Ca me soulage que le sujet de conversation soit détourné par le goût de nos boissons. Comme ça, j’ai pas à répondre aux suppositions de Lenny comme quoi mes pokémons peuvent gérer en combat s’ils sont bons sur le terrain. Pas envie d’avoir à admettre ouvertement qu’ils sont nazes car je le suis aussi. Même si j’ai commencé à plus sérieusement m’entraîner, notamment grâce à Aram, c’est pas fou pour le moment. Je retombe vite dans mes vieux travers.
Lenny m’annonce le goût de sa boisson et ça me ferait presque regretter mon choix. Ca a l’air bon, et peut-être plus fruité que la mienne malgré la pomme.

- Pas mal en effet !, sa remarque sur mon céleri me fait hausser les épaules. J’ai l’habitude des mélanges chelous, et de bons souvenirs des fois, rares, où ma mère cuisinait ses mixtures d’apothicaire.

Comme il a vraiment pas l’air convaincu par l’idée de ma boisson, je lui propose pas de goûter pour pouvoir faire de même avec la sienne. Déjà qu’il y a des gens que la pratique dégoûterait, si en plus le goût le branche pas, je vais même pas tenter. Du coup je lui parle de ses pokémons, toujours pour essayer de détourner l’attention des miens, surtout après le constat d’Angel qui bave allègrement sur le sol en mangeant sa madeleine. Ca va que je peux utiliser l’excuse de sa jeunesse !
J’apprends que Lenny possède aussi une duralugon. Si je me trompe pas, c’est le pokémon dragon en métal un peu carré. Je trouve qu’il ressemble un peu à une fusée. Il me dit aussi avoir passer des arènes. Combien, j’en sais rien, mais ça confirme qu’on a pas du tout le même niveau. J’ai jamais tenté les arènes, mais pas besoin d’être un génie pour prévoir que ce serait un fiasco. A la limite la première, peut-être, avec de la force brute, mais la suite c’est même pas la peine d’y penser.

- Si t’as réussi à avoir des badges, c’est que tu dois pas t’y prendre trop mal. T’en as combien ?

Je suis curieux et m’attend à un truc de dingue à tout moment. Comme quand Rose m’a appris, au détour d’une conversation banale, qu’elle possède tous les badges de la région. Comme si c’était normal et un truc que n’importe qui peut accomplir. Certes, je savais qu’elle était forte, très forte même, mais tout de même ! Et elle osait me dire que je me débrouillais bien, parfois, alors que si un de ses pokémons souffle sur un des miens y plus personne. Même Baby - je vais jamais me remettre de ce surnom - son ursaking, acquis récemment, est déjà une bête de compétition.

- Euh… Ca dépend aussi ?, j’arrive pas à savoir s’il me questionne vraiment sur les dangers ou essaye de revenir à l’entraînement de mes pokémons. Je prends le temps de réfléchir en mangeant. je dirais qu’on s’en sort comme un peut, surtout. C’est difficile de prévoir ce qui va nous tomber dessus parfois. On a beau étudier le terrain et les pokémons qu’on risque de croiser, je me souviens pas d’une fois où ça s’est passé comme prévu. Donc y a beaucoup d’impro. Bah tiens, que t’as un ouvrifier ! Une fois on allait à un endroit où y avait des charpentis et ils se sont mis à nous balancer leurs poutres à la gueule alors qu’on avait rien fait pour ! Et au final c’était à cause d’un nucléos qu’avait rien à foutre là et qui les rendait fous avec ses pouvoirs psys, ça me va de me souvenir de cet exemple, pour ne pas parler de la grotte électrolithe. Je me souviens même de mon anecdote préférée liée à ça et continue d’expliquer : Ca affectait tous les types combat de la zone, et nos pokémons avaient beau combattre ça changeait rien, ils étaient tarés. A un moment c’était tellement désespéré que j’ai foutu un coup de boule à un karaclée !, je me marre parce que j’ai pas eu de séquelle.

Je lui épargne toute la partie où j’ai, par la suite, perdu connaissance et où la situation s’est réglé car le coup de boule a été une illumination pour le nucléos qui a canalisé son énergie comme ça. S’il me questionne, je lui dirai et je lui présenterai Malach’, le nucléos le plus débile de la création, en espérant que ce dernier ait pas comme premier réflexe de foutre un coup de tête à Lenny.

- Tu me demandes tout ça parce que t’as vécu des trucs de fou en chantier ?, je lève la tête comme si je pouvais voir les travaux de là où je me trouve. Plus fou que de faire tomber un maillet, je veux dire.

Du coin de l’oeil, je vois que Willow s’est barré pour aller cueillir quelques fleurs. Pas sûr qu’il ait l’autorisation, mais bon. Il en ramène une pour chacun des pokémons présents. Après avoir réussi à faire tenir celle de Kunzite sur sa tête grâce à ses pouvoir psychique et emmêlée celle d’Angel dans ses poils, il se tourne vers l’ouvrifier. Il lui a pris une espèce à grandes pétales jaunes que je connais pas et semble perplexe quand à la manière de le faire tenir sur ce pokémon.

- Les boules sur la tête d’Hercule, c’est des excroissances ou comme des cheveux ?

Recap:

Récap:

Deux badges, quand même. Il a beau dire que c’était facile, je sais pas si j’y crois totalement. Peut-être que c’est facile pour des dresseurs lambdas, mais que moi je serais capable de me faire massacrer quand même. Ou d’avoir de grandes difficultés. Limite, en laissant mes pokémons en autonomie, peut-être, mais outre ça… Je veux dire, je me remets pas d’avoir demandé coud’jus à mon voltali dans de la neige, m’être étonné que ça fasse n’importe quoi et m’être ensuite demandé pourquoi ça avait touché les pokémons roches de Célestin. J’en suis à ce point.
Ensuite, Lenny se lance dans une sorte de discours sur… Sur l’entraînement, j’imagine, mais en fait je suis pas sûr de comprendre ce qu’il raconte. Un transfert de compétences, peut-être ? Mais même en le prenant comme ça… Ca existe encore les pousse-pousse ? C’est pas que dans les films quand ils représentent des coins de Johto un peu défavorisés ou envahis par les touristes unysiens ? Tu vas me dire, c’est pas plus original que les espèces de remorques pour transporter les gosses ou les pokémons que certains mettent à leurs vélos. Enfin, je fais mine de l’écouter avec attention, histoire de pas passer pour un abruti et conclut par :

- Ouais, je vois, en vrai pas du tout. Si sa métaphore de pousse-pousse revient sur le tapis, j’improviserai.

La conversation dévie sur l’utilisation de mes pokémons dans mon métiers et la notion de dangers. Je peux que lui parler d’improvisation, car malgré nos préparations c’est toujours ce qui finit par arriver. Je pars pour raconter l’histoire des pokémons combats rendus fous par celui qui allait devenir mon nucléos et l’anecdote du coup de boule au karaclée fait grave bugguer Lenny. Sa réaction me fait partir dans un éclat de rire, ça correspond totalement aux réactions que j’espère provoquer avec ma connerie.

- J’aurais bien aimé, mais c’est moi qu’ai fini KO. Mes collègues ont géré après… J’ai eu une de ces bosses !, un deuxième front. Tarja m’a bien engueulé aussi, mais ça, bon, pas besoin de le raconter. Je reste amusé de mon anecdote.

Rien de comparable sur les chantiers, donc. Je l’écoute raconter en observant le manège de Willow qui veut offrir des fleurs à tout le monde. J’imagine les dégâts que provoque la chute d’une machine de chantier et visualise un énorme nuage de poussière. Je crois qu’on en parle pas trop à la télé des gens blessés dans ce genre de contexte, ça doit être considéré comme normal.
Ma curiosité le pousse à m’exposer son projet potentiel de devenir ranger. C’est vrai que la comparaison peut être faite entre les deux professions, mais, pour moi qui voulait être ranger quand j’étais petit, je vois une grosse différence. La question étant de savoir si c’est lié à ma sensation d’échec, car je suis nul en dressage et que j’ai foutu mon adolescence et mes premières années d’adulte en l’air, ou si cette immense différence est vraiment légitime. En tout cas, y a un truc vachement noble dans le fait d’être “ranger” que je retrouve pas dans “éthologue”.

- Ma meilleure amie est ranger, je lui dis en finissant ma boisson. Tu sais, celle qui m’a lourdé au concours de pâtisserie. Si tu veux, je peux lui demander si elle aurait un moment pour t’évaluer. Elle adore faire ça et se la jouer mentor ! Le pire, c’est qu’elle s’en sort pas trop mal.

On sait jamais, si ça peut lui être utile. Puis, comme il est d’unys et vit à Méanville, s’il devient vraiment ranger il finira peut-être par travailler avec elle. Il paraît qu’avoir des contacts dans le milieu visé c’est pas mal. En plus, connaissant Rose, elle ne sera que trop heureuse de pouvoir se la raconter et faire la grande experte devant Lenny.

La conversation change encore car je repère mon angoliath qui galère avec l’idée de donner sa fleur à l’ouvrifier. Il a pas l’air de savoir comment s’y prendre. Je pose une question, peut-être bête, et la réponse me fait m’exclamer spontanément :

- Il a des cul sur la tête ?, je sais que l’anatomie des pokémons peut être bizarre, mais là c’est tout de même insolite d’avoir la même chose que ses fesses sur le haut du crâne. Selon comment il est fait ça doit rebondir si on met le coup de boule du coup… Ca fera moins mal que karaclée comme système de protection !, comment pouvais-je ne pas répondre en continuant à être con après ma surenchère sur l’anatomie de son ouvrifier ? Puis j’ai de l’auto-dérision, dans le bon contexte et avec les bonnes personnes.

Willow finit par simplement déposer la fleur au plus proche de Hercule qu’il peut sans l’effrayer avant de se reculer. Je le vois utiliser ses cheveux comme une liane pour la pousser encore un peu plus, histoire de faire comprendre que c’est un cadeau, avant d’arrêter son cirque. Il continue tout de même de fixer l’ouvrifier, dans l’attente d’une réaction.

- Ouais je me disais aussi que c’est bizarre des charpentis qui balancent leur poutre. Surtout quand je vois Hercule s’accrocher à la sienne comme un dodoala à son bout de bois. Il dort avec aussi ? Comme eux ?

Recap:

- Elle est à Méanville en plus, j’ajoute l’info quand Lenny accepte ma proposition.

C’est tout ce que je lui raconte de ma meilleure amie, ceci dit. Vu le contexte de leur potentielle rencontre, il n’a pas besoin d’en savoir plus. Pas besoin de le prévenir qu’elle est un peu tarée sur le milieu car c’est sûr et certain qu’elle ne le montrera pas. Quand elle est dans son rôle de ranger, Rose inspire le respect. Et si elle décide de se la jouer meuf cool pour l’occasion, c’est ce qu’il risque de penser d’elle. Je la connais assez pour savoir qu’elle ne se laissera pas aller à être autre chose si elle doit voir Lenny.

La conversation dérive sur les excroissances qui couvrent la tête de l’ouvrifier. Evidemment, je ne peux pas m’empêcher de dire une connerie qui a, au moins, le mérite de ne pas faire rire que moi. Ce n’est pas du goût du pokémon, qui doit être bien habitué aux humains pour comprendre ce que je raconte, mais enfin si on ne peut pas se moquer un peu des pokémons… Ceci-dit, peut-être devrais-je m’abstenir avec ceux des autres.

- Pas sûr du timing pour cette expérience, je suis censé bosser quand même !, et il faudra y retourner après cette pause, d’ailleurs.

Heureusement que Willow est là pour détourner l’attention de l’ouvrifier qui avait l’air vexé de nos conneries. Sa méfiance a l’air de s’atténuer à mesure qu’il comprend les intentions pacifiques de mon angoliath. Tant mieux ! Ce pokémon est une crème pacifique - sauf cas exceptionnels - ça aurait été triste pour lui que son cadeau de fleur soit rejeté.
J’en profite pour me questionner à voix haute sur les poutres des ouvrifiers et celles des charpentis. Lenny ne m’apporte pas de réponse poussée, mais c’est suffisant pour satisfaire ma curiosité. Ca me change de Célestin qui ne peut pas s’empêcher de partir dans de longs exposés quand il a la réponse à une question !

- J’imagine qu’une poutre en fer ça se remplace plus difficilement qu’une en bois… Tu crois qu’il va la garder s’il évolue ? Les bétochefs on les voit plutôt avec de gros piliers en pierre je crois !

Non parce que, autant une poutre sur les chantiers ça doit être gérable, mais les deux trucs de cailloux là que se trimballent l’évolution… Ca doit être autre chose. Par exemple, sur le toît, ça doit être compliqué. Puis je me demande combien ça pèse aussi. Lourd, sûrement, vu que ça a l’air bien dense. J’observe du coin de l’oeil Hercule s’orner de la fleur que lui a filé Willow. J’ai bien envie de rire à nouveau, car ça ne lui va pas du tout, mais me retient puisque je l’ai déjà vexé une fois dans les dix dernières minutes. Je voudrais pas que le dresseur prenne la mouche parce que je me fous de la gueule de son pokémon.

- Hm ?, concentré sur les pokémons que j’étais, il me faut quelques secondes pour capter que Lenny me questionne à propos de Willow. Ah ! Ché pas… J’ai jamais vu d’autre angoliath. Lui je l’ai trouvé en train de taper une crise parce que d’autres pokémons avaient ruiné son parterre de fleurs sauvages. C’est après que j’ai appris que ces pokémons sont vraiment pas communs à Unys, à part pour jouer les ogres dans les histoires pour gosses. Et j’ai pas pensé à poser la question au centre pokémon, rapport aux fleurs, je hausse les épaules. Vaut mieux qu’il soit obsédé par ça que par autre chose, hein !

Peut-être que j’aurais dû, mais j’ai jamais eu peur de Willow. Même quand il pétait sa crise, il avait aussi de grosses larmes aux yeux et un air pitoyable. C’était pas dur de comprendre qui allait pas. Je l’ai aidé à sauver une des fleurs et voilà où on en est. Il a jamais eu de mauvais geste. A tous les coups, c’est encore des pokémons avec des mauvaises réputations pas justifiées.

Maintenant que j’ai terminé de grignoter et boire, je considère le temps déjà passé avec Lenny. Je me demande si y aurait pas moyen de moyenner un truc qui ne doit pas être sensé se faire. Je me redresse, ce qui invite Angel à venir se foutre dans mes jambes et me faire trébucher. Après un rattrapage plus ou moins glorieux, suite auquel j’engueule ma grondogue de quelques insultes, je demande enfin à Lenny :

- On voit ce qu’y se passe avec les vieux depuis ton toît ? L'événement avec les fleurs je veux dire, je prends mon appareil photo dans une main pour qu’il cesse de pendre au bout de son cordon, histoire d’appuyer mon propos. Parce que si oui ça pourrait faire des prises de vues sympa !

A tous les coups, je suis pas sensé monter sur le toît, surtout pas quand il est en chantier. Sauf que si je soulève ça, y a plus de chances que ça me soit mis dans le nez. Enfin, c’est souvent ce qui se passe quoi, si je me base sur mes expériences de bêtises passées. Alors que, si je le pose pas sur la table tout de suite, y a peut-être moyen de moyenner !