Juste avant que mon archéodong me bouche complètement la vue, j’ai croisé son regard. Elle était bien là, avec lui, dans les premiers rangs du public. Elle semblait fascinée. Toutes peurs avaient quitté ses yeux. Dans le public, je ne voyais plus qu’elle. Et vaguement lui. Elle s’était levée avec les autres pour m’applaudir à la fin de la prestation, encore une fois lors de l’annonce des résultats. J’avais gagné. Plus important encore, même si elle ne savait pas qui j’étais, maman m’avait vu réussir.
Le reste des évènements post-prestation est assez flou dans mon esprit. Je sais avoir un peu échangé avec les jurys, également avec Suika. Ensuite, Rose et Aram m’ont célébré dans les coulisses et je peinais à avoir une réaction. J’étais dans une sorte d’état second, comme si je ne réalisais ni où j’étais, ni ce qu’il se passait. Je me sentais assommé. A un moment, on est venu me voir pour une interview, mais Rose a fait comprendre qu’il fallait écourter car je n’étais pas dans mon assiette. Elle a rappelé le combat à venir, pour lequel je devais me préparer, et a appuyé sur le fait que j’étais un peu malade avant la prestation. Je ne suis pas sûr que vomir de stress soit une maladie, mais avec le recul je la remercie de son intervention. Je ne sais plus du tout ce que j’ai pu raconter lors de l’interview.
Après ça, Rose était partie nous chercher de quoi grignoter en attendant le repas. Aram et moi sommes allés dans notre chambre d’hôtel. J’avais demandé à esquiver les invités, ceux pour qui j’avais demandé des places dans les loges. A ce moment-là, je ne me sentais pas en état de leur parler, ni même d’avoir honte de ne pas le faire. Dès que nous nous sommes retrouvés seuls, je suis tombé comme un poids mort dans les bras d’Aram et suis resté blotti là longtemps, bien après que Rose soit revenue. J’avais eu besoin de ça pour assimiler les événements de la journée, pour qu’une partie de mon stress s’évacue et que je réalise pleinement la présence et l’enthousiasme de ma mère.

Plus tard dans la soirée, nous avions rejoint nos invités. C’était un mélange particulier entre les parents de Rose, sa grand-mère, mes collègues et la famille d’Aram. Forcément, tout le monde avait beaucoup parlé de moi et de ma prestation. J’en étais très gêné, détestant toujours être ainsi le centre de l’attention et ayant du mal à admettre que ce que j’avais fait pouvait être si bien que ça. En même temps, je ne me sentais toujours pas vraiment “là”. J’avais du mal à réaliser que c’était de moi qu’il s’agissait et que, le lendemain, je serais à nouveau en direct, mais avec un autre type d’épreuve - tout aussi horrible au demeurant.

Même après une longue nuit de sommeil, je ne crois pas avoir pu gagner lors d’un duel de coordination contre Suike, une maître dans le domaine. Moi, l’abruti bourrin sans culture. Peut-être Rose et Aram ont-ils raison finalement, peut-être ais-je vraiment du potentiel en tant que coordinateur. Pas que ça me donne envie de poursuivre ceci-dit : je ne suis pas fait pour être sous le feu des projecteurs.

Cette nuit, j’ai rêvé de mon père. C’était la reconstitution de ce que j’ai vu dans le public. Je pensais ne pas avoir fait attention à son visage, mais mon rêve me l’a retranscrit aussi clairement que s’il se tenait à seulement un mètre de moi. Il souriait, plein de fierté. Je crois qu’il pleurait, je n’en suis pas certain. Peut-être est-ce une image inventée, reconstitution idéalisée sur base de mes désirs. Après tout, lorsque j’hallucinais à cause de la brume des rêves, c’est toujours lui que je voyais. Toujours lui que j’appelais à l’aise sans qu’il vienne me sauver. Peut-être faudrait-il que j’essaye d’aller lui parler. Rose leur a aussi envoyé des invitations pour le combat.
Nous verrons, en fonction de mon état suite au combat. Je m’étonne d’ailleurs d’être aussi calme alors que j’appréhende cette étape au moins autant que la précédente. Avec l’aide précieuse d’Aram, je me suis amélioré, mais la vérité est que je reste peu doué dans cette discipline. En plus, le règlement de l’Elite exige que ce soit un combat duo, ce qui rend les choses encore plus complexes pour moi. En exploration, l’instinct joue beaucoup et mes pokémons savent improviser. Ici, je vais devoir les diriger tous les deux, en même temps, tout en gardant une vision globale du combat. Je crois bien être encore moins confiant que pour la prestation. Ca va être une catastrophe.

D’ailleurs, en parlant de catastrophe, il faut que je regarde mon interview de la veille. C’est pas l’envie qui m’étouffe, mais je suis d’accord avec Rose : il est important que je sache ce que j’y ai dit pour aujourd’hui. Il y a aura sûrement un autre moment de questions-réponses, que je perde ou non. Alors je profite d’un moment de solitude après le petit-déjeuner pour visionner ça sur Youtube.

Journaliste : Monsieur Aésselém, félicitations pour votre victoire ! Il vous reste encore le combat demain, mais qu’avez-vous pensé de cette première expérience à l’Elite ?
Moi : Horrible. J’ai tout fait pour éviter de monter moi-même sur scène. Heureusement que ça ne durait pas longtemps.
Journaliste : … Ah bon ! C’est une réponse originale. Pouvez-vous nous en dire plus sur votre prestation ? Qu’est-ce qui vous a inspiré ?
Moi : Le thème.
Journaliste : Ahah, en effet ! Mais encore ?
Moi : Euh… Les films de science fiction je suppose ?
Journaliste : C’est vrai que vos prestations sont souvent très inspirées du cinéma ! Et qu’est-ce qui vous a fait choisir votre archéodong et votre mushana ? Juliette et Améthyste si je ne me trompe pas.
Moi : Elles allaient bien avec l’idée.
Journaliste : On a souvent vu votre mushana en prestation, il doit bien y avoir une raison de plus au moins pour elle, non ?
Moi : Non.

Je mets l’interview en pause quelques instants et me prends la tête dans les mains. C’est un désastre. J’ai l’air complètement ailleurs. Le seul point positif c’est que j’ai réussi à ne pas parler de la vraie raison pour laquelle Améthyste est souvent en prestation. Il n’y aurait plus manqué que ça, que je parle de mes anciens problèmes d’addiction devant tout le monde !.. J’espère qu’ils n’iront pas creuser dans mon passé.

Journaliste : Et qu’avez-vous pensé de la prestation de Suika Kobayashi ? On peut dire qu’elle maîtrise son art !
Moi : Ouais c’était cool.
Journaliste : ... En effet, c’était cool.

La honte. La honte la plus totale.
Heureusement, cela ne dure plus très longtemps. J’imagine que c’est à ce moment-là que Rose est intervenue pour mettre fin aux souffrances de la journaliste.

Journaliste : Une dernière question ! Comment envisagez-vous le combat de demain ?
Moi : Comme une catastrophe.

Cette dernière réponse résume bien l’interview. Je n’ose pas aller sur les réseaux sociaux pour voir ce qu’on dit de moi, même si dans le fond je reste curieux des retours concernant ma prestation. Si le jury a estimé que je méritais de gagner, c’est qu’elle doit valoir quelque chose. Seulement, là, entre la tête de robot que je tire du du long et mes réponses, je dois encore être devenu la risée du net.

Heureusement, Aram et Rose sont là pour me changer les idées et m’aider à ne pas trop stresser jusqu’à ce qu’il soit temps de me préparer pour le combat.

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Je suis parti avec un peu d’avance pour avoir le temps de m’isoler dans la salle de préparation avec mes pokémons. Ils doivent de toute façon passer un dernier check médical avant que nous puissions entrer dans l’arène. Me retrouver seul avec eux refait monter la pression. Angel, ma grondogue, se fiche un peu de tout ça. Elle le prend comme un jeu pour me faire plaisir. Les autres par contre… Ma tranchodon a des attentes, elle veut montrer sa force. Ma mushana est plus tranquille, mais je sens qu’elle espère une bonne coordination entre nous. Logique après tout ce qu’il s’est passé. Et Rubis… Pour lui c’est un rêve qui se réalise. Mon dracaufeu se prête docilement à l’examen médical, mais ne me quitte pas un seul instant des yeux. Son enthousiasme est palpable. Sa gueule, quand il l’ouvre, luit des flammèches qu’il retient au fond de sa gorge. Il s’est tellement entraîné, bien plus que tous les autres, pour développer ses capacités malgré les contraintes que lui imposent son corps mal évolué. Je ne peux pas me rater, je ne peux pas le décevoir.

On m’annonce que tout est bon avec mes pokémons et que je pourrai me rendre dans le stade d’ici une quinzaine de minutes. Je renvoie Angel, Opale et Améthyste dans leurs pokéballs respectives, restant seul avec mon starter. C’est lui qui rentrera dans le stade avec moi. Le putain de stade. Au moins, le public de la prestation avait le mérite d’être un peu dans l’obscurité. Ici, tout sera au grand jour. Je me souviens de ma première visite à la Ligue, Aram m’avait fait visiter le stade. Il était vide, et pourtant quand je me suis retrouvé sur le terrain j’ai senti une pression immense, jusqu’à m’en faire tourner la tête, car j’imaginais ce que ça ferait s’il était plein. Je baisse la tête, me demandant comment je vais faire pour ne pas m’enfuir.
Rubis capte mon stress - il a l’habitude - et me donne un coup d’aile dans l’épaule. Il m’adresse quelques grognements provocateurs, je lui rend son coup. A la suite, nous commençons à nous chamailler comme on a l’habitude de le faire jusqu’à ce qu’il pose son front contre le mien.

- ... Ouais, ouais. Ca va le faire !, je lui adresse un pouce en l’air.

Ma réponse le satisfait, il se redresse et se tient bien droit, tourné vers la porte par laquelle il sait qu’on va venir nous chercher. Moi, je fais semblant d’avoir retrouvé de la contenance, pour son bien. En vérité, chaque minute qui passe me terrifie un peu plus. Quelle idée de merde d’avoir voulu venir ici tout seul ! Aram et Rose auraient pu me distraire s’ils m’avaient accompagnés. Il faut que je revois mes stratégies pour me rassurer, je sais qu’on en a travaillé tous les trois en prévision !... … Putain j’ai oublié.

- Monsieur Aethèlm ? Nous pouvons y aller !, annonce un homme qui vient de franchir la porte.
- Non, non !

Malheureusement, le rugissement d’euphorie de mon dracaufeu couvre ma voix tandis que lui se précipite directement dans le couloir. Alors qu’il ne sait même pas où il va. Je me mets à lui courir après, suivi par le membre du staff qui essaye de nous donner la bonne direction.

- Rubis tu fais chier !

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Les portes du stade sont sur le point de s’ouvrir. Je m’appuie sur l’aile de Rubis pour me tenir droit. De l’autre côté, j’entends déjà la cacophonie du public qui attend, ne préférant pas imaginer ce qu’il en sera lorsqu’ils se mettront à crier. J’ai peur. De tout. Des regards qui seront portés sur moi, de mes performances en combat, de décevoir nos invités, Aram, Rose et surtout Rubis. Peur de ne pas réussir à diriger mes pokémons, peur de ce qu’il va se passer pendant l’affrontement. C’en est au point que je me soucie de mon apparence. Rose m’avait dit d’attacher mes cheveux, je ne l’ai pas écoutée, mais et si les attaques faisaient un tel bordel qu’ils se mettaient à ne plus ressembler à rien ? Vite, je me rappelle que j’ai un élastique et les attache en un chignon bas bordélique qui ne doit pas avoir l’air de grand chose. Au moins, le ton sera donné et ça reste raccord avec ma tenue. Là non-plus, je n’ai pas écouté ma meilleure amie. Marre. Je ne me suis pas changé dans les coulisses avant de venir comme elle me l’avait ordonné. Un jogging noir, des baskets et un t-shirt Indiana Jones, c’est bien le seul point sur lequel je suis à l’aise…

La porte grince et le stade se dévoile petit à petit devant moi. J’ai un mouvement de recul, mais Rubis me pousse vers l’avant avec sa queue. C’est avec la démarche du mec le moins à l’aise du monde que j’entre dans l’arène. Le public se met à crier, comme dans les matchs que j’ai pu voir à la télé. J’essaye de les regarder, dans les gradins, mais ma vision se trouble. C’est insupportable. Comment Aram fait pour survivre à ça ? Alors je regarde mes pieds, ça aide à marcher droit, et ne m’arrête que quand j’atteins l’espace où je dois me tenir pour le combat.
Je retire toutes les comparaisons que j’ai pu faire, c’est bien pire que la prestation. Qu’est-ce que je fous là ? Et le public qui continue de crier…

- Mais fermez vos gueules, bordel…

Avec le bruit, personne ne m’entend. Tant mieux.

RUBIS Dracaufeu Y s - M lvl 60 (0/4) statistiques: attaques:	AMETHYSTE Mushana - F lvl 60 (0/4) statistiques: attaques:
OPALE Tranchodon - F lvl 60 (0/4) statistiques: attaques:	ANGEL Dogrino - F lvl 60 (0/4) statistiques: attaques:

Objets:

« Comme une catastrophe... Horrible. Comme comme comme une catastrophe. Horrible. Cata. Cata. Com. Comme une... C'était cool. Horrible.
- Eléanore, tu peux couper ça ? »

« Aaah attends, c'est le meilleur moment !
- Mais tu l'as déjà écouté 150 fois, allez !
- Bon ok... »

« J'espère qu'il ne l'a pas mal pris, s'il l'a entendu...
- Tu n'auras qu'à lui faire écouter à la fin du combat ?
- Je crois que je vais me passer de tes conseils avisés aujourd'hui...
- Quoi, je ne vais même pas avoir le droit de te parler de la tenue ?
- OK... Il y aura peut-être une exception. »

« Je me passerais bien d'une robe longue, ce n'est pas pratique pour être en combat...
- Ce n'est pas comme si c'était toi qui allais descendre dans l'arène !
- Allez montre-moi tes choix...
- Fais pas la grise mine, j'ai quand même pensé à toi. »

« J'y pense, ils pourraient quand même faire le minimum d'au moins bien prononcer son nom quand même...
- Quel nom ?
- Ben tu sais, celui d'Illia Ae... Oh je vois ce que tu veux faire. J'ai pratiqué, moi, madame, pour bien le prononcer le jour J. Même si j'aurais dû en parler à Suika...
- Et je parie que tu vas quand même lui dire de t'appeler par ton prénom pour pouvoir faire pareil avec lui.
- Touché... »

« Je n'en prendrai pas, merci. La dernière fois, j'ai dû me retenir pendant deux heures, c'était horrible. »

« Déjà en train de jouer ?
- Tu as besoin de quelque chose ?
- Non.
- Alors oui ! Je cherche toujours variable en huit lettres... »

« On y va ? Tu préfères venir avec moi ou rester ici ? Je devrais te faire passer dans la Pokéball le temps du match... »

« Allez, vendu. Il faut bien que la star soit là après tout ! »

« Aaah Caly, la veste !
- Ben quoi ?
- Faudrait pas trop l'abîmer, on doit la rendre après...
- Je suis sûre qu'avec Lily dessus, elle prend de la valeur, t'en fais pas ! »

« Bonjour Monsieur Illia Ael... Aethelelm ! Je suis Calypso Kanaloa, vous pouvez m'appeler Calypso. Ravie de vous rencontrer. »

« Je vous présente Lily, elle m'accompagne seulement jusqu'ici, votre Dracaufeu est magnifique. »

« Allez Lily, à tout à l'heure. »

« Bon courage Illia, je vous souhaite le meilleur ! »

C'est partiiiiiiiiii !:

Bien sûr, les acclamations du stade ne se calment pas. Ils sont en attente de l’arrivée de mon adversaire. J’aurais beau gueuler à mon tour pour leur demander de se taire que ça ne changerait rien. Il faut m’habituer, au moins le temps de ce combat, car je suis sûr que ça va recommencer à chaque action. Alors moi aussi je me concentre sur la personne que je suis censé battre aujourd’hui si je veux réussir le défi de l’Elite. Il n’y a que deux options, soit Archambaud Maistre, soit Calypso Kanaloa. Le premier je connais bien à travers ses films, la deuxième Rose m’a forcé à m’y intéresser pour aujourd’hui histoire que je n’écorche pas son nom comme je l’ai fait avec Suika. Il paraît que c’était la honte, comme si ça avait pu sauver mon image alors que j’étais en train de manquer de faire un malaise d’angoisse devant elle.
Les portes de l’autre côté du stade finissent par s’ouvrir et les spectateurs se gueulent encore plus fort. Je ne peux m’empêcher de lancer un regard noir à l’attention des gradins avant de m’avancer vers mon adversaire comme on m’a indiqué de le faire à ce moment-là. Il s’agit de Calypso Kanaloa. Ce serait mentir que de dire que je ne suis pas un peu déçu. Quitte à être obligé d’être ici, j’aurais préféré pouvoir échanger quelques mots avec un acteur dont j’ai beaucoup aimé certains films. Enfin, ce n’est pas non plus comme si j’avais eu des attentes avant que les portes s’ouvrent. En fait, je n’y avais même pas réfléchi.

Mon regard suit la phyllali aux feuilles roses lorsque cette dernière saute de l’épaule de sa dresseuse. Rubis, qui me sert toujours de soutien, louche aussi dessus. Il doit se demander si elle sera une des combattantes du jour. Moi, je pense surtout à la phyllali de Rose et à quel point ma meilleure amie adorerait rencontrer un spécimen qui arbore une de ses couleurs préférées. C’est trompeur, avec son prénom et ses cheveux teints en rose, mais comme moi sa préférence va au rouge.
Ce n’est que lorsque la maîtresse coordinatrice prend la parole que je relève les yeux vers elle. La politesse, c’est toujours pas aujourd’hui que ce sera gagné visiblement. Surtout qu’entendre sa voix me refait monter en pression. Le stade, le public, mon adversaire… Je vais vraiment devoir me battre dans le brouhaha et devant des milliers de personnes. Les couleurs que l’agacement m’avaient permis de retrouver se font la malle et je redeviens blème.

- Ok ça me va les prénoms, Aelaethelelm on me l’avait encore jamais faite. Ca a quelque chose d’amusant qui me décrispe un tout petit peu. Enchanté Calypso.

Par contre, je ne parviens pas à lui rendre son sourire. Mes lèvres se pincent dès que je ne parle pas et le public m’irrite à nouveau. Ca se voit sur mon visage, mais en même temps… Ils sont obligés de réagir comme si c’était la rencontre du siècle ? Je lance un nouveau regard assassin aux gradins, ceux derrière la maîtresse coordinatrice, avant de répondre à sa main tendue. Au moins, le fait d’être énervé m’aide à réagir, même si je sais que ça ne va pas du tout m’aider pour le combat.

- Merci, il s’appelle Rubis, ce dernier répond au compliment que lui adresse Calypso par un grognement fier. Et votre Lily est très mimi… ‘Fin mignonne ! ‘Fin elle a l’air chouette quoi !, allez c’est parti je m’embrouille et je bafouille. Mon visage retrouve le rouge de la gêne. Je suis content de pas avoir à taper dessus.

Heureusement pour moi, nous devons vite nous rendre sur nos plateformes respectives, ce qui m’empêche de m’enfoncer encore plus face à la championne. Ce n’est pas que j’avais espéré réussir à rester digne cette fois, mais j’aurais au moins aimé ne pas donner une image pire que celle que j’ai dû laisser à Suika. Ceci-dit, après l’interview d’hier… La honte, j’espère vraiment ne jamais avoir à la revoir ou la ré-entendre. Et il ne faut surtout pas que je pense à celle qui aura lieu après le combat, car c’est sûr et certain qu’on ne va pas me lâcher.

Rubis donne de grands coups d’ailes pour arriver en premier sur la plateforme où il fait encore une fois le fier. Au moins un de nous deux qu’est content d’être là ! Le temps que j’arrive, je vois que du côté de Calypso sa phyllali a disparu. Et maintenant quoi ? Il faut attendre le signal de l’arbitre je crois. Alors je mets les mains dans les poches de mon jogging et je reste comme ça, histoire de ne pas avoir les bras ballants. Le stade s’étale devant moi comme une mer infinie au milieu de laquelle je serais perdu. Le public est une nuée de sharpedos dont les cris sont les mâchoires puissantes qui ne demandent qu’à me bouffer tout cru. C’est insupportable de les avoir tous en pleine lumière, comme ça. Il est où l’état second ? Je peux retourner dans l’état second ? Mon dracaufeu me donne un coup de patte dans le haut du dos, histoire de me secouer un peu.

- Arrête c’est pile là que je tombais hier pour la presta ! Ca fait m-Ah !, je sursaute lorsque la voix de la championne résonne dans mon oreille. Bien sûr, on m’a expliqué l’oreillette, mais je l’avais un peu oubliée. La politesse veut que je lui réponde, alors j’active à mon tour le mécanisme : Merci d’être optimiste, mais qu’est-ce que je viens de dire ?!

Pas le temps de me rattraper, l’arbitre annonce le début du combat dans trente secondes, le temps de nous emparer de nos pokéballs. Le public se déchaîne à nouveau, alors qu’ils ne font qu’attendre. Et je suis censé supporter ça tout le temps d’un combat ? Il faudrait les ignorer, mais ce serait comme me demander de ne pas faire attention au ramboum qui me gueule dans l’oreille.

- Euh, dîtes, Calypso…, je suis mal assuré, gêné de demander ça, mais je ne vois pas vers qui d’autre me tourner pour mieux me préparer psychologiquement. Le public va être comme ça tout le long ? Ils se taisent jamais ?