Assis sur le rebord de la fenêtre de ma chambre, j’observe la vie de Vergazon. Le vent s’est levé, les nuages passent plus vite au-dessus des toits. Ils sont un peu bas, d’ailleurs, la météo a prévu de la brume pour l’après-midi. Une voisine regarde le ciel depuis son perron, sa panière de lessive entre les mains. Sûrement se demande-t-elle si l’étendre dans son jardin est risqué ou non. Cette famille a installé deux piquets en forme de T dans leur terrain, entre lesquels ils sont tendu des cordes assez solides pour pouvoir y étendre le linge. Nous pourrions avoir la même chose, Raven en a déjà parlé si ma mémoire est bonne. Peut-être qu’Eric pourra procéder à l’installation, lui qui s’est pris de passion pour les bricolages en tout genre ces derniers temps. Le cri de plusieurs nirondelles me détourne du linge. Elles arrivent en masse, à l’image des nuages rapides. Des nuées de pokémons oiseaux s'apprêtent à migrer pour l’hiver. Comme il fait encore doux, j’ai tendance à oublier que nous sommes bientôt l’automne. Certains pokémons domestiques du voisinage poussent des cris à l’attention des volatiles. J’entends particulièrement le patachiot qui vit une rue plus loin. Il a beau être petit, il a beaucoup de coffre. En cherchant sa maison du regard, je croise un cartable qui n’a rien à faire là, puisque c’est l’heure de l’école. Ils sont plusieurs vagabonds, séchant les cours sans se soucier des conséquences au vu de leurs jeux. Ils courent, sautent, passent de l’autre côté d’une clôture barbelée pour aller dire bonjour aux écremeuhs. Ils doivent souvent le faire, car les pokémons les accueillent avec enthousiasme et la douceur qui est de mise avec les enfants humains. Chacun semble avoir sa préféré. Je ne dois pas passer assez de temps là, perché sur ma fenêtre, puisque je ne les ai encore jamais remarqués. Peut-être que si je me perchais encore plus haut, je parviendrai à voir plus de la vie de Vergazon.

D’un geste, je lance mes jambes pour qu'elles reviennent du côté de l’intérieur de ma chambre. La parquet de notre vieille longère grince moins sous mes pas depuis quelques jours. Après avoir enfilé mes baskets les plus stables, je prends la direction du grenier. Il n’y a personne d’autre que moi dans la maison pour le moment. Eric finalise des travaux dans la grange et Raven est parti faire quelques courses. Quelques pokémons se promènent dans le jardin, mais il n’y en a aucun à ma connaissance dans la maison. En tout cas, depuis l’étage, je ne les entends pas.
Bientôt, j’arrive sous la trappe qui mène au grenier. Je m’empare de la perche munie d’un crochet que nous laissons contre le mur et l’ouvre sans difficulté. De la poussière me tombe sur le visage, ce qui me fait éternuer. Cela fait longtemps qu’aucun d’entre nous n’est allé là. La porte la plus proche du grenier mène dans une toute petite pièce qui nous sert d’espace de stockage. C’est là que nous rangeons l’escabeau qui nous permet d’accéder aux combles de la maison. En quelques marches, je m’élève d’un étage et me voilà dans le grenier.

C’est un grand espace qui courre tout le long de la longère. J’y retrouve des vieux outils dont je ne peux que deviner l’utilité, témoin de l’ancienne fonction agricole de ces lieux. Il s’agit de pièces que l’on pourrait retrouver dans des musées d’ethnographie afin de nous présenter “la vie d’avant”. Ils me fascinent et je ne peux habituellement m’empêcher d’y toucher lorsque je me rends au grenier. C’est d’ailleurs souvent la raison pour laquelle je viens ici. Aujourd’hui cependant, j’ai autre chose en tête.
Je me dirige vers la fenêtre tout au fond du grenier. Elle est très grande, ce qui permet de faire entrer le soleil en ces lieux. J’ai remarqué lorsque nous avons emménagé qu’un ancien système de poulie était incrusté dans le mur juste au-dessus de cette ouverture alors j’imagine que cet endroit servait d’antan d’espace de stockage et que l’on se servait de ce dispositif pour y parvenir.
Les gonds de la fenêtre grincent lorsque je l’ouvre. Ils sont aussi anciens que la maison, marqués par le temps, mais toujours solides. Le bois du cadre frotte contre le mur en pierre et je dois insister pour parvenir à mes fins. L’extérieur est désormais à ma portée. Depuis là, je suis sûr et certain que je peux monter sur le toit.