Je m'étais attendu à ce que cela arrivât, mais je ne pensais pas que cela pourrait me toucher autant. Je m'étais assis à l'extérieur du Dôme, sur un banc que j'avais trouvé à force de marcher dans le coin. Je n'étais pas sûr de comment j'étais arrivé là, mais Keno s'était assis à côté de moi et je sentais son regard, pendant que je ne pouvais que contempler le vide. Dans mes mains, je serrai mon téléphone. J'avais appelé Herbert, je lui avais délivré la lourde information, mais une autre personne était au courant de ma présence ici. C'était Clarisse et je ne savais pas comment lui annoncer ma défaite. Peut-être avait-elle déjà su que je n'avais pas réussi à passer cette première étape de l'Elite ? Après tout, elle m'avait sous-entendu qu'elle regarderait... J'avais honte. Depuis que je la connaissais, Clarisse me hissait toujours sur une sorte de piédestal, simplement parce que je faisais de la coordination, qu'elle avait vu mon nombre de rubans, qu'elle savait que je pouvais prétendre à l'Elite mais... Mais elle n'avait rien vu de tout cela en direct, alors que c'était cette fois un lourd échec qu'elle avait dû subir. Peut-être que je me faisais trop de soucis, peut-être que j'en rajoutais, peut-être pas. Je n'étais même pas sûr qu'elle voudrait me parler, si maintenant j'étais devenu quelqu'un de nul à ses yeux... J'avais la gorge nouée rien que d'y penser, je ne savais pas pourquoi elle était si importante, mais j'étais habituée à parler avec elle tous les jours et là je n'étais pas sûr de supporter son absence en ce moment-là. Et alors que je me morfondais, mon téléphone se mit à vibrer entre mes doigts. Je mis un petit moment avant d'oser regarder mon téléphone, mais Keno tira sur ma manche. Je me décidais donc à regarder, avant de rougir.
→ Coucou, je suis dans le dôme. Je voulais t'intercepter à la sortie des vestiaires mais j'ai eu du mal à quitter les tribunes rapidement, j'ai peur de t'avoir loupé… Est-ce que tu veux que l'on se voit ?
J'avais honte et j'étais heureux en même temps, mais est-ce que je voulais la voir vraiment, dans cette situation ? J'allais juste lui montrer mes faiblesses. Mes mains tremblaient. Je ne savais pas si j'avais envie de la voir en fait. J'étais vraiment partagé, mais si elle était venue, pour moi en plus, je ne pouvais pas non plus la laisser comme ça.
→ Je suis à l'extérieur, je vais m'avancer vers l'entrée principale.
Je mis quelques instants à me lever, après avoir soufflé, après avoir passé mes manches sur mes yeux, après avoir essayé de remettre mes cheveux en ordre, après avoir dit à Keno que cela allait bien se passer. Je m'approchais de ce Dôme que je maudissais. En faisant une mauvaise chute à vélo, enfant, on m'avait dit tout de suite que je devais remonter dessus, mais comment cela se passait quand il s'agissait d'une chute suite à une défaite ? Je ne pouvais pas me réinscrire, j'avais l'impression de perdre tous mes moyens. Pourtant j'avançais, Keno me suivait, j'avançais vers ce lieu sans imaginer pouvoir entrer à l'intérieur. J'avais si peur tout à coup alors que j'avais été si motivé, si volontaire quelques heures auparavant. Puis je la vis et mon corps se stoppa un instant. J'avais presque peur de défaillir devant elle. Cela aurait été encore plus ridicule.
« Merci d'être venue, je suis désolé, je ne t'ai pas vu dans le public et… désolé que tu aies vu ça. »
Je bredouillais, évidemment, je n'arrivais pas à la regarder, je sentais encore mes joues rouges. Quand j'osais enfin la regarder, je voyais un regard triste, ça ne m'aidait pas, peut-être qu'elle s'en voulait aussi d'être venue... Je regardais ses Pokémon et les saluait brièvement, tout comme elle le fit avec Keno. Je sentais le regard de mon Pokémon sur moi, je savais qu'il comprenait, qu'il savait que j'avais besoin de son soutien comme de celui de Clarisse.
« Je.. Je ne voulais pas que tu me voies. Je ne voulais pas te déconcentrer. »
Ah, voilà, je me doutais que cela allait arriver, elle avait dû sentir que j'allais perdre, donc elle avait dû redouter de venir. Après pourquoi elle l'avait fait, je ne le comprenais pas.
« Mais je suis vraiment contente d'être venue. J'ai vu toutes tes prestations en rediff, mais là en live c'était tellement mieux. Tu as une manière de captiver le public quand tu parles et… »
Alors que j'étais étonné, que je la regardais, elle détourna le regard.
« Enfin, j'ai vraiment aimé te voir. - C'est gentil de me dire ça, mais… C'est évident que Saizo Masuda était bien meilleur que moi, je ne suis pas au niveau je crois bien ! »
J'avais de nouveau le sourire, enfin, j'essayais de sourire, aussi pour la rassurer, elle était vraiment gentille et je ne voulais pas qu'elle pusse penser mal faire.
« Je ne suis pas d'accord, Monsieur Masuda n'était pas "bien meilleur". Les votes étaient serrés, ils l'ont dit, c'est donc que tu as rivalisé avec lui. »
Elle me regardait dans les yeux, j'étais perturbé par ce regard franc, elle avait l'audace de me dire cela comme ça, sans rougir, sans montrer la moindre faille. J'étais impressionné.
« Je ne m'y connais pas très bien en coordination, mais j'ai sincèrement préféré ta prestation à la sienne. Et pas seulement parce que c'est toi : j'ai trouvé que celle de Monsieur Masuda était élégante mais très lisse, alors que la tienne était plus originale et personnelle. Et puis, j'ai été bien plus inspirée en te regardant toi que lui. Ca m'a donné un peu envie de monter sur scène aussi, et pourtant tu sais comme ça me fait peur… »
J'avais besoin de voir si elle était vraiment sincère et c'était ce que je voyais dans ses yeux.
« J'aurais vraiment voulu que tu me vois réussir pour te donner vraiment envie... »
Je fis une pause et le sourire, celui que je voulais avoir mais qui devait apparaître comme bien faux pour elle...
« Là je ne sais même pas moi-même si je veux retenter ma chance après ça... »
Et j'avais à peine fini ma phrase qu'elle me renvoyait la balle, si rapidement qu'elle ne pouvait que penser ce qu'elle disait, encore une fois.
« Oh, ce serait vraiment triste que tu ne réessaies pas ! Ça ne s'est pas joué à beaucoup, et tu as tellement travaillé pour en arriver là… Tes Pokémon aussi seraient déçus de ne pas retenter, j'en suis sûre ! - Mais j'ai déjà honte de ne pas avoir réussi pour eux. Ils étaient formidables et je n'ai pas l'impression d'avoir été à la hauteur de leurs efforts. C'est comme si j'avais échoué à mon rôle de coordinateur… et même d'éleveur. »
Cette fois, elle mit un peu plus de temps avant de répondre, en même temps, moi aussi je lui avais répondu du tac au tac, mais avec des idées qui devaient sembler bien moins belles. Elle se mordillait la lèvre, elle avait baissé la tête et cela me brisait le cœur. Avais-je été déjà trop loin ? Je ne pouvais pas me permettre de me plaindre alors qu'elle était là pour moi, pour me soutenir, je devais me calmer.
« Tu sais.. je crois que c'est si tu t'arrêtes là que tu auras échoué. Je sais que je ne suis pas très bien placée pour te dire ça, vu comment je n'arrive plus à me battre pour réussir mon année… Mais contrairement à moi, tu vas finir par réussir. J'en suis certaine. »
J'étais embêté, je ne savais pas quoi lui dire alors que j'avais arrêté mes études bien vite pour aller sur les routes. Au départ, bien sûr, cela avait été un peu de force et je m'imaginais retourner sur les bancs de l'école, mais bien vite c'était devenu pour moi quelque chose de vital, un moyen pour échapper à ma famille, à mon foyer. Que lui dire dans un moment comme cela alors que je ne serais sûrement pas capable de mémoriser la moitié de ses connaissances ? Il fallait que je reste positif, il fallait que je la rassure. Je voulais qu'elle fut à l'aise avec moi et elle avait déjà fait l'effort incroyable de venir pour moi. Et moi, je me sentais mieux depuis qu'elle était là, sa présence me faisait du bien. Je me sentais plus calme et j'avais l'impression qu'il n'y avait plus qu'elle et moi.Je restais un instant sans répondre.
« Ne dis pas ça, tu vas y arriver… »
J'avais tendu la main vers elle avant de me rétracter. Elle hochait la tête de droite à gauche, semblant ne pas y croire. C'était dur à contrecarrer. Je savais à quel point elle essayait de son côté, à quel point elle se battait alors que moi dans tout ça, j'avais l'impression de simplement me laisser aller face à elle.
« Je suis désolé si mon comportement te déçoit, j'aurais préféré que tu ne me vois pas comme ça. - N..non, c'est normal. C'est normal que tu sois déçu. J'aurais préféré que tu gagnes aussi, on aurait pu fêter ça tous les deux - enfin, peut-être, si tu n'avais rien de mieux à faire. »
J'étais en train de fondre alors qu'elle arbora un petit sourire timide, elle était vraiment craquante.
« En fait, j'ai préparé un gâteau pour toi. Je ne sais pas ce qu'il vaut mais… ça te réconfortera peut-être un peu ? » - « On peut fêter le fait de se voir quand même… Et j'ai vraiment envie de partager ce gâteau avec toi. »
Elle rangea une mèche de cheveux derrière son oreille, avec un sourire un peu plus grand. J'étais soulagé : ma réponse avait eu l'air de lui faire plaisir.
« J'ai aussi fait des poffins pour les Pokémons qui allaient faire la prestation avec toi. Je crois qu'ils sont un peu ratés, le chou n'a pas beaucoup gonflé… Mais le tien c'est une recette que je maîtrise bien normalement. »
Elle avait même pensé aux Pokémon et je pensais donc à regarder Keno et les amis de Clarisse, qui avaient l'air de bien s'amuser, sans soucis à l'horizon. Pendant ce temps, Clarisse enleva son sac et retira un paquet d'aluminium de son sac avant de le regarder.
« Tu veux qu'on s'installe quelque part… ? »
Je me sentais tout à coup privilégié de l'avoir à mes côtés. Je regardais à droite et à gauche, il y avait bien le banc sur lequel je m'étais assis plus tôt, mais ce n'était pas vraiment un endroit très propice aux retrouvailles et en soi, je n'avais pas très envie de rester trop près du Dôme
« C'est vraiment adorable de ta part... Tu préfères aller quelque part en intérieur ou rester dehors ? Je ne me suis pas baladé très loin en fait, je ne connais pas bien le coin… - Euh, à l'intérieur peut-être ? On ne va bientôt plus y voir grand chose. »
Elle partit pour l'intérieur, pendant que je me maudissais, avant de s'arrêter presque aussitôt.
« Ah, on va peut-être se faire embêter s'il y a encore du monde dans le dôme… Peut-être qu'on pourrait… aller autre part ? - Oui, il ne faudrait pas attraper froid en plus. - Si on va dans un café, on n'aura sûrement pas le droit de manger… Si tu veux je peux t'emmener dans la chambre d'hôtel que j'ai pris ? Ce n'est pas trop loin. Tu es logée où toi ? - D'accord. On peut faire ça. J'ai pris un Air BnB dans la ville d'à-côté, mais il faut prendre le bus pour y aller. Je préfère ton idée. »
Ouf. Cela avait été compliqué et je ne voulais surtout pas la gêner. Après tout, elle me connaissait tout de même et j'espérais qu'elle me faisait confiance. Elle devait être un peu intimidée, mais elle avait l'air aussi contente de la situation, ce qui me donnait du baume au cœur.
Nous partîmes avec la petite troupe vers l'hôtel où je logeais, Clarisse avait finalement remis les paquets dans son sac et je la trouvais de nouveau souriante, pétillante. J'aimais beaucoup la voir comme cela et je ne voulais pas gâcher le moment. Arrivés à la chambre, je lui fis la visite, la faisant sourire en lui faisant un vrai tour de la chambre, lui présentant la lampe de chevet de gauche, puis la lampe de chevet de droite. Ses Pokémon pouvaient être libres dans la chambre et je laissais uniquement Keno s'aérer de mon côté, je n'étais pas sûr de pouvoir supporter le regard de mes autres Pokémon pour le moment. Evidemment, quand le moment était venu de goûter les gâteaux et les puffins, je les sortis, avant de préparer un thé pour Clarisse et lui-même. Le temps passa rapidement alors que nous évoquions la ménagerie dans laquelle je vivais. Cela me détendait aussi beaucoup de pouvoir simplement discuter avec elle sans avoir de nouveau le poids de cet échec sur la conscience. La nuit était tombée depuis un moment et je me décidais à lui proposer d'aller au restaurant de l'hôtel. Je n'avais pas envie de sortir mais mon ventre grognait malgré l'excellent gâteau qu'elle m'avait fait. Je ne savais pas si je l'avais trouvé si bon parce qu'il l'était ou parce qu'elle l'avait fait. Sûrement un peu des deux. Les conversations avaient continué sans vraiment s'interrompre, en étant parfois assez simple et prenant à d'autres moments des tournures un peu plus complexes. Je me rendais compte que j'aimais beaucoup avoir son avis sur certaines choses. Elle avait une vision parfois différente de la vie et cela m'apportait beaucoup, surtout qu'elle disait toujours tout cela avec un air passionné. Nous avions nos différences, mais je commençais à vraiment apprécier ces discussions qui étaient bien plus agréables à avoir en vrai plutôt que par messagerie.
Nous étions finalement remontés dans la chambre et c'est tout naturellement que nous prîmes place sur le lit avec nos compagnons. Quand nos Pokémon commencèrent à piquer du nez, je tamisais les lumières. Je n'avais pas envie de dire à Clarisse de rentrer et comme elle ne semblait visiblement pas avoir envie non plus de son côté, je lui indiquais de se mettre à l'aise, ce qu'elle fit plus ou moins en tirant un oreiller vers elle. Je lui souris et au bout de quelques secondes, au milieu d'une phrase, elle s'endormit. J'attendis un peu avant de bouger, pour finalement chercher une couverture dans l'armoire et la déposer doucement sur Clarisse. De mon côté, j'allais me mettre dans le lit, avant de me raviser. Je finis par éteindre les lumières et me coucher. J'avais peur d'être trop proche alors je fis attention de trouver une position confortable tout en ne la touchant pas. Ce fut au bout de quelques minutes que tout remonta.
J'étais dans cette chambre, seul éveillé, et pourtant j'entendais la douce respiration de tout le monde. Les larmes arrivèrent bien vite, sans que je pusse vraiment y faire quelque chose. Je me sentais mal, j'avais l'impression que je n'y arriverais jamais, que je ne pourrais pas de nouveau affronter l'Elite. Puis, je me décidais à me retourner, à la regarder, comme pour me donner de la force. Je sentis alors mes larmes sécher, comme si elle était la réponse. J'avais la réponse à tout cela. Elle avait réussi à me remotiver et cela n'était pas gagné d'avance.
Le lendemain matin, j'avais de nouveau préparé un thé après être sorti pour aller chercher le petit déjeuner. Je m'étais réveillé tôt, j'avais mal dormi, mais j'étais heureux qu'elle fut là, de m'être réveillé à côté d'elle. Sûrement réveillée par tout ce ramdam, je lui présentais mes excuses avant de lui demander si elle avait bien dormi, elle me répondit un petit oui timide – que je trouvais adorable – en me demandant si c'était le cas pour moi.
« J'ai surtout réfléchi en fait et je vais retenter ma chance. »
La jeune femme se releva à cette annonce, me regardant avec un sourire que je lui rendis.
« Et c'est grâce à toi. »
Je passais rapidement à autre chose pour ne pas avoir un Ecrapince devant moi pendant toute la matinée, et tout se passât bien. Je ne vis même pas la journée passer, jusqu'au moment où Clarisse s'inquiéta pour son vol. Elle devait rentrer à son AirBnb avant de prendre l'avion et je me décidais alors de l'accompagner. Il fallait prendre le bus et elle voulut me prévenir que le trajet allait être long, mais j'insistais pour la raccompagner et c'était tout naturellement que je me trouvais ensuite dans le bus pour rejoindre l'aéroport en sa compagnie.
C'était passé tellement vite que je n'en revenais pas de me retrouver face à elle, au moment de son départ. Je la regardais, avant de la remercier encore d'être venue, de lui confirmer que j'allais m'inscrire dès le lendemain. Je saluais ses Pokémon, avant de la saluer aussi, d'abord en face, puis de loin, la regardant partir, avec une petite pincée au cœur.
Le lendemain, j'y étais à nouveau. L'inscription s'était correctement passée, pas de questions supplémentaires, pas de regards indiquant quoique ce fut que j'aurais pu mal prendre sur le moment. J'avais informé Herbert qui s'était montré enthousiaste. Je pouvais y arriver, le tout était d'y croire et de recommencer. Cette victoire, je devais l'obtenir. Pour la pension, pour moi, mais aussi pour Clarisse. Peu importait le coût et le temps que j'y passerais, je ne repartirais pas d'ici sans avoir réussi, quitte à devenir le coordinateur s'étant le plus présenté à l'Elite.
HRP : Les Pokémon suivants sont bloqués : Kirlia S Amphinobi Debugant Caninos Milobellus Ramoloss S Mysdibule Mystherbe S Abra S Stalgamin
Signature (Vanee) = love. / avatar : Tori Yamazaki (Merci Nessa ) SONNFLORWALDS.Un nom compliqué pour une pension qui vend du pâté.
Bonjour Monsieur Gladstone, nous sommes ravis de vous revoir si vite à l'Elite !
Vous aviez la dernière fois affronté le musculeux (et un peu trop grand) Saizo. Qui des quatre champions, Kiana, Béatrice, notre ami musculeux et moi-même, votre serviteur, devrez-vous cette fois affronter pour la prestigieuse épreuve de la prestation ?
Veuillez choisir un numéro entre 1 et 4 ! (Calypso étant écartée de l'épreuve de prestation.)
Un nouvel appartement avait été meublé à notre étage du quartier général, le garde-manger s'était vu enrichi de mets jusqu'à présent inconnus au bataillon et des techniciens travaillaient encore à l'installation d'une loge supplémentaire dans le Dôme. Après plusieurs décennies à trois, puis quatre champions, l'Élite s'élevait à présent jusqu'au niveau de l'institution jumelle avec l'inauguration d'un cinquième poste de Maître Coordinateur ; et un tel changement s'accompagnait de chamboulements qui touchaient tous les niveaux du QG, depuis ses installations jusqu'au nombre d'employés en passant par nos agents qui allaient devoir composer avec un nouveau collègue et par les membres du Comité, à leur tour demandés pour nombre d'interviews.
D'après les échos que j'en avais eus, le monde de la coordination se réjouissait de cette nouvelle qui devait être motivée par un plus grand nombre de challengers se présentant à l'Élite, notre discipline attirant enfin autant de passionnés que la Ligue. Je m'intéressais assez peu à ce type de réflexions, d'autant que je n'avais pas eu le temps de remarquer l'évolution supposée. Pour ma part, tant que la discipline était reconnue et les artistes de talent, encouragés, peu m'importait qu'il y ait plus de dresseurs que de coordinateurs : cela suggérait même une forme de rareté très appréciable dans les aptitudes de ces derniers. En revanche, accueillir un nouveau collègue avait quelque chose d'assez excitant étant donné notre petit nombre : j'espérais qu'il serait plus drôle que les deux Grelaçon (surnom trouvé par Calypso et moi), Béatrice et Saizo, car la compagnie pour passer du bon temps à l'Élite devenait quelque peu limitée.
Nous ne pûmes malheureusement pas beaucoup discuter avec Kiana lors de sa cérémonie de bienvenue, mais je commençai déjà à me faire une vague idée de sa personnalité : elle semblait sûre d'elle et presque autoritaire, mais quand même plus loquace que Béatrice, les prestations de la rousse avaient l'air de l'intéresser, ce qui n'augurait rien de bon, et elle avait des Pokémon bizarres – à commencer par un Grotadmorv alolien, d'une couleur que je n'avais encore jamais rencontrée. Quelle personne normalement constituée irait s'accompagner d'un Grotadmorv, a fortiori de l'espèce alolienne que je trouvais encore pire que celle des métropoles ? …Ce qui augurait du meilleur en lui conférant un côté, sinon peut-être amusant, du moins intriguant. « On a de la concurrence (╯° Д°)╯ », écrivis-je par texto à Hélène lorsque, pendant son discours d'arrivée, j'appris que Kiana était originaire d'Alola. Cela nous faisait un deuxième point commun avec l'amour des Pokémon atypiques. Et tandis que Kiana, l'allure très stoïque, laissait le micro à un membre du Comité, Calypso me frappa du coude : « Y'a une nouvelle Sorbouboul ! » Sans doute mon rire me valut-il des regards sévères, mais nous étions installés devant ceux qui auraient pu me les adresser. Il n'était pas fort au point de jeter un froid, tout de même...
Nous aurions aimé tenter rapidement de briser la glace avec Kiana Wai, mais les nouveaux champions étant toujours très demandés, nous n'aurions pas tout de suite l'occasion de faire plus ample connaissance. Puisque ces chamboulements ne suffisaient pas à remplir mon quotidien, Camille eut la bonne idée de me téléphoner mardi pour m'annoncer que sa copine l'avait quitté.
– Elle m'a dit que j'étais trop sérieux, me raconta-t-il d'une voix plaintive en pleurnichant dans le téléphone. – Y'a vraiment des gens qui ne savent pas ce qu'ils ratent... Écoute, pourquoi tu ne passerais pas me voir à l'Élite ce week-end ? Je donne justement une prestation samedi contre un challenger, ça te changerait les idées !
La nouvelle apportée par Camille me déplaisait particulièrement : il était mon meilleur ami, les choses semblaient jusqu'à présent bien se passer avec sa désormais ex-copine, une prof comme lui, qui me semblait honnête et dont il était amoureux, et je souhaitais depuis longtemps qu'il trouve celle avec qui cela fonctionnerait – surtout que je ne pouvais plus vraiment me qualifier moi-même de célibataire endurci. Alors, se faire quitter comme ça ! Trop sérieux, mais pour qui se prenait-elle ? C'était maintenant qu'elle s'en rendait compte ? Elle était partie avec un autre gars, oui, autant le dire tout de suite ! Camille méritait mieux que ça. J'aurais aimé le rejoindre immédiatement chez lui pour que nous passions la soirée ensemble comme nous faisions autrefois, mais Johto était loin et je devais me préparer pour mon entrevue avec le challenger. Heureusement, il n'avait rien de prévu ce week-end : la coordination pourrait donc jouer une fois de plus ce rôle d'évasion loin des soucis dont elle était reine...
Sur ces entrefaites, le rendez-vous du mercredi avec le challenger pour découvrir notre thème arriva. J'étais de bonne humeur à l'idée de disputer ce nouveau défi d'Élite car depuis ma prise de poste, les tirages au sort m'avaient essentiellement confié des combats, alors que, si je savais me battre, c'était bien pour le spectacle que j'étais devenu coordinateur, comme mes confrères. J'arrivai de bonne heure dans la salle où je devais rencontrer le challenger ainsi que l'huissier de justice, un homme tout de noir vêtu et au visage fermé qui faisait sans nul doute lui aussi partie de la troupe des gens trop sérieux, mais pas de façon sympathique. De mon côté, je portais mon manteau blanc devenu comme ma marque de fabrique et, si j'avais laissé Pops dans ma chambre, mon Kecleon Toby s'agrippait à mon épaule. Il semblait qu'il fallait apparaître assez classieux devant les challengers, mais enfin, aujourd'hui, nous faisions connaissance ! Ce serait pour le jour de la prestation que je porterais un beau costume... peut-être.
Le challenger entra enfin : un jeune homme brun, l'air assez simple, sans grande différence avec celui que j'avais vu sur la scène quelques jours avant. Mais le jeune homme de la dernière fois n'avait pas encore connu l'échec dans son défi personnel ; celui-là, oui, et il était quand même revenu, presque sans attendre.
– Bonjour Monsieur Gladstone ! Je l'avais accueilli avec un grand sourire et lui serrai la main, espérant montrer mon enthousiasme. Content de vous revoir ici si vite, c'est important de savoir persévérer ! J'avais bien aimé votre prestation de l'autre fois, surtout le final avec ce sympathique M. Loyal. C'était vrai, je l'avais trouvée très fraîche et colorée et elle m'avait fait rire, même si celle de Saizo était visuellement plus grandiose. ...Ah oui, je suis Edel Aubier et c'est moi qui serai votre adversaire cette fois. Vous êtes éleveur, c'est ça ?
L'huissier attendait pour desceller l'enveloppe qui contenait le thème choisi, mais je trouvais toujours dommage que, pour cette première partie du défi, nous ayons si peu le temps de faire connaissance avec le challenger. Enfin, ce n'était pas dommage pour tous, bien entendu, mais j'aimais bien avoir une idée de qui se présentait là. Ce qui me préoccupait me revenant en tête, je baissai soudain un peu la voix et, l'air soudain soucieux, Toby se penchant avec moi, je demandai :
– Dites-moi, vous m'avez l'air d'un jeune homme bien fait et aimable, vous avez déjà dû connaître ce genre de situation : vous ne sauriez pas comment consoler un ami qui aurait un chagrin d'amour, par hasard ?
L'huissier n'allait quand même pas se permettre de toussoter devant un champion ? Ah, si.
C'est aujourd'hui qu'est dévoilé le thème du concours. Ce qui veut dire que vous allez donc bientôt prochainement pouvoir assister aux prestations de Elias et de Edel, qui seront basées sur le thème...
...:
Folie.
Je vous rappelle que vous avez 1 mois pour poster, donc jusqu'au 20 mai. Nous nous réserverons ensuite deux semaines pour les votes.
Vous avez droit à 2 Pokémon et 3 attaques.
Faites-nous rêver et surtout, amusez-vous bien ! (:
Je n'avais pas perdu ma motivation depuis le départ de Clarisse, mais cela ne voulait pas dire que j'étais totalement à l'aise avec la situation. Après tout, je devais me présenter une fois de plus à l'Elite et je craignais vraiment de tomber à nouveau sur Saizo. Je n'étais pas sûr de pouvoir affronter son regard. J'avançais donc encore plus timidement vers la pièce qui me séparait de la personne qui allait faire une prestation contre moi. Clarisse croyait en moi, mais cela ne faisait pas de moi quelqu'un de parfaitement confiant à ce moment-là. J'entrais dans la pièce et heureusement, la personne me faisant face n'était pas Saizo, mais Edel. Je dus prendre un moment pour moi, puisque sans le faire exprès, j'avais retenu ma respiration pendant la traversée du couloir et maintenant que j'étais en face du maître coordinateur, il valait mieux retrouver mon souffle.
« Je... Bonjour, enchanté aussi Monsieur Aubier. »
Je devais garder un minimum de contenance, même si cela était compliqué face à quelqu'un que j'appréciais et que j'estimais. Edel avait un parcours assez grandiose et sa personne en elle-même m'impressionnait. C'était donc d'autant plus incroyable de recevoir des compliments de sa part, même si j'imaginais bien que cela faisait partie des choses que l'on devait toujours dire à un challengeur, surtout à un challengeur malchanceux. Enfin, cela me faisait de toute façon extrêmement plaisir qu'il eut, au moins, observé ma prestation.
« Je vous remercie, c'est vraiment un honneur d'entendre de telles paroles de votre part. »
Je me sentais un peu mieux, sûrement parce que le maître coordinateur savait bien mettre les gens en confiance. Je lui fis un sourire franc alors qu'autour de nous, tout le monde commençait à s'agiter vis-à-vis du thème que nous allions recevoir dans quelques instants. J'étais réellement tendu, si bien que je ne compris pas vraiment ce dont Edel me parla, en aparté.
« Eh bien... Pardon ? »
L'huissier à côté se mit à tousser et cela me perturba d'autant plus. Je n'eus pas la chance de répondre à Edel et le thème fut annoncé : Folie. J'avais à peine eu le temps de me faire à ce thème que je sentais que les membres du Comité voulaient tous me voir sortir d'ici, alors qu'Edel et son Kecleon voulaient, quant à eux, que je pusse rester plus longtemps.
« Je ne suis pas un expert de ce genre de choses, mais... Peut-être simplement être avec votre ami pourrait l'aider ? »
J'étais très hésitant, notamment puisque je n'avais jamais vécu cela. Enfin, j'étais content d'avoir pu un peu discuter avec lui, même si ce n'était pas ce que j'avais imaginé. Après quelques mots échangés, je m'esquivais donc, à la demande du Comité.
Quelques jours plus tard, le moment était enfin arrivé. Tout cela s'était passé à une vitesse incroyable et je me tenais dans les coulisses une nouvelle fois. Je me préparai à entrer sur scène. Je ressentais un trac que je n'avais pas eu depuis si longtemps, c'était à la fois une sensation étrange et finalement assez naturelle au vu de la situation. Après quelques respirations, je lançais le compte à rebours et encourageais mes Pokémon. Je savais que j'avais choisi quelque chose de difficile, mais cela venait aussi de moi, alors c'était important.
PRESTATION
/!\ Attention, c'est un texte sombre, qui n'est pas forcément adapté à toutes les sensibilités.
Sur la scène, le public pouvait voir une installation assez sobre : une grande malle se trouvait sur le côté droit, un porte manteau sur le côté gauche, et au centre un Débugant, Berserk, en plein entraînement, face à un miroir, qui était tourné vers la droite, le public pouvait ainsi voir le Débugant de profil. Il faisait ses étirements, tout en regardant son reflet. Il levait les bras en l'air puis se baissait jusqu'à atteindre ses chevilles et recommençait. Il se regarda dans le miroir à nouveau, donnant des faux coups de poing à son reflet. Se prenant au jeu, le Débugant s'écarta du miroir pour donner des coups dans le vide en sautillant sur la scène, se baladant dans le même temps. Soudain, des bruits de pas retentir et le Débugant cessa son jeu, il fonça vers la malle et l'ouvrit rapidement pour en sortir ce qui semblait être un déguisement. Il retourna devant le miroir avec ses affaires et se prépara rapidement, enfilant le déguisement et mettant ce qui semblait être du maquillage jaune sur le haut de son crâne. Le Débugant fit face à la scène dans son accoutrement : il ressemblait vaguement à un Abra, il y avait deux trous dans le haut de son costume pour lui permettre de voir. Alors que les bruits de pas s'intensifiaient, le Débugant fila une dernière fois vers la malle, jeta le maquillage qu'il sembla prendre la peine de cacher, avant de s'asseoir en tailleur sur la malle.
C'est alors que j'entrai sur scène. Je courbais le dos, semblant fatigué, semblant porter un poids particulier. Je m'étais aussi maquillé, mais pas de la manière du Débugant, en fait, j'avais un peu noirci mes traits, comme pour avoir des cernes, un air fatigué qui montrait que je n'étais pas sain, pas à l'aise. J'étais aussi vêtu avec des habits assez amples, ma silhouette était ainsi peu visible sous les vêtements et j'essayais de me persuader que cela avait un effet de ne pas réussir à définir mon âge correctement. Je voulais jouer une personne lambda, alors si possible, je ne voulais pas que l'on pusse voir que derrière cet accoutrement, il y avait un gamin de 18 ans. Enfin, pour permettre au public de nous entendre, nous avions Berserk et moi, un micro fixé contre notre joue et j'avais un retour dans l'oreillette.
« Tu es là ? »
Pas de réponse, mais j'avançais dans la pièce, retirant ma veste pour l'accrocher au porte-manteau. Le Débugant restait silencieux, assis en tailleur sur la malle.
« Abra... ? »
Je l'appelais comme si je rentrais tout bêtement à la maison, pourtant une pointe d'hésitation se faisait ressentir dans ma voix. Je continuais à me déplacer, à faire ma petite vie, je passais devant le miroir et m'arrêtais un instant pour observer ma mine, retravailler mes cheveux et fut soudainement pris d'un tic. J'avais une mèche rebelle qui était apparue et je la remis en place une fois, une deuxième fois, une troisième fois... Après avoir dépassé la dixième fois où je remettais cette mèche en place, j'attendis qu'elle pusse se relever à nouveau pour la plaquer encore. Cela ne s'arrêtait pas et finalement, un bruit se fit entendre vers Débugant et en effet, il avait tapé du plat de la main sur la malle pour attirer mon attention. Résultat, j'oubliais pendant un temps mon apparence, avant de rejoindre mon précieux Pokémon.
« Désolé ça a été plus long que prévu. Tu t'es bien entraîné ? »
Je pris mon Pokémon dans mes bras, caressant doucement son crâne.
« Je sais que je t'en demande beaucoup, mais nous devons réussir. »
Je le reposais avec douceur sur le sol, le Débugant se rassit rapidement, alors que j'ouvrais la malle pour en sortir quelques cubes colorés, comme des jouets pour enfants.
« Allez, tu me montres ? Le spectacle doit être parfait. »
Il ne se passa rien, mais j'attendais patiemment, comme si quelque chose allait forcément arriver. Au bout de quelques instants, comme pour l'aider, je commençais à empiler les carrés, un par un. Le Débugant se concentrait mais n'arrivait pas à les bouger, il poussa alors le cube du haut pour le faire tomber.
« Bugant... - Non, ce n'est pas ça, ce n'est pas ce que nous avons prévu. »
Je l'attrapai par la nuque en le penchant vers les cubes, l'air sévère.
« Concentre-toi ! »
Et juste après ce geste, je le pris dans mes bras.
« Pardon, pardon, ce n'est pas grave, tu y arriveras. Pardon. »
Je le serrais fort, de plus en plus fort, si bien que Berserk se débattit un peu, me repoussant comme il le pouvait. La scène fut alors plongée dans le noir.
Quand la lumière revint, le Débugant était toujours grimé en Abra et semblait se concentrer face au miroir, j'étais absent de la scène. À côté de la malle, les cubes colorés étaient empilés les uns sur les autres. Le Débugant restait fixé sur son reflet dans le miroir.
« Déb... Bug-. Bug-... Bru... »
Le son était forcé, comme s'il essayait de prononcer quelque chose dont il était incapable. Il posa sa main sur sa gorge, la serrant d'abord légèrement, puis un peu plus.
« Breeu... Brreeaa... Braaa... Ubraaa... »
À force de serrer, il se mit à tousser violemment après ce dernier effort. Les pas résonnèrent une nouvelle fois et le Débugant se dépêcha de s'asseoir à côté des cubes, toujours les jambes en tailleur. Alors que j'entrais dans la pièce, Berserk avait les mains au-dessus des cubes, comme s'il cherchait à les enchanter. Évidemment, cela n'avait absolument aucun effet. De mon côté, j'étais énervé, je fonçais directement vers les cubes pour donner un grand coup de pied dedans, les envoyant ricocher sur la malle. Le Débugant, effrayé, recula pour se protéger.
« Arrête ça ! Arrête ! »
Le Débugant recula encore, se protégeant le visage pendant que prenait les cubes pour les ranger dans la malle, avant de retirer également ma veste pour la mettre dedans, par habitude, avant de me rendre compte de ma bêtise au moment où la malle se refermait, une des manches dépassant de la malle. Je tirais alors dessus pour l'en déloger, avant d'abandonner et me retourner vers le Débugant qui était parti à l'autre bout de la pièce.
« ABRA ! Je te l'ai dit ! Je te l'ai dit ! Tu n'y arrives PAS ! »
Je hurlais, m'étranglant alors que des larmes me montaient aux yeux. Je m'avançais vers le Débugant sans lui laisser la possibilité de s'échapper. Je respirais bruyamment, tellement j'étais énervé. Le Débugant de son côté, ne savait pas quoi faire, si bien qu'il improvisa.
« Bra... Abraa... »
Choqué, je tombais à genoux devant lui, la tête entre les mains, je pleurais. Je repris mes esprits quelques instants plus tard et glissais mes mains vers le Pokémon, donc je retirais le déguisement.
« Tu n'es pas lui. »
La scène fut alors plongée dans le noir à nouveau.
Cette fois, quand la lumière revint, j'étais seul sur scène, Débugant n'était pas présent et il n'y avait que moi. Cette fois, je m'observais dans le miroir et me grattait un sourcil, encore, encore, encore. Comme si quelque chose y était attaché. Cette fois, je ne fus pas distrait par un bruit, je me détachais du miroir tout seul. Après avoir regardé ma montre. Je me dirigeais vers la malle et l'ouvrit en silence, avant d'en sortir une peluche d'un Abra. Je la cajolais entre mes bras, avant de la lancer violemment contre la malle et m'écrouler au sol. Finalement, le Débugant entra de nouveau en scène, il ne portait plus son costume, ni son maquillage, il était simplement redevenu un Débugant.
« Je suis désolé. »
Ma voix était éraillée par ce que nous avions vécu, notamment par ma faute. Je tendis la main vers Berserk, qui n'osa plus avancer. Je me relevais péniblement, pour ramasser la peluche et la reposer dans la malle doucement. Je me tournais à nouveau vers le Débugant, avant de m'approcher lentement de lui.
« Je ne voulais pas t'oublier. J'ai... J'étais si triste, tu sais... C'était dur... Mais... Mais ça va mieux ! Tu le vois ! Fini les histoires, les déguisements... Je te reconnais, tu es mon Débugant, tout va bien maintenant ! De toute façon, tu es mieux que lui pas vrai ? Tu es mieux que ce bon à rien d'Abra. Nous allons gagner ensemble maintenant. Tous les deux. »
Je me grattais à nouveau le sourcil en avançant vers lui, mais le Débugant me contournait, il n'osait pas l'approcher.
« Bra... Bra... »
C'était de trop, je l'avais forcé à tout cela, mais alors que ma conscience était en train de revenir, je n'avais pas supporté que ces cris fussent imités encore. Je m'élançais vers lui, avec l'intention visible de lui faire du mal, hurlant envers lui. Les lumières s'éteignirent une dernière fois. On pouvait entendre Berserk gémir une dernière fois en prononçant le nom « Abra ».
Quand la scène réapparut, l'espace avait changé. Plus de malle, de porte-manteau, de miroir, il n'y avait qu'un lit, au centre de la pièce, sur lequel j'étais assis en pyjama, avec deux peluches, un Abra et un Débugant. Je les serrais contre moi, assis en tailleur sur le lit. Warlock, le Abra chromatique, entra alors sur scène en se téléportant. Je me relevais, posant mes pieds au sol pour m'approcher du Abra rouge.
« Oh... Comme tu es beau... Plus beau que mon Abra, plus intelligent que mon Débugant. Avec toi, ça pourrait marcher, je pourrais réussir. Tu veux venir avec moi ? Tu veux t'entraîner ? »
Le Pokémon restait statique, sur le sol, face à moi, alors que je commençais à me lever. Tout à coup, il disparut pour réapparaître quelques centimètres à côté. Comme s'il n'était qu'une image. Il recommença une deuxième fois, avant de rester face à moi. Alors que je me prenais le visage entre les mains, pris par une crise soudaine.
« Tu n'es pas comme eux, nous pouvons aller loin ensemble. Tu es sûrement venu pour cela, pour me délivrer. »
Et au moment où j'allais toucher le Pokémon, la scène disparut derrière un le rideau et je poussais un cri déchirant.
Sur le rideau était projeté un article de journal qui permettait selon moi de mieux comprendre la situation, j'attendis donc pendant ce temps que le rideau s'ouvre pour saluer la foule, profitant de cette pause pour féliciter Warlock pour ses efforts, puis Berserk, quand celui-ci nous rejoignit. Je veillais à couper mon micro avant de m'adresser à eux.
« Vous avez été formidables tous les deux. Berserk, tu étais épatant ! »
Alors que le rideau se rouvrait, je saluais la foule, sans trop pouvoir sourire tellement le rôle avait été difficile à tenir. Quelque part, j'avais eu l'impression de me jouer moi, dans une version alternative, sûrement ce qui aurait pu se passer si j'avais écouté mon père et embrassé sa cause. Oui, j'aurais pu devenir une personne comme ça. J'eus une pensée pour Elliott, avant de réaliser que Clarisse devait me regarder, et que la prestation devait s'éloigner de ce à quoi elle s'attendait. Je poussais un long soupir avant de regarder mes deux acolytes et saluais avec eux le public une dernière fois avant de rejoindre les coulisses.
Coulisses:
• Attaques • Téléport x3 utilisé par Abra S à la fin.
• Détails • Abra S et Debugant n'ont pas été maltraités pendant la prestation. La voix de Debugant imitant Abra est pré-enregistrée.
• Explications • Elias joue un artiste qui a sombré dans la folie suite à de multiples échecs, par sa violence, il a fini par tuer d'épuisement son Abra, avant de rendre son Débugant prêt à tout pour le satisfaire. D'abord Elias lui a fait revêtir cet accoutrement, puis, voyant que ça le rendait heureux, le Debugant a continué ainsi. Bien sûr, comme cela ne suffisait pas, Elias finira par tuer son Débugant en l'étranglant. Une fois interné, Elias reçut une visite, du moins le pensa-t-il, vivant une dernière hallucination, avant de mettre de lui-même fin à ses jours.
HAPPY HAPPY.
Signature (Vanee) = love. / avatar : Tori Yamazaki (Merci Nessa ) SONNFLORWALDS.Un nom compliqué pour une pension qui vend du pâté.
Les rideaux s'ouvrirent sur une scène envahie par le brouillard et par une lumière violette tandis que se mettait à résonner un son psychédélique, comme venu d'ailleurs, qui emplit bientôt le Dôme et les oreilles des spectateurs. Peu à peu, la brume artificielle s'estompa, laissant apparaître un Pokémon et un décor éclairés de violet : la forme grande et ronde d'un Coudlangue, les yeux fermés, la langue rentrée, immobile au centre de la scène, et autour de lui des meubles ou des objets en contre-jour devant le fond lumineux, que l'on ne distinguait que comme en ombres chinoises. Quand au son mystérieux succéda une mélodie, le Coudlangue se mit à danser : comme pour un ballet, tout d'abord, se dressant sur une patte, les bras levés, tournoyant ou exécutant un saut de Chaglam avec la délicatesse dont son espèce n'est pas dotée tandis que sur les murs de la scène, de nouveaux faisceaux lumineux projetaient des cercles de couleurs, jaune, rouge, vert, et que dans l'ombre flottaient les volutes de la fumée qu'une machine générait. Mais le Coudlangue ne tarda pas à abandonner cette grâce tâtonnante pour passer au niveau supérieur. Il bondit soudain sur une forme noire à l'extrémité du côté jardin, forme qui se révéla être un trampoline : le saut le propulsa à l'autre bout du plateau tandis que, dans les airs, il lançait sa langue musclée en avant et attrapait, grâce à elle, une large barre placée en hauteur et qui dessinait un cercle pour les spectateurs, barre à laquelle il se balança au lieu de retomber au sol, comme un Ouisticram sur sa liane. Ainsi débuta une série d'acrobaties que le Pokémon, rompu à l'exercice, maîtrisait, malgré sa masse, en virtuose : il sauta sur un agrès au centre de la scène, s'y réceptionna d'une patte avant d'y tourner sur la langue, bondit à travers un voile tendu côté cour dans lequel, drapé, il sembla un instant voler, et alla de clowneries en clowneries sous cette demi-pénombre violacée et ces jeux de lumière qui conféraient au spectacle un aspect irréel.
Au bout de quelques temps, un bureau roulant avec chaise intégrée commença à apparaître à l'avant de la scène, depuis la gauche, poussé par moi-même. Je portais une longue blouse blanche, mes cheveux étaient relativement décoiffés et j'arborais surtout de grosses lunettes rondes d'aspect farfelu et une imposante moustache noire, très clairement postiche. Le bureau et moi progressions lentement vers le milieu de la scène, accompagnés de grincements de roues ici et là. Tandis que j'avançais, la lumière violette du décor s'estompa peu à peu, remplacée par un éclairage ordinaire, en même temps que le volume de la musique et le brouillard diminuaient : ainsi, quand je m'immobilisai enfin, le silence avait envahi le Dôme et toute la scène était éclairée d'une lumière blafarde. Le Coudlangue continuait pourtant à bondir et danser, mais le nouvel éclairage révélait du décor une réalité bien plus triviale : le trampoline n'était rien d'autre qu'un lit en métal, la table de saut avait l'air d'un bureau, le cercle en hauteur était devenu une pendule lumineuse et l'ensemble, blanc et nu, complété encore par des formes carrées sur le mur du fond rappelant des fenêtres fermées, évoquait seulement une chambre de prison, ou peut-être d'hôpital. Mon bureau était tout aussi froid que le décor, bien qu'y soient posées quelques feuilles de papier. De profil par rapport au public, je m'assis, pris les feuilles, levai la tête et me raclai la gorge. Toutes les lumières de la scène s'éteignirent alors, plongeant celle-ci dans le noir : seule demeura allumée la lampe du bureau qui ne m'éclairait qu'à demi, faisant ressortir la blancheur des feuilles au milieu des ombres. Je rajustai ma moustache postiche, attendis quelques secondes. Et puis, je commençai à lire, en marquant des pauses nettes entre chaque mot :
« Pops. Coudlangue. Âge ? …On le taira. Motif d'admission ? » Je me tournai vers les spectateurs et leur jetai un regard perçant à travers mes lunettes : « ...Il est fou. » Et je poussai un soupir à fendre l'âme. « Fou. Qu'est-ce que vous voulez faire de ça ? Pardon ? Quel type de folie ? Oh, ça ! Comme si ça changeait quelque chose ! C'est pas à moi qu'il faut demander : tenez, allez plutôt lui poser la question, à lui. ...Fou. Eh oui, c'est bien le malheur de ce monde. Tout va pour le mieux, on suit notre train-train quotidien, et puis, un jour, on découvre subitement que les gens ne sont pas heureux, ce genre de choses. Alors, il nous faut l'impossible : on s'agite, on court, on se passionne, on crie, on demande la lune... et puis, on se renferme en nous-mêmes, parce que tous nos efforts ne servent à rien et que c'est plus beau à l'intérieur. N'empêche, il semble qu'il ait plutôt bien réussi à le transformer, son royaume, pas vrai ? » Je jetai un coup d’œil vers la chambre et me mis à rire, d'un rire un peu trop fort pour paraître vraiment sain. Puis, je poussai un nouveau soupir. « ...Et moi, je me retrouve avec ça sur les bras. Un fou. Comme si j'en avais pas déjà assez. Personne n'en veut, c'est plus à la mode, ils nous les refourguent tous! Avant, les rois, les princes, ils avaient tous leur petit fou de compagnie... Mais maintenant, quand on a un fou sur les bras, on ne sait plus quoi en faire. Triste époque. Alors, on nous le r'file. Et vous savez ce qu'on est censé faire d'eux ? Les "soigner". Eh oui. Vous avez déjà essayer de "soigner" un fou ? » J'éclatai d'un rire cinglé. Ensuite, je sortis une grosse aiguille. Je l'examinai d'un air concentré, tâtant la longue pointe de mon doigt, et je marmonnai, comme pour moi-même : « Les directeurs, les théoriciens, les chercheurs... Tous des tarés, j'vous jure. » Je reposai ensuite mon aiguille sur le bureau et annonçai : « Et maintenant, la séance de psy ! » Alors, je recommençai à pousser le bureau avec le bruit de grincement en direction des coulisses. Juste avant d'atteindre le bout du plateau, je m'arrêtai comme si j'avais oublié quelque chose, levai la tête et claquai des doigts : toutes les lumières se rallumèrent. Et je disparus pour de bon de la scène.
Le décor de tout à l'heure était resté presque à l'identique, si ce n'étaient quelques détails : deux chaises avaient été installées de part et d'autre du "bureau", lui-même désormais couvert de livres, et un miroir sur pied avait été posé un peu plus loin, à gauche de l'ensemble. Au fond de la scène, un des petits écrans qui avaient tout à l'heure l'air de fenêtres indiquait désormais "PSY". Pops le Coudlangue était assis sur la chaise de gauche, un Kecleon sur celle de droite. De profil pour les spectateurs, tous deux se faisaient face au-dessus du bureau et se fixaient d'un air stoïque, le Coudlangue plus grand que le Kecleon d'au moins deux têtes et sans doute trois fois plus épais que lui. Au bout de quelques instants, le Kecleon monta sur le bureau, déplaça à l'aide de sa langue l'une des piles de livres sur sa chaise et se rassit dessus. Désormais à une hauteur suffisante, il commença à feuilleter d'autres livres. Il en tira des feuilles de papier où s'étalaient des taches d'encre qu'il présenta au Coudlangue : celui-ci pencha la tête, battit des bras, ouvrit la bouche, en guise de mime. Entre deux feuilles, il s'agitait un peu, regardait autour de lui, nerveux ou perplexe, tandis que le Kecleon demeurait entièrement imperturbable. Celui-ci retourna alors brusquement sur la table et, armé d'une petite lampe, se mit à examiner les yeux et la bouche du Coudlangue, forcé de grimacer : l'écran du fond s'alluma pour retransmettre simultanément ce que "voyait" la lampe, en fait une caméra de poche, ce qui fut l'occasion pour tous les spectateurs d'admirer une tête de Coudlangue en gros plan. Enfin, le talentueux psychiatre se rassit à sa place et... attrapa avec sa langue un tampon bleu dont il oblitéra son patient : avant d'avoir pu réagir, le Coudlangue se trouva ainsi gratifié du sigle "FOU" inscrit sur sa poitrine. Il le contempla de son air ahuri tandis que le Kecleon sautait par terre et s'éloignait.
Pops, désormais seul, se leva et fit face quelques instants aux spectateurs. La langue toujours rentrée, l'inscription bleue sur son poitrail, il semblait ne pas bien savoir que faire de sa propre masse. Il se dirigea d'un pas lourdaud vers le miroir : une autre caméra placée dedans, activée à distance, permit au même écran du fond de transmettre aux spectateurs l'image du Coudlangue qui se dévisageait. Il s'examina de tous côtés, comme pour vérifier qu'il ne lui était pas poussé un troisième bras ou des tentacules, puis il frotta le sigle que le Kecleon lui avait appliqué afin de l'effacer. À cet instant précis, le Kecleon resurgit depuis le côté cour... et bondit sur le dos de Pops pour le tamponner à nouveau. Ce fut alors que le Coudlangue perdit brusquement sa passivité hagarde pour jeter, comme par réflexe, le Kecleon au loin. Ce dernier n'eut pas le temps de riposter, car c'était à mon tour de réapparaître sur la scène : toujours dans ma blouse de médecin, j'avançai droit vers Pops, un léger sourire aux lèvres et la grosse aiguille à la main.
« Tin-tin din... » Je chantonnais. Sans paraître remarquer le trouble de mon patient, j'allai jusqu'au Coudlangue qui se tenait encore devant le miroir. Je me penchai vers lui, prêt à lui planter l'aiguille dans le bras... Mais au moment même où je m'inclinais, Pops se dégagea du passage et fit volte-face, frappant mes jambes de sa queue, ce qui me fit tomber en avant sur le miroir. La fine glace, en fait prédécoupée, de celui-ci se brisa et je tombai au sol dans un gros bruit d'éclats. Toute placidité avait désormais quitté le Coudlangue. Face au Kecleon qui revenait à l'assaut, il sortit enfin sa longue langue pour le gratifier d'une énorme Léchouille paralysante : le lézard se retrouva réduit à chanceler, les membres figés, tandis que, toujours par terre, je m'étais discrètement maculé le front à l'aide d'un tube de peinture rouge dissimulé. À présent, des deux dignes médecins, l'un redressait un tête sanglante d'un air hébété tandis que le second titubait dans une gestuelle digne d'un zombie.
Le Coudlangue, lui, s'avança à pas lents jusqu'au bord de la scène, désormais libéré de la menace des médecins, mais l'air tout aussi perdu ou désespéré qu'avant. Debout face au public, il s'immobilisa, puis se recroquevilla progressivement sur lui-même, en serrant ses pattes contre sa tête. Un éclat métallique ne tarda pas à apparaître autour de lui, signe d'une capacité de protection en laquelle on pouvait reconnaître un Boul'Armure ; dans le même temps, le Kecleon, qui s'était faufilé derrière lui, leva ses pattes pour lancer Ombre Portée. Toute la scène fut plongée dans la nuit à l'exception de Pops, toujours courbé.
Il fallut plusieurs secondes d'attente face à ce noir presque complet avant que les projecteurs ne se rallument enfin. L'atmosphère de la scène avait, une fois de plus, radicalement changé : désormais, elle était éclairée à la fois de violet et de couleurs printanières, toujours avec ces faisceaux lumineux mouvants formant des fleurs ou des spirales qui éclosaient au-dessus des meubles, redevenus pures silhouettes. La musique du début résonnait de nouveau, à bas volume ; le motif de pendule de la lampe circulaire avait été remplacée par un dessin de lune ; côté cour, le Kecleon jouait comme un simple Pokémon tandis que, côté jardin, je me tenais étendu devant l'ancien miroir, me délassant, une canne à pêche à côté de moi. Le Coudlangue se redressa prudemment, regarda derrière lui, puis nous rejoignit pour vaquer lui aussi à ses occupations, balançant sa tête au gré de la musique, l'air désormais serein. Je pris la canne à pêche, dont le crochet avait été remplacé par un poids très léger pour éviter tout danger, et lançai son fil vers la fausse lune, comme pour l'attraper.
« Il a raison, finalement », commentai-je. « C'est fatigant, le monde réel : on est toujours là, à courir partout pour tenter de grappiller quelques miettes, ou à tendre la main vers des idéaux qui restent à chaque fois hors de notre portée parce que, c'est le principe, on ne peut atteindre son idéal, et que tout l'univers s'échine à nous mettre des bâtons dans les roues pour qu'on se contente de regarder le sol et qu'on se croie heureux comme ça... Mais à quoi ça sert, d'avoir une tête et la faculté d'imaginer si on ne peut pas tendre vers l'impossible ? Qu'est-ce que disait Caligula, déjà ? "Rien dans ce monde, ni dans l'autre, qui ne soit à ma mesure. Je le sais, pourtant, qu'il suffirait que l'impossible soit..." Si vous êtes satisfaits de votre piètre quotidien, c'est votre droit ! ...Mais moi, pour être heureux, j'ai besoin d'attraper la lune. »
Les lumières baissèrent lentement tandis que je relançais vers le haut le fil de la canne à pêche, que le Coudlangue et le Kecleon se prélassaient toujours et que la musique continuait de résonner. Et la scène fut plongée dans une nouvelle pénombre.
« Today I had that dream again, I roamed among the stars... »
Coulisses:
Pokémon : Pops le Coudlangue et Toby le Kecleon.
Attaques : - Léchouille de Coudlangue pour se débarrasser du psychiatre-Kecleon ; - Boul'Armure de Coudlangue lorsqu'il se renferme physiquement et mentalement sur lui-même ; - Ombre Portée de Kecleon caché derrière Coudlangue au moment d'initier la plongée de la scène dans la nuit.
Thème : La folie comme renfermement sur soi-même en rupture avec un monde réel décevant pour fuir dans sa propre intériorité.
Explications complémentaires : Coudlangue incarne le patient d'un hôpital psychiatrique, Kecleon et Edel sont deux médecins. Le décor de la scène reste toujours celui de la chambre d'hôpital, mais les jeux de lumière et la présence, ou non, de musique marquent l'alternance entre un point de vue depuis l'intériorité du patient (scénettes 1 et 3, lumière violette venue du fond qui provoque la vision des meubles comme en « ombres chinoises », car contre-jour) et un point de vue extérieur (scénette 2, lumière blanche). On peut s'interroger sur la santé des deux médecins, qui semblent à leur tour abandonner le triste quotidien pour rejoindre Coudlangue dans sa folie dans la scénette 3, à moins que tout ne soit vu du point de vue du Coudlangue qui aurait définitivement rompu avec le monde réel en incluant toutes les autres personnes dans sa construction imaginaire. Le discours d'Edel est en partie inspiré de Caligula d'Albert Camus, avec la folie comme prise de conscience de l'impossibilité d'être heureux dans le monde réel qui nous réduit à la médiocrité sans nous permettre d'agir conformément à nos idéaux : le seul moyen de changer ce monde pour l'ouvrir au bonheur serait, dès lors, d'y faire entrer l'impossible, à travers le symbole de la lune à obtenir. Dans ma prestation, ce n'est que dans la rupture avec le monde réel, rupture caractéristique de la folie, que cet impossible semble pouvoir être atteint. La dernière phrase de la prestation est un extrait de la chanson proposée en fond sonore.
(et je tiens à remercier les gentils lecteurs qui auront lu jusqu'au bout en dépit de la longueur. x))
Messieurs Dames, après deux semaines de délibération, il est temps d'annoncer la décision du jury !
Je tiens avant tout à féliciter nos deux coordinateurs qui ont offert de belles prestations assez différentes l'une de l'autre. Pour beaucoup il fut difficile de trancher, mais en définitive un choix clair s'est imposé.
Le vainqueur est...:
... ELIAS GLADSTONE ! Félicitations, notre challenger réussit brillamment sa deuxième tentative à l'Elite ! Il accède donc à l'épreuve du combat et reçoit 5000P$. Par ailleurs, son abra et son débugant gagnent 3 niveaux chacun !
Je n'en revenais pas. Là, devant moi, cette personne que je ne connaissais avait annoncé que j'avais gagné, que ma prestation d'Elite avait convaincu le jury et que je pourrai passer au combat. J'étais sans voix à cette annonce, presque tremblant. J'étais enfin parvenu à gagner, ce n'était donc pas une erreur, j'avais eu raison de venir jusqu'ici, j'avais eu raison d'écouter Clarisse et de me battre jusqu'au bout. Elle allait être si heureuse pour moi, sûrement un peu fière aussi de m'avoir encouragé. J'étais un peu embêté que ma prestation fut si sombre et que la jeune femme eut ce spectacle pour ma victoire. De son côté, Herbert état plus habitué que je pusse exploiter ce genre de thème de cette manière mais tout de même... Enfin, je pensais à mille choses à la fois et dans le même temps, j'avais l'impression que mon cerveau était complètement vidé, hors service. Allez, il ne me restait donc qu'une étape à franchir. Je n'y croyais pas, tellement je n'avais pas eu confiance en moi pendant tout ce temps. La défaite précédente m'avait vraiment marqué, mais grâce à Clarisse, j'avais pu trouver la force en moi pour reprendre la coordination et me présenter une nouvelle fois à l'Elite. Edel était à mes côtés pour le résultat et je devais avouer que j'étais tellement préoccupé par les résultats que je l'avais à peine calculé. Pourtant il était bien là et mon admiration pour lui ne s'était pas amoindrie au vu de sa prestation, bien au contraire. Il m'avait semblé maîtriser son sujet et ses Pokémon étaient tout simplement formidables.
« Je vous remercie et... Enfin... Merci infiniment M. Aubier d'avoir concouru contre moi. »
Je préférais ne rien lui dire sur sa prestation, je n'avais pas réussi à tout suivre à cause de mon stress et ce ne serait pas approprié de lui donner mes impressions dans ce cadre-ci. Je préférais donc me taire et ne pas plus en ajouter. Le membre du jury m'expliqua qu'ils allaient maintenant annoncer le résultat au public et que nous aurions l'occasion de le saluer une dernière fois. Et bien, c'était donc cela qui se passait en cas de victoire ? Je me sentais mal d'être parti si rapidement la dernière fois, mais je devais avouer que je n'aurais sûrement pas apprécié me retrouver sur la scène pour que l'on pusse annoncer ma défaite.
Je me demandais ce que pouvait par contre ressentir un Maître Coordinateur dans ce cas précis. Avant tout, il pouvait être fier de lui, bien sûr, mais n'y avait-il pas une forme de ressentiment lorsque l'on perdait face à un petit jeune qui n'était pas aussi brillant ? Je n'avais aucune idée de ce que l'on pouvait ressentir dans ce genre de cas, il y avait peut-être un moment où l'on se demandait comment on aurait pu faire mieux ? En tout cas, Edel n'avait pas l'air réellement triste ou décontenancé. Je ne pensais pas non plus qu'il en était à un point où il était heureux pour moi, mais il ne semblait pas fâché déjà.
Je fis quelques pas pour suivre le représentant du jury et après quelques instants nous arrivâmes sur la scène. Le public lança des applaudissements pendant que le représentant annonçait les résultats, me déclarant gagnant. J'en eus le souffle coupé. Entendre le vrombissement de la foule qui m'applaudissait me mit presque les larmes aux yeux. Je les saluais avant d'attendre le bon moment pour quitter la scène. Cela allait me prendre un certain temps avant de pouvoir redescendre. J'étais perché sur un nuage de bonheur complètement inespéré et je comptais bien en profiter avant de devoir songer à la seconde partie de l'Elite. Je savais que le combat ne serait pas non plus une partie de plaisir, bien sûr je savais que mes Pokémon avaient suffisamment de talent pour réussir, mais ils n'étaient pas infaillibles et les Maîtres Coordinateurs étaient quand même des professionnels...
Allez, ne pas y penser pour le moment, j'avais gagné. Je pouvais célébrer tout cela. Je remerciai encore une fois M. Aubier et le jury, avant de me faire raccompagner vers mes loges. J'allais pouvoir me changer, prendre un peu de temps avant de sortir du Dôme et de rejoindre ma chambre d'hötel. J'eus l'impression de tout faire au ralenti, la fatigue, le stress, tout était retombé d'un coup. Quelques temps plus tard, je me retrouvais dans ma chambre à l'hôtel, entouré de mes Pokémon que je remerciai plus que jamais après avoir dévalisé une boutique à poffins. J'aurais aimé que Clarisse fut là pour fêter cette victoire, mais je ne la remercierai jamais assez d'avoir été là dans le pire moment. Après avoir échangé quelques messages enthousiastes pendant qu'elle était en cours, je l'appelai, le sourire aux lèvres en imaginant lire la joie dans son regard.
Je l'avais fait.
Signature (Vanee) = love. / avatar : Tori Yamazaki (Merci Nessa ) SONNFLORWALDS.Un nom compliqué pour une pension qui vend du pâté.
Quand les applaudissements avaient éclaté de l'autre côté des rideaux en train de se refermer, ils m'avaient rappelé à la réalité en provoquant instantanément en moi à la fois un sentiment de soulagement et le retour de l'anxiété – émotions mêlées qui avaient persisté tandis que j'aidais les techniciens à débarrasser le plateau, puis que je filais dans les coulisses où je commençais à faire les cent pas, Pops derrière moi et Toby agrippé à mon dos. Les spectateurs avaient applaudi – ils avaient applaudi, donc ils avaient aimé. Ils avaient largement applaudi Elias avant moi, aussi, avec une ardeur agréable à entendre. Avaient-ils vraiment applaudi ma prestation parce qu'elle leur avait plu, ou par pure politesse ? Je m'étais beaucoup amusé à monter mon spectacle, comme toujours : le thème m'avait parlé et je profitais désormais des nombreux moyens mis à disposition par l'Élite pour tester de nouvelles choses, en termes de décor et d'effets techniques. Mais ne m'étais-je pas parlé qu'à moi-même ? En avais-je trop fait ? Ou pas assez ? ...Alors que j'étais loin d'être un anxieux de nature, s'il y avait une chose pour laquelle je stressais, c'étaient les concours de coordination, surtout lorsque mon tour était passé. Je prenais un immense plaisir à préparer le spectacle puis à me trouver sur scène, mais une fois dans l'attente des délibérations, je ressentais toujours cette petite angoisse, et parfois une plus intense. C'était quand même bizarre, pour moi qui avais travaillé quelques années en tant qu'animateur de fêtes ou de soirées, avec mes petits spectacles, avant d'obtenir ce poste de champion : on pouvait raisonnablement se dire qu'après tout ce temps, je devais être habitué à la scène. Mais je n'y pouvais rien : un Dôme, c'était quand même autre chose qu'un restaurant ou quelques planches montées dans un jardin, les spectateurs n'étaient pas les mêmes, et ce n'était pas le même enjeu qui entourait ma prestation – d'autant plus à présent que j'étais devenu Maître Coordinateur.
Je marchais à grands pas en ignorant les employés qui s'approchaient parfois pour me proposer des rafraîchissements (la plupart respectaient cependant mon attente), puis je me tournai subitement vers mon Coudlangue qui me suivait à la trace.
– Toi, ça t'a plu ? Il fit oui de la tête, de son air comme bien souvent benêt. – Bon.
Et c'était reparti pour les cent pas dans le long couloir des coulisses qui menait jusqu'aux bureaux et à ma loge, trop petite pour pouvoir y tourner convenablement en rond. Je me demandais à moitié si Camille, malgré sa déprime, avait regardé le spectacle à la télé – sans doute, il n'aurait pas manqué ça – mais je n'avais pas pour le moment la tête à allumer mon motismart pour voir s'il ne m'avait pas envoyé un SMS, pas plus que pour Hélène ou Calyso, d'ailleurs. Je vis en revanche arriver Élise, l'air empressée, qui me raconta immédiatement combien ma prestation était réussie en laissant transparaître l'admiration incompréhensible qu'elle éprouvait pour mon art (pas pour ma personne, au contraire). Contrairement aux employés qui l'avaient précédée, je la remarquai, elle, mais l'interrompis sans l'écouter en lui mettant les lunettes et la moustache postiches que j'avais gardées sur moi dans les mains.
– Restez là.
Et je repartis, les pans de la blouse blanche que j'avais oubliée d'enlever battant sur mes mollets. Au bout de deux allers-retours, cependant, je m'arrêtai devant l'écran mural qui rediffusait les prestations pour regarder celle d'Elias. Le jeune homme était passé avant moi, si bien que je n'avais rien vu de son spectacle, ayant préféré rester dans ma loge pour me concentrer. « Alors, qu'est-ce qu'il a fait, le p'tit jeunot », marmonnai-je en lançant sa vidéo. Dès les premières minutes de la prestation, je sentis les muscles de mes épaules se détendre : c'était réussi. Très réussi, même. Il avait choisi un traitement du thème tout à fait différent du mien, et beaucoup plus sérieux – d'emblée, du moins –, mais le spectacle était très prenant et parfaitement maîtrisé. L'ambiance qui se dégageait de sa mise en scène était glaçante, et il parvenait à happer dans ce minimalisme en faisant immédiatement sentir le drame en jeu – sans qu'il soit pour autant aisé de mettre le doigt dessus. Je sentis Élise s'approcher pour finir de regarder la vidéo avec moi.
– C'est très bon. – ...Oui.
Je comprenais à présent l'ardeur avec laquelle les spectateurs l'avaient applaudi. Un seul visionnage de cette prestation me permettait de le deviner : il allait gagner. Ou, tout du moins, si les votes étaient serrés, il avait toutes les qualités requises pour cela. Je n'étais plus anxieux. Savoir que mon adversaire avait réalisé une prestation d'un aussi bon niveau me soulageait : en effet, s'il gagnait, je n'aurais pas à me morfondre sur ce dont ma prestation avait manqué mais plutôt à le féliciter pour sa victoire, amplement méritée. Je relançai la vidéo pour la regarder à nouveau, silencieux devant l'écran avec Élise. Ensuite, je poussai un long soupir, je levai Toby en l'air pour le poser sur ma tête, et je repartis vers ma loge pour y poser ma veste, toujours impatient malgré tout que l'heure des résultats arrive et ne tenant pas en place quand il s'agissait de tuer le temps.
Ce fut dans une petite salle de réunion que l'on nous annonça la victoire du challenger, alors que le public, là-haut, patientait encore. Je souriais maintenant car je m'attendais à l'annonce, et j'étais surtout curieux de voir la réaction du jeune homme. Nous avions à peine échangé quelques mots car il était reparti dans sa loge immédiatement après sa prestation et notre précédent échange avait dû être écourté, mais il avait l'air d'un garçon honnête et sa tension était palpable. Lorsque sa victoire fut annoncée, j'attendis quelques instants qu'il encaisse le choc avant de me tourner vers lui.
– Mais merci à toi, tu étais un adversaire remarquable ! Je posai la main sur son épaule. J'espérais qu'il ne se formaliserait pas trop de ma nouvelle familiarité. Ta prestation était d'une grande qualité alors que ce n'était pas un sujet facile à traiter, bravo à toi et à Débugant !
Nous fûmes ensuite rappelés sur la scène où la victoire fut cette fois proclamée aux yeux de tous, sous un tonnerre d'applaudissements. Le challenger restait donc en lice pour le lendemain, ce qui faisait plus de spectacle, et je ne me retins pas non plus de saluer avec un grand sourire accompagné de Toby. Il fut ensuite temps pour Elias et moi de retourner dans nos quartiers respectifs, et je saluai amicalement ce jeune homme dont j'avais pu constater la valeur :
– C'est un plaisir de voir que la relève est assurée. Bonne chance pour demain !
Je conclus d'un clin d'œil amusé, avant de m'éloigner. À présent, je pouvais regarder mes SMS. Contacter Pyon-Pyon, peut-être, qui avait dû regarder le spectacle à travers moi. Ouvre ton esprit. Sans doute téléphoner à Hélène et à Camille. J'étais déçu, quand même, d'avoir perdu, et j'avais besoin d'une bonne soirée pour me changer les idées.
Et je réfléchirais à un moyen de convaincre Élise de me laisser prendre un nouveau congé pour aller voir Camille à Johto. C'était ce qu'Elias m'avait conseillé de faire, et ça me paraissait une excellente idée. J'avais souvent besoin de mon ami pour respirer et, quelquefois, c'était lui qui avait besoin de moi.