit café où elle a passé une partie de l'après-midi à déguster des pâtisseries. Tout ça te laisse un sentiment étrange. D'un côté, tu t'en veux qu'elle coupe court à son voyage pour toi, de l'autre, il y a cette satisfaction de savoir qu'elle n'a pas hésité un instant pour prendre cette décision. Tu ne vas pas mentir, c'est plaisant comme sensation. Celle d'être choisie, dans le fond. Mais cela ne signifie pas que tu es à l'aise avec cette partie de toi. Tu ne devrais sans doute pas penser de la sorte, aussi humain que cela soit.

Et puis, la jalousie s'en mêle.

« Mathias, le gagnant était si cool. Il ne connaissait personne dans le coin alors on a été fêté sa victoire tous les deux. Tu devrais le voir avec ses Pokémon. Et sa grâce sur la scène. »

Elle émet une sorte de son de gorge qui se rapproche d'un gémissement et son excitation n'en est que plus évidente. Ce n'est pas la première fois que tu l'écoutes parler comme ça. Il y en a eu plusieurs des Mathias et c'est bien normal. C'est soudainement plus compliqué pour toi d'être un public enthousiaste, maintenant que tu es au clair sur tes sentiments.

« Je me suis entraîné ce matin avec lui. Il m'a proposé de lui envoyer une vidéo de ma chorégraphie pour qu'elle soit parfaite pour le prochain concours. »

Ce fond de culpabilité est à nouveau là. C'est injuste pour Gia. Elle n'en peut rien pour ce stupide crush, elle n'est même pas au courant. Au moins, c'est dans ton coin que tu rumines, tu as évité tout commentaire. Seulement, ce n'est pas une attitude avec laquelle tu pourras t'en sortir longtemps, elle te connait trop bien. Elle connait la différence entre un silence attentif et l'un de ceux qui portent le plus de sens. Si elle n'a pas remarqué, c'est parce qu'elle est encore prise dans l'euphorie de ces derniers jours.

Tu es sauvée par l'entrée d'Eliza dans la cuisine. Elle te lance un sourire complice avant de te contourner pour sortir des ingrédients du frigo. La porte de sortie est parfaite, bien qu'elle ne t'ait rien demandé.

« Faut que je te laisse, Eliza commence à préparer le souper et je veux l'aider.
Toujours à jouer les filles modèles. Tu veux prendre des points avant que je revienne, c'est ça ?
T'es bête. »

Encore quelques mots et elle raccroche avec la promesse d'envoyer un sms rapidement à sa mère avec son horaire de retour. Tu n'es pas très à l'aise d'avoir usé d'une telle excuse mais c'est mieux comme ça. Ce n'est pas non plus un mensonge. Il est hors de question que tu la laisses tout faire.

« J'ai été changer les draps dans la chambre d'ami. Ce n'est pas très grand mais au moins tu auras ton espace.
J'aurais pu prendre une chambre au Centre Pokémon... »

Tu tentes, pour la forme. Tu sais pertinemment qu'elle n'acceptera pas une telle idée. Ce n'est pas pour rien que tu n'as pas été faire de réservation en premier lieu et que tu es en train de te laver les mains pour aider en cuisine avec la certitude d'être invitée. Tu as appris à force d'être un membre honoraire de cette famille. Une autre attitude aurait tout d'une insulte à l'hospitalité d'Eliza.

« Ne dis pas de bêtise. Comme si j'allais te laisser dormir là-bas alors qu'on a toute la place nécessaire. En plus, je veux passer du temps avec toi avant le retour de Gia. Vous allez être collées l'une à l'autre dès qu'elle va passer cette porte. »

Elle le dit en rigolant mais tu te prends à espérer. L'idée n'est pas dérangeante. Tu aimerais que ce soit toujours le cas, que la distance n'ait pas trop changé les choses entre vous. C'est un peu idiot quand on pense que tu es venue à Kalos spécifiquement pour les faire évoluer. Il y a néanmoins une différence entre un choix que tu fais, celui d'être sincère, et la vie faisait son œuvre sans te laisser ta chance.

« Tu peux découper les poivrons ? »

Tu hoches la tête avant de prendre place devant une planche et d'attraper le couteau qu'elle te tend. Tu n'as rien d'une pro mais la tâche ne semble pas bien compliquée.

« Je n'ai pas pu m'empêcher de remarquer... Tu paraissais un peu tendue, au téléphone. »

Ce n'est pas un interrogatoire. Elle se soucie simplement de toi, tu t'en rends compte. Tu es même certaine qu'elle ne poussera pas si tu lui réponds d'un simple haussement des épaules, comme pour dire que ce n'est rien d'important. Seulement, tu n'as pas l'habitude d'agir de la sorte avec Eliza. Depuis que tu es enfant, c'est à elle que tu dis les choses. Lui faire des cachotteries n'est pas naturel, qu'importe que vous ne soyez pas vues depuis un moment.

« C'est toujours bizarre de l'entendre parler d'une vie dont je ne fais pas du tout partie. »

Ce n'est pas exactement ça mais c'est vrai aussi. Tu n'es pas encore prête à parler de cette jalousie à laquelle tu ne t'habitues pas encore. Ce sentiment là par contre n'est pas récent. A certaines périodes plus qu'à d'autres, tu as été envieuse de cette vie que ton amie vivait avec d'autres. Sans doute aussi car tu n'étais pas heureuse dans la tienne, encore moins maintenant qu'elle ne faisait plus partie de ton quotidien.

« Je n'aime pas trop avoir ce genre de pensées.
C'est humain, tu sais. Les relations sont compliquées et loin d'être parfaites à chaque instant. C'est aussi comme ça que les liens se renforcent. »

Ne pas être jugée pour ce que tu ressens n'est pas déplaisant mais ce n'est pas nouveau avec elle. Eliza est sans doute celle qui t'a le plus appris à accepter tes émotions sans te flageller pour leur existence.

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Apparition d'un Pokémon, s'il vous plaît :3

Vous êtes au milieu d'un repas rapidement préparé lorsque le texto de Gia arrive. Elle est parvenue à prendre un billet pour le train de nuit du lendemain. Le concours étant assez récent, beaucoup de gens doivent encore quitter Bastiques. Il n'arrivera pas à Illumis avant le début de matinée. De là, elle prendra un bus direct jusqu'à Roche-sur-Gliffe. Elle arrivera donc après-demain. La nouvelle te laisse partagée. D'un côté, tu es soulagée d'avoir un peu de temps pour te préparer psychologiquement, de l'autre, cela te laisse encore plus de temps pour stresser.

« Que dirais-tu de m'accompagner au boulot demain matin ? A moins que tu ne préfères te reposer tant que tu en as l'occasion ? »

Eliza te sort à nouveau de tes pensées. Sa proposition n'est vraiment pas désintéressante. Si la famille a déménagé, c'est parce qu'elle a décroché un poste au centre de recherche rattaché à l'aquarium de la ville. Derrière ses allures de mère de famille tranquille, c'est une sommité au sein du milieu de la biologie marine. Tu as vu beaucoup de photos datant d'avant la naissance de Gia où une jeune Eliza parcourait les régions pour étudier les plus beaux sites aquatiques de la planète. Elle a choisi un travail plus sédentaire pour avoir l'occasion d'élever sa fille, mais il y avait encore eu quelques voyages sur le terrain, en plus des conférences. Généralement, sa tribu bougeait avec elle et tu as même eu la chance d'en faire partie à quelques reprises. C'est comme ça que tu as pu te rendre à Alola pour un été. Ces vacances avaient sans doute été les plus belles de ta vie et pas seulement à cause de la compagnie. Suivre Eliza d'une île à l'autre avait été passionnant car elle aimait partager tout ce qu'elle savait sans en devenir pontifiante et qu'elle t'avait permis de rencontrer des gens tout aussi intéressants.

« Je ne manquerais l'occasion pour rien au monde. »

Tu réponds avec un grand sourire qui t'est aussi vite rendu. Tu ne connais pas grand chose sur la flore marine de cette région. Tu n'en connais pas vraiment plus sur celle aquatique ou même terrestre, en soi. Tu te doutes de l'environnement dans lequel doit évoluer un Pokémon comme ton Grenousse mais cela s'arrête là.

« On ne dirait pas comme ça mais Roche-sur-Gliffe est un lieu très important pour la recherche. Il y a aussi un centre qui se concentre sur l'étude des fossiles qui ont été découvert dans la Grotte Etincelante.
La Grotte Etincelante ?
Un lieu passionnant. Une partie des tunnels est ouverte au public, si cela t'intéresse. On y constate beaucoup d'organismes phosphorescents, en plus d'une grande diversité de roches. »

L'idée est loin de te déplaire. Tu n'as pas encore eu l'occasion de t'attarder sur la beauté de Kalos mais, si tu te poses un peu, il y a des visites que tu pourrais faire. Profiter un peu de ton voyage plutôt que simplement courir d'un point à un autre.

« Peut-être que je pourrais convaincre Gia de m'y accompagner. »

Quoi de mieux que d'explorer avec elle comme à la bonne époque. Tu n'as jamais été une grande aventurière mais tu t'es laissé tenter par quelques expéditions en sa compagnie durant l'été lorsque vous étiez plus jeunes. Tu n'étais pas si difficile à convaincre lorsqu'il y avait des choses à découvrir.

« Elle avait beaucoup apprécié sa visite. Même la route pour s'y rendre fait une belle balade. La vue sur la vallée est imprenable. »

Il est bon d'imaginer la suite, de faire des plans. Ce n'est pas quelque chose que tu as pu faire très souvent dans ta vie. Tout ça à aussi le don de te sortir de ta tête. Tu peux même évoquer ton amie sans penser à ce qui va venir.

La soirée se conclu rapidement. Il est assez tard et vous démarrerez tôt demain matin. Eliza veut que tu puisses voir l'aquarium avant l'ouverture et l'arrivée des touristes. Ce sera donc départ de la maison à l'aube. Vous réglez quelques détails avant qu'elle ne te fasse visiter l'étage et te mène à la chambre d'ami. Ce n'est pas très grand, comme elle l'a dit, mais la fenêtre offre une belle vue sur le front de mer. Tu ne comptes de toute façon pas passer ton temps dans cette pièce.

« On s'en sort pas mal, qu'est-ce que tu en penses ? »

Tu t'adresses à Allen après que Eliza t'ait abandonnée pour se retirer dans sa chambre. Comme à son habitude, il est allé directement se percher sur les oreillers. Il esquisse un geste qui a tout d'un haussement de ce qui ressemble à des épaules chez lui. Tu n'es pas certaine que ce soit vraiment le cas. Tu n'as rien d'une pro en anatomie d'amphibien.

Tu t'occupes de vider ton sac pour te permettre de l'emporter demain sans le superflu. Tu as beau ne pas avoir grand chose, c'est la première fois que tu te poses pour de vrai dans la région. Quoi qu'il se passe, tu ne partiras pas d'ici avant quelques jours. Tu poses tes possessions sur la table de chevet, hésitant un instant avec tes balls. Beck et Polochon n'ont pas encore pris l'air aujourd'hui. Tu te sens quand même un peu gênée d'introduire dans la maison des Pokémon dont Eliza ne connait pas l'existence. Il vaut sans doute mieux attendre pour faire les présentations. Demain, donc. Il faudra aussi que tu envisages un passage au shop du Centre Pokémon pour te procurer de la nourriture. Il y a aussi l'aile du Passerouge dont tu dois faire vérifier l'état. Il devrait pouvoir bientôt voler à nouveau.

La journée s'annonce décidément chargée et ce n'est pas pour te déplaire.

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tentative de capture:

Il fait encore sombre dehors lorsque trois coups sont frappés à la porte. Cela t'arrache au sommeil, ton cœur manquant un battement alors que tu scrutes les environs à la recherche d'un élément connu pour te situer.

« Seiloh, ma chérie, il est l'heure. »

Eliza. L'information t'apaise suffisamment pour permettre aux souvenirs de la soirée précédente de revenir. Il n'y a rien à craindre ici, tu es sans doute dans l'endroit le plus safe que tu pourrais imaginé, entourée de familiarité si tu prends la peine de la chercher.

L'heure correspond à un peu plus de six heures du matin. Tu vérifies, par réflexe, en empoignant ton téléphone juché sur la table basse avant de parvenir à manifester que tu es bien réveillée d'une voix pâteuse. Tu as la sensation de ne pas avoir dormi aussi profondément depuis des jours, voire des semaines. Cela te laisse dans le gaz, presque trop reposée tout d'un coup, si cela est possible.

Dans les couloirs, les bruits de pas s'éloignent et tu es laissée seule avec tes préparatifs. Malgré un manque de motivation certain, une douche s'impose. Déjà, tu aurais sans doute dû en prendre une la veille après ta randonnée forcée mais il était vite devenu évident que dormir était plus important. Peut-être cela aura-t-il au moins le mérite de te réveiller.

Allen ne daigne même pas ouvrir un œil malgré tes gesticulations dans la chambre. Il trône toujours sur les oreilles, un pan de la couverture lui ayant atterri dessus, un détail qui ne semble clairement pas le déranger. Tu lui lances un regard presque envieux avant de finalement te traîner jusqu'à la salle de bain.

Une bonne vingtaine de minutes plus tard, tu es à peine plus alerte. Un bâillement parvient à se frayer un chemin hors de ta bouche pendant que tu descends les escaliers, ton sac accroché à l'épaule et le Grenousse lové dans les bras. Si il a les yeux ouverts, tu n'es pas sûre qu'il soit réellement présent. Être transporté est de toute évidence à son goût, une chose à laquelle tu t'es habituée. Pour un être si vif au combat et déterminé à s'entraîner, il est plutôt paresseux le reste du temps.

Eliza est attablée dans la cuisine, un mug de café fumant entre les mains. Malgré l'heure, elle semble paisible dans la lumière orangée du plafonnier, le regard porté vers l'extérieur, au-delà de la grande fenêtre qui occupe presque tout un pan de mur. Au loin, on discerne à peine la vaste étendue sombre qu'est la mer.

« Il y a du café tout chaud et des céréales dans l'armoire à côté du frigo si tu as faim. »

De toute évidence, ce n'est pas son cas. Tu lui adresses un sourire en passant, ton sac déposé au passage sur une chaise. Tu n'as pas l'audace d'en faire de même avec Allen. A la place, tu le transfères dans un seul de tes bras pour t'offrir un peu de liberté de mouvement. Il te faut fouiller un peu pour trouver une tasse, puis un bol, mais tu te débrouilles au sein de la cuisine. Et, après de nombreux aller-retours, te voilà installée à ton tour. Tu parviens même à draper le Grenousse sur ton épaule dans une forme de compromis qui ne le fait que râler un petit peu.

« C'est étrange de le revoir comme ça. Il était si petit et solitaire à l'époque. »

C'est un détail que tu as vite oublié, Eliza aussi a connu Allen. Elle a sûrement dû participer à sa récupération.

« C'est un développement récent. Sauf pour la taille, bien sûr. »

Il a atteint sa taille adulte depuis un bout de temps, bien que la différence ne soit pas énorme non plus. Ce n'est pas la même histoire qu'au cours d'une évolution. La mère de famille est de toute évidence intéressée par l'histoire derrière tout ça, au vu du regard curieux qu'elle te lance.

« On a pas toujours été très raccords. Problème de communication. Des envies différentes aussi. A l'académie, on était plus comme des sortes de colocataires ? »

C'est bizarre d'exprimer votre relation de la sorte mais ça y ressemble. Vous vous contentiez de vivre ensemble et d'interagir de temps en temps. Chacun s'occupant de ses affaires dans son coin. Que tu sois celle qui payait la nourriture n'était qu'un détail et il était clairement sans importance à ses yeux, au vu de son attitude.

« Venir à Kalos et le fait qu'on ait soudainement plus eu que l'un et l'autre sur qui compter, ça nous a rapproché. Combattre aussi. Je commence à comprendre plus facilement ce qu'il a dans la tête. Je me rend bien compte qu'il a été très patient avec moi pendant toutes ces années. »

Elle prends une longue gorgée et tu en profites pour avaler quelques cuillères de céréales avant qu'ils ne soient complètement ramollis par le lait.

« Sincèrement, je ne pensais pas que ça fonctionnerait. Lorsque Gia m'a parlé de son projet pour ton anniversaire, j'ai vu le désastre arriver. Tu n'as jamais manifesté beaucoup d'intérêts pour les combats, alors un starter... Mais elle est butée, ma fille. Elle était persuadée que c'était ce qu'il te fallait. Que c'était lui qu'il te fallait lorsqu'elle l'a vu. J'ai bien essayé de la diriger vers le petit Feunnec que le professeur Platane proposait ce jour là, une femelle très calme, mais elle n'a rien voulu entendre. Nous sommes reparties avec ce petit gars que l'assistant décrivait comme cette sorte de guerrier qui tentait de faire un adversaire de tous les Pokémon qu'il croisait au laboratoire. »

Elle a un sourire attendri pour la paire que vous formez, le souvenir de toute évidence important pour elle. C'est quelque chose d'en apprendre plus sur ce qu'il s'est passé avant votre rencontre, d'avoir un autre point de vue sur les actions de ton amie. Cela ne fait que créer plus de questions mais qu'importe. Tu commences à t'habituer.

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Apparition d'un Pokémon, s'il vous plaît :3

« Il fait encore froid à cette heure et comme ton bagage n'a pas l'air bien grand. »

Tu termines de lacer tes baskets dans la petite entrée lorsque Eliza vient poser délicatement un sweat-shirt sur tes épaules. C'est vrai que tu n'as pas d'autres vêtements que ceux que tu as sur le dos en ce moment et que ta seule protection contre le froid se résume à une veste légère. Tu penches la tête en arrière pour la remercier d'un sourire avant d'enfiler cette couche supplémentaire. C'est lorsque tu passes la tête dans le col que tu es frappée par l'évidence. Lorsqu'elle t'a donné ce sweat, tu n'as pas réfléchi à sa provenance, tu n'as vu que l'acte en lui-même. Désormais, tu prends conscience et ton sourire s'adoucit alors que tu termines de l'enfiler, le tissu restant un peu trop longtemps à proximité de ton nez. C'est absolument ridicule. Tu n'as plus vu Gia depuis des mois, sept exactement, et le vêtement est propre. Pourtant, tu te sens entourée d'une odeur qui est distinctement la sienne. Il est aussi logique que sa mère pioche dans sa garde-robe pour te prêter quelque chose à porter, tu ne devrais vraiment pas être si étonnée. Mais tu l'es et par de nombreuses choses. Tu as cet air idiot si typique d'une adolescente en crush lorsque tu te souviens que tu n'es pas seule. Tu t'empresses de passer ta veste et, surtout, tu gardes tes pensées pour toi.

Si la propriétaire des lieux était trop occupée par ses préparatifs pour te prêter attention, ce n'est pas le cas de tout le monde. Allen attends près de la porte, un jugement clair dans le regard. Tu as ce réflexe idiot de vouloir lui tirer la langue et tu y cèdes, pour sa plus grande consternation. Il faut croire que, vraiment, cette famille fait ressortir tes aspects les plus enfantins. Sans doute car tu sais que tu en as le droit et qu'ils ne te jugeront pas pour ça. Tu n'as que dix-huit ans, tu es à la fin d'une adolescence qui en a à peine été une et Eliza le comprends. Tu es certaine que ce serait aussi le cas de Lionel et la question ne se pose pas avec leur fille. Elle t'a toujours encouragé à écouter un peu moins la voix de la maturité pour te laisser une chance de vivre. Tu ne penses pas que ce soit une mauvaise chose d'être mature et sérieuse lorsque le temps le demande mais il y a un temps pour tout et, surtout, il faut savoir atteindre un équilibre. Tu le comprends progressivement, du moins.

Lorsque vous sortez de la maison, ton Grenousse daigne tout de même te grimper sur l'épaule pour prendre une position confortable mais c'est sans doute motivé par son envie de ne pas se fatiguer inutilement en montant jusqu'à l'aquarium. Il se trouve assez haut dans les falaises, quelque chose de curieux puisque cela l'éloigne du niveau de la mer. Tu te serais pourtant attendue à ce qu'il profite de la proximité de l'eau pour mettre en place leurs installations.

« Au fait, je voulais te demander. J'ai trois autres Pokémon avec moi, est-ce que ça te dérange si je les laisse sortir dans la chambre ?
Tant qu'il n'y a pas un Galeking dans le tas. »

Elle en rigole mais, pendant cinq secondes, elle te lance un regard pour vérifier qu'elle ne s'approche pas un peu de la vérité. Tu as vite fait de secouer la tête en signe de négation.

« Un Passerouge, un Keunotor, et un Cheniti. Le dernier passe sa vie à dormir, je commence à penser qu'il est en train d'hiberner.
Je vois que tu as déjà fait des rencontres dans la région.
Nos routes se sont juste croisées et ils ont décidé de me suivre. J'ai plus l'impression d'être la première bonne poire qu'ils aient croisé.
Je ne suis pas si étonnée qu'ils aient été charmés. »

C'est plus fort que toi, tu en rougis. Tu n'as jamais su comment accepter un compliment.

« Ils se tiendront bien. Je crois. »

Ce n'est sans doute pas la déclaration la plus rassurante que tu aurais pu faire mais tu ne peux qu'être sincère dans ces conditions. Tu connais pas assez bien ces Pokémon que pour jurer de leur comportement. Jusqu'ici, ils se sont tenu mais cela n'engage pas forcément qu'ils continueront de le faire. Encore une fois, tu ne sais rien de ce Cheniti digne de la Belle au Bois Dormant.

« Ne t'en fais pas pour ça, la maison en a vu d'autres. Gia n'est pas vraiment une dresseuse autoritaire en-dehors des concours, alors, des accidents, il y en a eu et il y en aura encore. »

Etrangement, tu n'es pas si étonnée que ça. Tu avais dans tes dossiers quelques histoires incluant la Pyroli de la jeune femme et des objets divers et variés complètement cramés. Celui qui avait offert une Pierre Feu à une gamine un peu trop excitable avec un Evoli n'avait pas été très bien avisé. Du jour au lendemain, la pelucheuse créature était devenue une source d'expérience et, de façon générale, un problème ambulant.

« Je ferais quand même attention.
C'est tout ce que je demande. Et n'hésite pas à les laisser se balader dans la maison, sincèrement. Salto appréciera sans doute la compagnie. Qu'ils participent au moins aux repas, on a bon stock de croquettes basiques. Tu pourras voir pour un régime spécial avec Gia plus tard. »

C'est quelque chose à laquelle tu n'as pas pensé. Les Pokémon, tout comme les humains, ont des besoins différents. Ils ont des goûts différents aussi, tu as pu le remarquer avec Allen et ces boulettes aux algues dont il est devenu si friand. Tu as beau avoir ta licence de dresseuse et un badge pour prouver de ton aptitude à te battre, tu as encore énormément à apprendre avant de pouvoir prétendre que tu sais t'occuper de Pokémon. Rétrospectivement, tu as vraiment eu de la chance avec Allen.

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tentative de fuite:

L'aquarium paraît encore plus massif maintenant que tu te trouves devant lui. Tout encadré qu'il est par les falaises, il fait plus impressionnant encore. Sa structure, qui ne semble faite que de verre et d'acier, reflète doucement les premiers rayons du soleil en se parant d'une lumière dorée. Tu observes un instant les lieux, scrutes les bannières qui claquent dans le vent, avant de te rendre compte que Eliza t'attend au niveau de l'entrée. Elle tient la porte ouverte, un sourire patient aux lèvres. Tu t'empresses de la rejoindre, les joues un peu empourprées, et un merci qui s'échappe un peu vite lorsque tu te glisses dans le hall. Si tu pensais que vous entreriez par une porte réservée au personnel, tu es détrompée. Pas que tu y penses bien longtemps.

Un énorme tube traverse le centre de la pièce et semble s'étendre jusqu'à l'étage supérieur. Peut-être plus. Tu n'oses imaginer le degré d'ingénierie qu'il a fallu pour construire une telle structure et lui permettre de résister à la pression de cette quantité d'eau. Il y a les Pokémon aussi. De nombreuses espèces sont en train de nager dans un ballet coloré. Tu identifies des Lovedisc et des Ecayon en majorité. Tu repères même un Stari accroché à la paroi de verre. Par réflexe, tu t'es approchée, Allen plus alerte sur ton épaule.

« Attends de voir le reste. Nous n'avons pas pu faire mieux que l'Aquatube mais la performance n'a rien de risible pour autant. »

Tu es toujours un peu distraite lorsque tu lui emboîtes le pas. Passer quelques heures ici à observer ces Pokémon évoluer dans l'eau n'aurait pas été déplaisant. Tu en auras peut-être l'occasion plus tard.

« Ce tank est une entrée en matière. Une façon d'en mettre plein les yeux aux visiteurs avec des espèces plus communes dans les eaux de Kalos mais beaucoup d'environnements ont été recréés. »

Eliza vous fait passer d'une salle à une autre. Les ambiances et les couleurs changeant diamétralement.

Derrière une paroi de verre courant sur de nombreux mètres, une zone d'eau douce se découpe tout en vert et en brun dans la première salle. Des Tarpaud s'y éclaboussent sous le regard vide d'un Psykokwak. Une famille de Gobou paraît somnoler dans un bain de boue réchauffé par un rayon de soleil. Des Axoloto jouent pendant que des Maraiste conversent à proximité. C'est tout un petit monde qui a commencé sa journée.

Ensuite vint le bassin tropical. Des Rosabyss se perdent au milieu des Luminéon, des Otaquin font des bulles qui servent aux cascades de leur évolution, les Viskuse agitent leurs dentelles au bon vouloir d'un couple de Moyade très royal.

« Ce n'est pas trop difficile de faire cohabiter autant d'espèces ? »

Tu questionnes pendant que vous passez devant un autre aquarium tropical à la faune plus ou moins similaire. Seules quelques espèces ont été changées pour d'autres.
Eliza rit un peu, une main couvrant élégamment sa bouche.

« Oh que si. Il y a eu de sacrés casse-têtes à résoudre au début. »

Elle s'approche de la paroi de verre sans la toucher pour désigner un petit Pokémon occupant le fond. Tu l'imites, curieuse.

« Tu vois cette créature turquoise et mauve ? C'est un Vorastérie. Une espèce originaire d'Alola. Ses capacités sont prodigieuses mais ce n'est pas un Pokémon facile. En plus, il se trouve être très friand de Corayon. On considère qu'ils sont responsables de leur disparition à Galar, après qu'ils aient été introduit là-bas par des gens peu soucieux. Tu t'imagines donc bien qu'on ne laisse pas ces deux là dans les mêmes eaux. Il y a aussi le cas de Denticrisse qui est l'un des seuls prédateurs des Vorastérie. Comme la vie est bien faite, ils n'intéressent heureusement pas aux Corayon ce qui nous a permis de les rassembler. »

Tu te souviens de ce Pokémon. Denticrisse. Vu son physique, cela serait difficile. Tu n'avais fait qu'en voir un durant un bain de mer. Malgré cette dentition et cet espèce de sourire terrifiant, on le disait particulièrement utile auprès des sauveteurs car on le disait capable d'éloigner tous ces congénères aquatiques d'un crissement de dents stridents.

Alola t'avait impressionné plus encore pour ça. Leur façon de vivre en harmonie avec les Pokémon était unique au monde. Chaque région leur avait fait une place mais jamais un tel degré.

« La vie trouve aussi toujours une voie. Pour en revenir à nos Corayon, dire qu'ils ont disparu de Galar n'est pas totalement juste. Ils ont évolué dans le sens le plus pur du terme. Ils ne ressemblent pas à ceux que tu vois ici. Ils ont même perdu leur type Eau. Des Spectres, voilà ce qu'ils sont devenus. Ce n'est pas tous les jours que nous avons l'occasion d'étudier les formes passées des fantômes qui peuplent nos contrées.
Vous en avez ? »

Ton intérêt est évident. Les Pokémon Spectre ont toujours occupés une place spéciale dans le folklore. Parfois, il est difficile de les placer au même rang que les autres créatures, à d'autres ils semblent tellement vivants que s'en est perturbant. C'est un sujet sur lequel tu aimerais en apprendre plus.

« Malheureusement nous n'avons pas encore réussi à en acquérir un pour nos recherches. Les autorités de Galar sont très soucieuses de leurs espèces régionales. »

Une émotion passe dans ses yeux, sa bouche formant une moue légère. Tu sens qu'elle aurait d'autres choses à dire, peut-être une critique à formuler sur la région voisine. Tu as beau être curieuse, tu comprends qu'elle ne le fait sans doute pas pour une bonne raison et que pousser ne l'aidera pas. Tu gardes donc tes questions sur le sujet pour toi.

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Crabicoque lance Eclate-Roc (première utilisation).
Apparition d'un Pokémon, s'il vous plaît :3